1. Introduction
La loi fédérale du 11 décembre 2009 révisant le Code civil, en vigueur le 1er janvier 2012, apporte de nombreuses modifications au livre IV du Code civil, notamment dans les domaines des servitudes, de la propriété par étages et de la copropriété, du droit de voisinage et de la tenue du Registre foncier. Le fer de lance de cette révision a toutefois été l'introduction d'une cédule hypothécaire de registre, emportant également des dispositions nouvelles en matière d'hypothèques légales. C'est au domaine des gages immobiliers que se limite cette contribution, qui entend s'attacher à souligner surtout les changements concrets entraînés par la révision, autant qu'ils puissent être prédits avant l'entrée en vigueur de la loi.
2. La cédule révisée, spécialement la cédule de registre
2.1. Les options fondamentales
La cédule de registre, ou cédule «dématérialisée» (on pourrait étymologiquement dire «décédulisée»), doit son introduction à la pression des milieux financiers liés au crédit hypothécaire, embarrassés par le traitement des cédules hypothécaires comme papiers-valeurs. Le Conseil fédéral avait répondu favorablement à une motion Schiesser allant dans ce sens - et déposée au Conseil des Etats en 1998 - et confié un mandat d'expertise au professeur Wiegand pour rapporter sur la mise en œuvre de cette idée. Le rapport de MM. Wiegand et Brunner, déposé à la fin de 2002, a fourni le canevas d'un avant-projet qui, après avoir été soumis à la Commission consultative du département fédéral en la matière et à consultation extérieure, a abouti à un projet et à un message adoptés par le Conseil fédéral le 27 juin 2007. Avec très peu de modifications par rapport au projet du gouvernement et à un minimum de discussions aux Chambres, les nouvelles dispositions ont été votées au Parlement fédéral le 11 décembre 2009.
Sur la question de la cédule de registre, par opposition à d'autres questions du même texte légal, l'on peut partir de l'idée que les grandes options des experts correspondent au texte voté par le Parlement et que, sous quelques réserves examinées plus loin, les idées du Conseil fédéral ont été votées par les Chambres.
La première option a été de ne rien bouleverser dans le marché hypothécaire: le législateur a maintenu les cédules papiers-valeurs du droit de 1907 non seulement à titre transitoire, mais encore comme forme alternative à la nouvelle cédule de registre dans le nouveau droit. En d'autres termes, la cédule de registre s'analyse comme une alternative à la cédule traditionnelle, au choix des parties. Savoir si les établissements financiers, comme la genèse du projet pouvait peut-être le laisser prévoir, vont systématiquement imposer, dès 2012, la cédule de registre au vu de la libération du traitement du papier reste encore incertain, les avantages de cette libération devant être mis en regard des inconvénients de traitement de la cédule de registre pour le mécanisme de sa cession entre créanciers gagistes successifs (le propriétaire légitimé par l'ancien créancier gagiste après paiement complet devant à son tour légitimer, par réquisition, le nouveau créancier gagiste).
La deuxième option a été de maintenir, pour la cédule de registre, la même réglementation matérielle que dans la cédule traditionnelle, mais en remplaçant le support matériel du papier par l'écriture. La dette inscrite au registre, comme elle l'était aussi dans le papier-valeur, est donc une dette abstraite, distincte de la créance causale qui devait être garantie par la constitution du gage (art. 842 al. 2 et 846 al. 1 CC révisés). Le transfert de la cédule de registre s'opère par l'écriture constitutive, et non par la possession du papier-valeur (pour les titres au porteur) ou par l'endossement ou la cession (pour les autres formes de papiers-valeurs).
Cette deuxième option a pour conséquence que la plupart des anciens art. 842 à 874 CC sont repris matériellement dans la nouvelle loi: les règles spécifiques au support papier-valeur traditionnel lui sont réservées (art. 860 à 865 CC révisés), alors que les autres constituent une partie générale des deux formes de cédules (art. 842 à 856) auxquelles on ajoute trois dispositions nouvelles spécifiques à la cédule de registre (art. 857 à 859 CC révisés).
