Introduction
La Suisse s’est engagée tant au niveau national (art. 8 Cst.) qu’international (notamment CEDEF 1 et Convention d’Istanbul 2) à lutter contre toutes les formes de discrimination faites aux femmes, dont les violences conjugales font partie. Dans ce but, il était essentiel de s’assurer que les femmes migrantes 3 puissent bénéficier, au même titre que les femmes suisses, d’une protection contre les violences conjugales. Afin de les protéger tant des violences conjugales que du risque de perdre l’autorisation de séjour obtenue par regroupement familial, la Suisse a introduit l’art. 50 al. 1 let. b et al. 2 dans la loi sur les étrangers et l’intégration (LEI). Celui-ci permet un renouvellement de l’autorisation de séjour, malgré la rupture de la vie commune, en cas de violences conjugales. On constate 4 que cette disposition ne répond qu’imparfaitement, dans sa mise en pratique actuelle, aux attentes. Suite à une initiative parlementaire 5, une consultation visant à modifier l’art. 50 LEI, afin de corriger l’interprétation trop restrictive de la pratique, vient d’être ouverte.
Dans ce contexte, il nous a paru intéressant de nous pencher sur la jurisprudence récente du Tribunal fédéral (TF). Nous avions le sentiment que, loin de remplir son rôle de garant des droits fondamentaux – dont la non-discrimination de toutes les femmes fait incontestablement partie –, la Haute Cour avait, purement et simplement, fermé la porte à toute discussion sur le sujet, décourageant toute velléité de recours. Afin de fonder ou d’infirmer notre impression, nous avons donc compilé les arrêts du TF entre janvier 2020 et septembre 2022, entrant dans le moteur de recherche du TF les termes «violence conjugale» et «droit des étrangers».
Le présent article est le fruit de ce travail, effectué en marge de notre activité de défense individuelle.
Du meilleur…
Si l’année 2020 6 a débuté par une certaine ouverture (le dernier arrêt en français admettant le recours date de janvier 2020), le mois d’août 2020 révèle une grande activité en la matière, mais aussi le début d’une jurisprudence restrictive. Nous aimerions nous arrêter sur quelques arrêts de cette période qui nous paraissent illustrer un problème d’égalité de traitement et de prévisibilité. Durant la période de sept mois allant de janvier à août 2020, le TF a rendu huit arrêts positifs, dont sept en allemand. Nous avons choisi d’en résumer quatre.
Un arrêt du 26 février 2020 7 concernait une ressortissante du Monténégro ayant épousé un citoyen suisse, et qui faisait valoir être victime d’agressions sexuelles de la part de son beau-père – les époux vivaient au sein de la belle-famille. Lorsqu’elle s’en est plainte à son mari, ces abus ont pris fin, mais sa belle-famille a continué à l’humilier, l’insulter, la contrôler, lui interdire de sortir de la maison et l’agresser physiquement. Tout d’abord, le TF dit qu’une plainte pénale n’est pas nécessaire pour admettre des violences conjugales. Concernant le caractère systématique des violences, nié par le Tribunal cantonal (TC) lucernois, au motif que les agressions ont cessé quand l’épouse s’en est plainte à son mari, le TF rappelle que la recourante parle de plusieurs agressions de la part de son beau-père, durant une certaine période. Le TF prend en compte la déposition de la victime face à la police dans le cadre de la plainte déposée contre elle, et admet la force probante des rapports de la directrice du foyer et de la professeure de langue. Il estime que le fait que la victime ait été en contact avec plusieurs spécialistes des violences conjugales constitue un indice de l’exactitude de ses allégations. Enfin, le TF prend en compte la contre-plainte pénale déposée par le beau-père contre la recourante, classée en l’absence de tout indice d’infraction, ce qui, dans le contexte d’humiliations et de menaces répétées subies par la recourante de la part de sa belle-famille, conforte la thèse selon laquelle la recourante a dû vivre dans un climat répressif de violence domestique.
Un deuxième arrêt du 13 mars 2020 8 concerne une ressortissante kosovare ayant épousé un compatriote installé à Saint-Gall avec permis C. Dans le cadre d’un mariage arrangé et d’une structure familiale patriarcale, elle subit diverses violences, telles que l’obligation de servir le beau-père, des insultes, humiliations et menaces, deux gifles, une tentative d’étranglement et l’expulsion de l’appartement. Pour la Haute Cour, minimiser les effets d’une structure familiale patriarcale et considérer que ce système doit être accepté par l’intéressée qui s’est mariée volontairement n’est pas compatible avec la Convention d’Istanbul. Est considérée comme insoutenable la relativisation par le TC saint-gallois de la portée des rapports dans le dossier. Ce n’est pas parce que l’auteur nie les violences que les rapports mentionnant les violences ne sont pas crédibles. Là encore, le fait que la recourante ait été suivie de très près pendant plusieurs mois par des professionnelles, et qu’elle ait souffert de graves séquelles psychiques, est considéré par le TF comme une preuve suffisante.
