Que le ventre du juge soit vide ou plein...
Sommaire
Plaidoyer 3/11
31.05.2011
Dernière mise à jour:
06.10.2013
Vera Beutler
Même les enfants le savent: on ne s'approche pas d'un taureau avec un tissu rouge, lorsqu'on veut éviter le combat.
Mais les avocats savent-ils qu'ils auraient intérêt à approcher le juge avec une barre de céréales? En effet, un juge au ventre plein rend des décisions plus clémentes, à en croire une étude menée par les psychologues de l'économie Shai Danziger et Jonathan Leva...
Article payant
Pour lire cet article, connectez-vous ou choisissez l'un de nos abonnements.
AbonnementMême les enfants le savent: on ne s'approche pas d'un taureau avec un tissu rouge, lorsqu'on veut éviter le combat.
Mais les avocats savent-ils qu'ils auraient intérêt à approcher le juge avec une barre de céréales? En effet, un juge au ventre plein rend des décisions plus clémentes, à en croire une étude menée par les psychologues de l'économie Shai Danziger et Jonathan Levav. Avec une équipe de chercheurs de la Business School de l'Université de Columbia, ils ont voulu creuser la question pour savoir quels sont les facteurs qui influencent des juges. Ils ont donc analysé pas moins de 1112 audiences, au cours desquelles les magistrats devaient se prononcer sur les demandes de sursis de détenus emprisonnés en Israël. Les jours d'audience étaient divisés en trois sessions, permettant aux juges de s'accorder deux pauses pour se restaurer: l'une en milieu de matinée et l'autre à midi. Résultat: tandis que les requêtes de détenus déposées au début de chaque session étaient acceptées à hauteur de 65%, ce taux descendait à quasiment zéro au moment le plus éloigné de la pause-sandwich. Levav et Danziger en ont conclu que les chances d'obtenir le sursis augmentaient lorsque les juges venaient de manger.
Ainsi, avec quelques connaissances en matière de statistiques, les avocats et les juges pourraient s'épargner de pénibles études de dossiers: c'est le ventre des juges qui décide, et il ne sait pas lire... Mais les choses sont tout de même plus compliquées, comme le révèle une recherche approfondie. En effet, une analyse de 19 procès a démontré que les prévenues expriment davantage leur sentiment de culpabilité: la femme a tendance à étaler sa mauvaise conscience juste après le délit. C'est ainsi qu'elle amadoue le tribunal, selon l'étude menée en Australie, à la Queensland University of Technology.
Mais une femme repentante qui tombe sur un juge rassasié n'est pas encore sortie d'affaire. Elle doit, en plus, être jolie. C'est du moins le constat dressé par les scientifiques de la Cornell University, qui ont confronté 169 étudiants en psychologie avec des dossiers comprenant les photos des inculpés. Conclusion: lorsque l'état des preuves n'est pas très clair, les prévenus ont intérêt à être séduisants. Sans cela, une peine de 22 mois de plus leur pend au nez. En tout cas, lorsque le jury est composé d'étudiants en psychologie.
Pour le reste, il n'existe à ce jour pas encore d'étude sur le rapport de causalité entre la sévérité de la décision et le signe astral du juge, la pointure de ses chaussures ou la couleur de cheveux du prévenu.
Ah au fait, les taureaux sont daltoniens.