Les deux années précédentes ont été rudes pour les étudiants souhaitant profiter d’un échange hors des frontières suisses. D’autres inquiétudes sont venues s’ajouter après la crise sanitaire, notamment le Brexit, puis la rupture des négociations entre l’UE et la Suisse1. Les enjeux centraux se cristallisent autour de l’attractivité et de la visibilité des universités suisses.
Pour l’heure, la mobilité estudiantine reste garantie à court terme. A la session d’automne 2020, le Parlement a avalisé le financement de l’option de remplacement d’Erasmus+ et une remouture de la loi garantissant le maintien de la mobilité intraeuropéenne en Suisse, pour la période 2021-2024.
plaidoyer: Les accords Swiss-European Mobility Programme (ci-après: SEMP) assurent la continuité de la mobilité des étudiants. Il existe aujourd’hui trois sortes principaux d’accords: nommément les accords SEMP (Erasmus+), les accords facultaires et les accords généraux, (NDLR, accords conclus par la Direction de l’Université). Les offres découlant des accords SEMP sont nettement majoritaires.
Cédric Rychen: Effectivement, les offres relevant des accords SEMP sont majoritaires. Cette situation est tout à fait logique, puisque les procédures sont plus simples: il y a moins de concurrence et plus de places disponibles dans les établissements. En plus, la réalisation des séjours dans le cadre des accords facultaires et généraux est plus complexe en raison du maintien d’un certain niveau de réciprocité en termes de flux (étudiants entrants/sortants). C’est particulièrement vrai avec les pays anglo-saxons où le nombre de places est régulièrement discuté. Finalement, les étudiants peuvent être soumis à des exigences plus strictes, notamment en termes de notes et de niveau linguistique.
plaidoyer: Les différences de l’offre entre les accords SEMP et les autres accords (facultaires et généraux) se traduisent sur le terrain, sans nul doute. Pourriez-vous l’illustrer avec des statistiques (hors de la période 2019-2020 très peu représentative)?
Cédric Rychen: Pour les années 2018-2019, 299 étudiants ont bénéficié de la mobilité par le biais des accords SEMP. Les autres accords ont profité à 214 étudiants. La tendance est similaire sur les années précédentes.
plaidoyer: Quant à vos relations avec le Royaume-Uni, avez-vous pu constater un changement?
Cédric Rychen: Pour l’heure, nous n’en ressentons pas les impacts, puisque nous avons un accord SEMP2 (hors Erasmus) avec le Royaume-Uni valable jusqu’à la fin de 2023. La situation se compliquera sans doute après avec la mise en place du programme britannique Alan Turing3.
plaidoyer: Avez-vous constaté des changements après l’abandon des négociations sur l’accord institutionnel?
Cédric Rychen: Pas pour le moment. Les nombreux accords bilatéraux conclus ne dépendent pas directement d’Erasmus+ et sont valables jusqu’en 2027.
Les impacts sont toutefois particulièrement dramatiques pour le secteur de la recherche. Nous n’avons pas eu à pâtir de nombreux changements à la suite de l’exclusion de la Suisse du programme Erasmus. Nous n’avons perdu que peu de partenaires. Les différences entre Erasmus et les accords SEMP proviennent du mode de financement. Le système Erasmus est financé au niveau européen, chaque pays finançant ses étudiants sortants. La situation est différente pour les accords SEMP: les bourses sont versées aux étudiants entrants et sortants4. Des suites de l’abandon des négociations sur l’accord institutionnel, une suspension ou une suppression de la libre circulation des personnes pourrait certes nuire à la mobilité estudiantine.
plaidoyer: Bien évidemment, nous ne pouvons pas éviter de vous interpeller sur les effets à court-terme de la crise sanitaire.
Cédric Rychen: De nombreux étudiants ont annulé leurs séjours en raison des incertitudes liées à la situation sanitaire. Des questions brûlantes demeurent quant à l’obtention des permis d’études et à la situation dynamique concernant les conditions d’entrée dans les Etats.
1 La participation pleine et entière au programme Erasmus+ est revenue sur le devant de la scène cet automne après le dépôt d’une motion de la Commission de politique extérieure du Conseil national (Motion 21.3975) sur le financement dudit programme. Le Conseil y a récemment répondu en rappelant le contexte tendu, après le retrait des négociations sur l’accord institutionnel, et le caractère incertain de la garantie d’association à Erasmus+.
2 Les universités peuvent avoir le statut d’«associated partner». L’Union européenne ne verse aucune participation financière dans ce cas, mais l’institution concernée peut adresser une demande d’aide financière à Movetia, l’agence nationale pour la promotion des échanges et de la mobilité.
3 Le programme Alan Turing fait suite à la sortie du Royaume-Uni d’Erasmus. Ce programme se trouve sous les feux des critiques en raison de son budget limité. Pour l’heure, les étudiants devront surtout se renseigner sur les démarches à entreprendre pour assurer leur entrée sur le territoire.
4 Loi fédérale relative à la coopération internationale en matière d’éducation, de formation professionnelle, de jeunesse et de mobilité (LCIM, RS 414.51).