Dans un troisième arrêt, daté du 14 avril 2020 9, une ressortissante turque, ayant laissé sa fille en Turquie 10, a épousé un compatriote, naturalisé depuis lors. Le couple n’a pas eu d’enfants, et la séparation intervient après que l’épouse avait été coincée par son mari dans une porte qu’il fermait avec force, voulant probablement l’empêcher de partir, lui causant des blessures au thorax et au bras, blessures pour lesquelles elle se rendra finalement aux urgences trois jours plus tard, avant de se réfugier à la Maison de la femme. L’épouse fait alors valoir d’autres violences commises en particulier sous l’emprise de stupéfiants: son mari a des éclats de colère durant lesquels il l’insulte, l’humilie, la maintient par les bras, la secoue, lui jette des objets, l’empêche de dormir, ne lui donne pas d’argent ni de nourriture pendant plusieurs jours. Contrairement au TC zurichois, le TF estime que l’événement de janvier 2015 ayant mené à la séparation est grave, et que les déclarations de la recourante sont corroborées par des témoignages de sa voisine, à qui la recourante s’était confiée, qui a entendu des disputes et vu des bleus. La relativisation opérée par le TC concernant les divers rapports versés au dossier est également insoutenable même s’ils sont basés uniquement sur les déclarations de la victime.
Enfin, un quatrième arrêt daté du 26 août 2020 11 concerne une ressortissante marocaine mariée à un ressortissant algérien détenteur d’un permis C, installé dans le canton de Zurich. Suite à un événement unique mais grave de violence confirmée par une expertise légale, le mari fait l’objet d’une expulsion de l’appartement par la police, et d’une interdiction de périmètre et de contact. La plainte pénale est suspendue avec l’accord de l’épouse, puis classée 12 car celle-ci ne la réactive pas. Après la séparation, elle a la garde de leur enfant commun, et reçoit un avertissement des autorités cantonales concernant l’aide sociale. Trois ans plus tard, le renouvellement de son permis est refusé pour cette raison. Le TF confirme que l’unique événement de violence est un événement grave. Après un tel événement, on ne peut pas attendre de la victime qu’elle retourne vivre avec son mari, qui présente un réel risque de récidive (mesures d’éloignement confirmées plusieurs fois). Cet élément doit donc être pris en compte, de même que la situation de l’enfant, pour pondérer la question de l’aide sociale.
Au pire…
Passons maintenant à deux arrêts beaucoup plus problématiques à nos yeux. Tout d’abord, le 26 août 2020 13, soit le même jour que le dernier arrêt positif discuté ci-dessus, le TF rejette un recours que nous avions déposé au nom d’une ressortissante russe ayant épousé un citoyen suisse dont c’était la quatrième union. Les violences ont débuté peu après le mariage avec des coups, tentative de strangulation, menace à l’aide d’une arme, insultes, contrainte. Suite à l’intervention de la police, appelée par l’époux pour faire sortir Madame de la chambre dans laquelle elle s’était enfermée, elle est hébergée dans une structure spécialisée, est reconnue victime LAVI et entame un suivi médical. Monsieur est libéré pénalement, explicitement sous l’angle du principe in dubio pro reo. La sœur de l’intéressée, alertée par l’état psychique de notre mandante, mais aussi l’imam de la mosquée que fréquentait Madame, ainsi que deux inconnus ayant assisté à des scènes de violences psychologiques dans l’espace public, ont témoigné. Si le TF reconnaît que la plainte pénale n’a pas abouti à la condamnation sur le seul principe de in dubio pro reo, il considère pourtant que l’appréciation des preuves n’a pas été arbitraire, tout en précisant qu’«on relèvera malgré tout qu’une solution contraire n’aurait à tout le moins pas été choquante, compte tenu en particulier du fait que le jugement pénal a été prononcé en application du principe in dubio pro reo».
Une affaire neuchâteloise plus récente 14 concernait une femme marocaine ayant épousé un compatriote, détenteur du permis C. Alors qu’elle partait en séjour au Maroc un an après son arrivée en Suisse, son époux lui annonce qu’elle doit y rester. À son retour, il lui interdit l’accès au logement familial et elle apprend qu’elle a perdu son emploi, son mari ayant annoncé à l’employeur son départ définitif. Alors que l’époux est pénalement reconnu coupable de contrainte en lien avec l’union conjugale, le TF estime que la condamnation «démontre certes un comportement autoritaire de celui-ci au moment de la rupture, celui-ci ayant mis en place des mesures pour que son épouse ne revienne pas résider avec lui en Suisse, mais ne permet pas de déterminer comment il s’est comporté durant l’union conjugale».
