«Reconnaître toutes les formes d’union»
Sommaire
Plaidoyer 03/2014
23.05.2014
Dernière mise à jour:
26.05.2014
Suzanne Pasquier
Depuis l’an dernier, les adultes préfèrent vivre dans le célibat plutôt que dans le cadre d’une union conjugale, a révélé l’Office fédéral de la statistique. La professeure bâloise Ingeborg Schwenzer y puise un argument pour remettre en question l’institution du mariage et lui préférer une reconnaissance juridique de toutes les formes d’union. Elle propose ainsi à la conseill...
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AbonnementDepuis l’an dernier, les adultes préfèrent vivre dans le célibat plutôt que dans le cadre d’une union conjugale, a révélé l’Office fédéral de la statistique. La professeure bâloise Ingeborg Schwenzer y puise un argument pour remettre en question l’institution du mariage et lui préférer une reconnaissance juridique de toutes les formes d’union. Elle propose ainsi à la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga, en vue d’un symposium sur l’avenir du droit de la famille, de mettre sur un pied d’égalité les couples mariés, ceux qui vivent en concubinat et les personnes vivant en partenariat enregistré. Elle se fait la porte-parole, entre autres, du «mariage pour tous» et de l’adoption par les couples de même sexe. Autant d’idées novatrices méritant d’être débattues, bien que le Parlement ait déjà posé sur plusieurs points des balises qui ne seront pas écartées de sitôt.
L’audacieuse Bâloise fait la promotion d’un droit suivant davantage l’évolution de la société. Mais il semble que, sur certains aspects, elle ait quelques longueurs d’avance. Ainsi, elle n’hésite pas à remettre en question l’interdiction de la polygamie, malgré, reconnaît-elle, une forte réprobation du mariage à plus de deux personnes dans la tradition chrétienne occidentale. Mais elle ne dit mot de la contrariété du mariage polygame avec l’ordre public garanti par l’art 27 al. 1 LDIP. Elle n’évoque pas non plus la discrimination subie par les femmes dans cette forme d’union, qui tomberait certainement sous le coup de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, en vigueur en Suisse depuis 1997. Car il n’est pas question, ici, d’un scénario de ménage à trois tiré d’une comédie cinématographique, mais bien de la réalité des unions d’un homme avec plusieurs femmes admises par de nombreux pays musulmans.
Ce sera sans doute un pavé dans la mare des juristes et des politiciens réunis à Fribourg par le Département fédéral de justice et police le 24 juin prochain, qui représenteront toutes les tendances et tous les partis. Simonetta Sommaruga a elle-même fait savoir qu’elle n’adhère pas forcément aux idées de la professeure Schwenzer, bien qu’elle soit en faveur de l’évolution de l’ordre juridique dans le domaine de la famille. Mais c’est peut-être là une tactique: après avoir écarté la polygamie et prôné le maintien de l’institution du mariage, les participants seront peut-être prêts à lâcher du lest sur l’adoption par les couples du même sexe…
Et certains auront beau jeu de rappeler que, parfois, le droit est en avance sur l’évolution de la société. Ainsi, rares encore sont les femmes qui décident de garder leur nom de jeune fille au moment du mariage, malgré le nouveau droit introduit au début de 2013. Et d’aucuns souligneront que des informations plus conservatrices peuvent être extraites des statistiques: si la majorité des adultes vivent dans le célibat, seuls 19% des enfants naissent hors mariage.