Dernière option fondamentale: la lettre de rente du droit de 1907, statistiquement de moins en moins utilisée, même dans les cantons de Suisse centrale où elle était traditionnellement cantonnée, disparaît: les titres de cette catégorie constitués jusqu'en 2011 restent soumis exclusivement à l'ancien droit (fédéral ou cantonal, cf. art. 853 ancien CC), sauf prescriptions cantonales permettant de les convertir en titres du nouveau droit (essentiellement la cédule hypothécaire) selon l'art. 33a Tit. fin. CC. La reprise des art. 854 ss anciens CC s'est faite ainsi sans référence à la lettre de rente, abrogée.Du point de vue du praticien, il paraît judicieux de souligner les différences imposées par le changement de loi dès 2012, et cela à la fois pour les nouveaux titres, ainsi que pour les titres déjà existants au changement de loi.
2.2. Les changements matériels pour toutes les cédules
2.2.1. Rapports entre créance causale et créance abstraite
La présomption de novation de la créance causale de l'ancien art. 855 CC était devenue exceptionnelle dans la pratique du crédit hypothécaire, tant la remise à fins de garantie de la cédule était largement répandue, entraînant une convention contraire au sens de l'art. 855 al. 2 CC ancien. L'art. 842 al. 2 nouveau CC reprend désormais cette pratique comme valant à défaut de convention contraire, la novation n'étant en règle générale plus présumée (art. 116 CO).
Naturellement, la présomption de novation de l'ancien droit continue à s'appliquer aux cédules existantes au changement de loi (art. 1er Tit. Fin. CC). Une simple modification de la cédule existante déjà en 2011, après 2012, n'entraîne pas, sauf convention contraire, une remise en cause du système valant pour les rapports entre créance causale et créance «cédulaire».
Cet alignement de la loi nouvelle sur la pratique aura probablement une conséquence importante, encore controversée à ce jour. Puisque la loi présume le maintien de l'existence d'une créance causale distincte, contrairement à la loi ancienne, l'acquéreur d'une cédule, papier ou de registre, après 2011, risque de ne pas être considéré comme étant de bonne foi (selon l'art. 3 CC) et, par là, de se voir opposer les moyens personnels du débiteur tenant à cette créance causale (art. 848, 849 révisés CC), s'il ne s'enquiert pas de la nature et du contenu de cette créance causale lorsqu'il se fait céder la cédule.
2.2.2. Disparition de la protection du débiteur qui amortit
Dans l'ancien système légal, les «acomptes payés sous forme d'annuités» (art. 874 al. 3 CC ancien), soit les amortissements réguliers, pouvaient être opposés au créancier cessionnaire, même de bonne foi, sans avoir été mentionnés sur le titre (et au registre, art. 874 al. 1 CC ancien). Cela explique la rareté des mentions faites par le Registre foncier de tels versements dans la pratique.
Or, sans explication particulière, la règle correspondante du projet du Conseil fédéral, formulée à peine plus largement (art. 849, al.2 et 3 du projet de CC en 2007) a été supprimée par le Conseil des Etats, et cette protection contre le cessionnaire de bonne foi du titre n'est pas reprise dans la loi nouvelle. Il y a donc un risque sérieux de devoir payer deux fois un amortissement régulier face à un cessionnaire de bonne foi de la cédule, faute d'indication spécifique des versements effectués au registre foncier. Savoir si ce risque sera concrétisé, pour les acquisitions dès 2012 des titres de cédule, dépend de la pratique des établissements de crédit: la faille existe, mais sera-t-elle utilisée?
2.2.3. Dénonciation de la cédule
Donnant suite à une motion Jossen transformée en postulat, la nouvelle loi supprime les compétences cantonales réservées aux art. 843 et 844 anciens CC, soit les restrictions en matière de constitution de la cédule (la plupart des cantons qui connaissaient encore un plafond fixé à l'estimation officielle, comme le Valais, ont supprimé ces restrictions avant le changement du droit fédéral) et en matière de dénonciation de la dette «cédulaire».
La règle supplétive se référant au terme de l'usage local est ainsi remplacée par un préavis de dénonciation de six mois pour la fin d'un mois (art. 847 al. 1 révisé CC). La suppression des règles cantonales impératives, comme en connaissait le canton de Genève sur ce sujet, a amené les Chambres fédérales à adopter, non sans discussion, un délai minimal, en cas de dénonciation par le créancier gagiste au remboursement, de trois mois pour la fin d'un mois (art. 847 al. 2 révisé CC), le créancier pouvant prévoir une dénonciation plus courte par avance si le débiteur est déjà en demeure pour le paiement des intérêts ou de l'amortissement.
Ces règles, déjà très importantes pour les procédures de mainlevée, ne s'appliquent pas aux cédules existant déjà au changement de loi (art. 28 Tit. Fin. CC), qui restent ainsi régies par les dispositions supplétives (844 al. 1 ancien CC) ou impératives (droit cantonal) de l'ancien droit. Seule est réservée pour ces cédules anciennes la protection impérative de l'art. 847 al. 2 révisé CC, qui fixe un seuil minimal au-delà duquel les règles anciennes continuent à s'appliquer.
2.2.4. La garantie des «intérêts effectivement dus»
Après navette entre les Chambres, la proposition du Conseil fédéral de modifier l'art. 818 al. 1 ch. 3 CC a finalement été retenue. Selon cette disposition, qui vise essentiellement la seule cédule, il s'agit de ne garantir au créancier gagiste que les seuls intérêts des trois années - garantis par gage - «effectivement dus», soit d'exclure un intérêt «théorique» de la créance «cédulaire» au-delà de ce qui est dû en application du rapport de base, soit du paiement du capital de la créance causale et des intérêts qui lui sont rapportés. Cette règle, d'«ordre public» (art. 26 al. 2 Tit. Fin. CC) s'applique dès l'entrée en vigueur du nouveau droit à toutes les créances de cédules existantes.
2.2.5. La suppression de la protection du débiteur en cas de transfert de la cédule
Il faut enfin signaler une modification du droit en vigueur qui touche aussi à la cédule papier-valeur, alors qu'on pourrait la penser propre à la cédule de registre. Selon l'art. 862 al. 1 ancien CC, les intérêts et amortissements périodiques («annuités») pouvaient être acquittés, sans présentation du titre, entre les mains du créancier jusque-là reconnu tant qu'avis n'avait pas été signifié au débiteur d'un changement de créancier.
Cette règle protectrice du débiteur est tombée face à la présomption universelle de connaissance des écritures du Registre foncier (art. 970 al. 4 CC) pour la cédule de registre, le transfert de celle-ci étant révélé par une écriture constitutive (art. 858 révisé CC) . Même s'il doit recevoir normalement avis de l'opération pour autant qu'il soit propriétaire de l'immeuble et donc connu du Registre foncier (art. 969 CC), le débiteur doit guetter au Registre foncier tout changement de créancier gagiste, pouvant l'amener, en l'absence d'avis, à payer deux fois des intérêts ou amortissements. Cette règle montre, comme celle liée à la disparition de l'ancien art. 874 al. 3 CC, mentionnée plus haut, une péjoration sensible de la situation du débiteur d'une cédule hypothécaire, sans doute plus marquée encore pour la cédule de registre, au vu de ce qui vient d'être dit.
La règle est au demeurant aussi tombée pour les cédules papiers-valeurs, la légitimation du créancier gagiste selon le droit ordinaire des papiers-valeurs devant, à défaut de maintien de l'ancien art. 862 al. 1 CC, devenir la règle universelle.
2.3. La problématique du transfert et du grèvement de la cédule de registre
Par définition, la suppression du support qu'est le papier-valeur devait amener pour la cédule de registre à un nouveau mode de transfert: l'inscription au Registre foncier (art. 858 révisé CC), étendu à la création d'un gage ou d'un usufruit sur la cédule (art. 859 révisé CC). Si l'inscription constitutive est requise par le transférant, légitimé par l'écriture ou hors Registre foncier (art. 104 de l'ordonnance sur le registre foncier du 23 septembre 2011), la question du titre ou de la cause juridique de ce transfert n'est pas abordée par le législateur. Le Conseil fédéral, dans son message (FF 2007 pp. 5059-5060), paraît être parti de l'idée que l'acte causal est consensuel et n'a pas à être produit au Registre foncier, cela même si le transfert de l'art. 858 CC révisé est un transfert causal, nécessitant un titre valable.
La doctrine est divisée sur l'application de la forme écrite de l'art. 973c al. 4 CO au transfert de la cédule, considérée - une fois dématérialisée - comme un droit-valeur au sens large. Mais, de toute manière, si l'art. 973c al. 4 CO était inapplicable, la forme écrite serait prescrite par l'art. 165 CO et, à supposer même par impossible qu'on puisse encore écarter cette dernière exigence, la preuve écrite d'une cause efficace purement consensuelle est nécessaire pour l'écriture constitutive au Registre foncier (comme c'est le cas par exemple pour un bail oral à annoter). A tous points de vue, la forme écrite du titre devant être exigée, on conçoit mal comment un silence prétendûment qualifié écartant l'art. 965 al. 3 CC pour une écriture constitutive pourrait se contenter d'une réquisition sans titre causal la justifiant, et soumis à l'examen du conservateur du registre. La pression des milieux financiers a là, apparemment, eu des effets illogiques, contraires au système de la loi. Cette absence de justification du titre est d'autant plus incompréhensible et illogique que, pour un simple usufruit grevant la cédule (soit, pour le cédant, un engagement moins conséquent!), la forme écrite doit être respectée, l'art. 746 CC renvoyant à l'art. 165 CO.
Avec un Registre foncier jouissant de la foi publique quant au droit de disposition sur la cédule de registre, mais non quant au titre justifiant de ce droit de disposition, le droit suisse va entrer dans une nouvelle ère dès 2012 qui dissocie l'écriture constitutive en deux volets, et qui va sans doute amener les débiteurs récalcitrants à mettre systématiquement en cause les titres de transferts non révélés par l'écriture, celle-ci ne suffisant pas à elle seule à légitimer le créancier. L'avenir dira si les établissements de crédit qui auront choisi de pratiquer la cédule de registre n'ont pas là tiré dans leurs propres buts.
2.4 Transformation en droit transitoire
Comme on vient de le souligner, la nature de papier-valeur ou de droit de registre de la cédule n'est pas sans conséquence juridique pour le débiteur et le propriétaire grevé. Il s'agit clairement d'un point essentiel du titre de gage, à couvrir par la forme authentique (art. 799 CC), et la transformation dès 2012 d'une cédule papier-valeur créée sous l'empire du nouveau droit en cédule de registre et inversement nécessite une modification du titre constitutif, soit le respect de la forme authentique, contrairement à la proposition formulée par les experts en 2002 (FF 2007 pp. 5072s).
Une forme simplifiée de transformation de cédule papier-valeur en cédule de registre n'est ainsi finalement prévue par le droit transitoire (art. 33b Tit. Fin. CC) que pour les cédules existant au 31 décembre 2011. Il faut alors le consentement du propriétaire grevé et de tous les ayants droit à la cédule en la forme écrite, seule l'adhésion du débiteur (pas nécessairement connu du Registre foncier, encore que l'exigence de son adhésion eût été justifiée) n'étant pas requise. La cédule ainsi transformée (à la date de l'écriture dès 2012) reste cependant une cédule de l'ancien droit quant au droit matériel (art. 26 et 28 Tit. Fin. CC notamment, appliqués plus haut).
3. Hypothèques légales
3.1. Hypothèques légales directes
C'est dans un souci de plus grande clarté du Registre foncier et d'élimination des gages occultes, qui ne sont pas révélés par une écriture ayant la foi publique, que la loi du 11 décembre 2009 modifie les art. 808, 810, 819 et 836 CC, l'art. 784 CC étant aussi aligné sur l'art. 836 CC pour les charges foncières de droit public. Dès 1000 fr. de capital, le gage occulte doit apparaître au Registre foncier par une inscription, sous peine d'être inopposable aux tiers acquéreurs de bonne foi de l'immeuble grevé, et cela passé un délai de quatre mois pendant lequel le gage peut encore être occulte et opposé à des tiers même de bonne foi.
Pour les gages occultes de droit privé (art. 808 al. 3, 810 al. 2 et 819 CC), la règle s'applique dès le 1er janvier 2012, le délai de quatre mois étant compté selon l'art. 49 Tit. Fin. CC dès le 1er janvier.
Pour les hypothèques légales de droit public (art. 836 CC, comme pour les charges foncières de droit public), les collectivités publiques cantonales ont encore un délai de dix ans dès le 1er janvier 2012 pour faire inscrire les gages directs existant au changement de loi: en d'autres termes, selon les cantons, ce n'est qu'en 2022 que les gages légaux publics occultes seront inopposables aux tiers de bonne foi de façon générale, y compris pour les cas relevant de l'ancien droit.
Dès 2012, les gages de droit public nés après le 1er janvier devront être inscrits, pour être opposables à tout tiers, dans les quatre mois qui courent dès l'exigibilité de la créance ou, à défaut, dans les deux ans qui courent dès la naissance de la créance de droit public. Ce régime dissocié reste à devoir être appliqué dans les nombreuses législations cantonales qui ne distinguent pas nécessairement clairement la naissance de la créance garantie de celle du gage ou encore de son exigibilité. Les cantons peuvent de toute manière être plus exigeants encore (art. 836 al. 3 CC révisé), soit exiger une inscription constitutive pour la naissance de l'hypothèque légale ou, comme le droit vaudois depuis près de 50 ans, supprimer tout délai d'attente pour l'opposabilité aux tiers.
3.2 L'hypothèque légale des artisans et entrepreneurs
En matière d'hypothèques légales des artisans et entrepreneurs, la révision règle des controverses en en soulevant d'autres. On terminera cet exposé en les passant brièvement en revue.
a. Le délai péremptoire de l'art. 839 al. 2 CC passe de trois à quatre mois. Le cours du délai à cheval sur 2011 et 2012 devrait être réglé par l'art. 49 al. 2 Tit. Fin. CC, la loi n'ayant prévu aucune dérogation à cette dernière disposition (controversé).
b. Lorsque le maître d'œuvre n'est pas le propriétaire (locataire, fermier, usufruitier ou promettant acheteur qui, finalement, ne réalise pas l'acquisition), mais que le propriétaire a consenti aux travaux, l'art. 837 al. 2 révisé CC permet l'hypothèque légale pour le montant de la créance contractuelle, alors que, dans ce cas largement controversé, le Tribunal fédéral avait jusqu'ici retenu une hypothèque sur la base de la seule indemnité de l'art. 672 CC. Tant que le gage n'est pas inscrit, au moins à titre provisoire, le droit transitoire résulte ici de l'art. 3 Tit. Fin. CC. Matériellement, on peut craindre, particulièrement pour les travaux commandés par le locataire, un problème de double paiement en lien avec l'art. 260a CO à charge du propriétaire; la question de l'entrepreneur qui croit de bonne foi en une autorisation des travaux ne devrait pas être résolue en avalisant l'hypothèque légale en sa faveur, sauf imputabilité d'une apparence trompeuse au propriétaire qu'il lui incombe d'établir.
c. Les travaux garantis par hypothèque légale sont étendus aux démolitions et aux montages d'échafaudages, dernier cas exclu par la jurisprudence récente du Tribunal fédéral sous le régime de 1907. En réalité, la novelle interprète là le texte de 1907 de façon authentique, en écartant la jurisprudence fédérale, de façon qu'il ne devrait pas y avoir de droit transitoire. Matériellement, l'élargissement laisse ouvertes des questions de champ d'application de la garantie, par exemple pour de simples travaux d'assainissement ou de stabilisation du sol non liés aussitôt à une construction.
d. Enfin, s'il y a litige sur l'affectation publique du terrain de façon à exclure l'hypothèque légale, une annotation provisoire est seule possible jusqu'à droit connu sur l'appartenance du bien au patrimoine administratif (art. 839 al. 5 et 6 révisés CC). A défaut d'inscription possible pour ce seul motif, la loi institue un cautionnement simple de la collectivité publique propriétaire, moyennant exercice par l'entrepreneur sous-traitant de son droit comme en matière de gage légal (alinéa 4 nouveau de l'art. 839 révisé CC). Ce mécanisme aura un effet essentiellement dissuasif, selon toute vraisemblance, même si le droit du cautionnement simple n'est pas entièrement adapté à cette situation particulière.
Bibliographie sommaire
Roland PFÄFFLI, Zur Revision des Immobiliensachenrechts, RSJ 2011, 225ss
Denis PIOTET, La nouvelle cédule de registre, Not@lex 2010, 1ss.
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Rainer SCHUMACHER, Das Bauhandwerkerpfandrecht, Ergänzungsband zur 3. Auflage, Zürich 2011.
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Stefan WEISS, Der Register-Schuldbrief, thèse Lucerne, Zürich 2009.
Wolfgang WIEGAND/Christoph BRUNNER, Vorschläge zur ausgestaltungdes Schuldbriefes als papierloses Registerpfand, Revue de droit suisse, Beiheft 39, Bâle 2003.