Exercice de comparaison
Dans l’arrêt négatif du 26 août 2020, le TF estime que le TAF n’a pas fait une appréciation arbitraire en posant comme centrale la non-condamnation de l’époux et le fait que les certificats médicaux et attestations spécialisées étaient basés uniquement sur les dires de la recourante. Certes, la plainte avait été classée, mais in dubio pro reo, le juge pénal ayant expressément souligné «qu’il ne s’agit pas de contester les souffrances ressenties» par la victime. Si des témoins avaient entendu les cris, avaient vu l’agressivité de l’époux et l’état de panique de Madame, aucun n’avait vu les coups, ni entendu distinctement des insultes ou des menaces. Or, il convient de préciser que dans aucun des quatre arrêts positifs exposés plus haut, une plainte pénale n’avait abouti, voire, dans deux cas, n’avait été déposée (arrêts du 14 avril 2020 et 26 août 2020). Dans l’arrêt positif du 26 février 2020, le TF a d’ailleurs explicitement précisé que le dépôt de plainte n’était pas une condition pour retenir l’existence de violence conjugale, admettant que la victime avait des raisons pertinentes pour y renoncer par crainte de représailles, et dans l’arrêt du 13 mars 2020, il ne revient même pas sur le fait que la plainte a été classée.
Quant à la prétendue absence de force probante des certificats médicaux et rapports de spécialistes, basés uniquement sur les déclarations de l’intéressée, il s’agit d’un argument avancé par les divers TC, argument cependant régulièrement et sèchement balayé par ce même TF 15! Le revirement qu’il opère à ce sujet dans l’arrêt du 26 août 2020, et ce en l’espace de quelques semaines, n’est pas compréhensible et n’a pas été motivé. En se basant essentiellement sur l’absence de condamnation pénale, en faisant un revirement concernant la force probante de certificats et de rapports, en ne retenant que certains faits, nous estimons que le TF n’a pas procédé à un examen global, comme il l’avait pourtant fait dans d’autres affaires.
Dans l’arrêt négatif neuchâtelois, – qui est la seule affaire sur les six décrites dans laquelle l’auteur a été condamné pénalement –, le fait d’apporter la preuve du comportement violent (euphémisé sous le vocable d’«autoritaire» par le TAF et le TF) de l’époux au moment de la séparation n’est pas suffisant pour rendre vraisemblable la violence subie pendant l’union quelques semaines auparavant. Or, cet arrêt peut être mis en parallèle avec celui, positif, du 13 mars 2020, dans lequel un environnement patriarcal était décrit par le TF comme entrant parfaitement dans le champ d’application de l’art. 50 LEI (obligation de servir le beau-père, insultes, humiliations, menaces, deux gifles, tentative d’étranglement et expulsion de l’appartement). On ne saisit d’ailleurs guère la différence entre les faits constitutifs de violence conjugale de cet arrêt et ceux de l’arrêt négatif du 26 août 2020, qui ne retient pas des menaces de mort avec un pistolet chargé pointé sur la victime, une tentative d’étranglement, plusieurs agressions verbales et physiques en présence de témoins, la victime poussée dans un buisson et contre une armoire, des insultes, un coup au ventre.
Là aussi, la différence entre les deux affaires se trouve dans l’appréciation du TF, qui est globale dans le cas du 13 mars 2020 et partielle dans celle du 26 août 2020. Si on prenait séparément chaque élément de l’arrêt saint-gallois, ou seulement deux d’entre eux, alors le recours de l’intéressée aurait dû être rejeté, car elle n’aurait pas pu rendre vraisemblable le fait d’avoir été victime de violence. Mais c’est bien parce que le TF pèse tous les éléments en présence, tels que la structure familiale patriarcale, les humiliations, le climat de violence, les séquelles psychiques, qu’il prend en compte les rapports médicaux et de spécialistes, qu’il attache une importance relative à la question pénale, qu’il arrive à la conclusion que la recourante a rendu suffisamment vraisemblable l’existence de violence tombant sous la définition de l’art. 50 LEI.
Cette question de la vraisemblance (qui recoupe en partie la question de la crédibilité de la victime) dans un contexte où, de manière évidente, une preuve stricte ne peut être attendue, nous rapproche d’une question juridique qui a été largement traitée en matière d’asile (art. 7 LAsi) 16. Des liens sont tout particulièrement à faire avec les demandes d’asile basées sur une persécution en rapport avec l’orientation sexuelle ou/et l’expression de genre puisque, là aussi, la persécution et les mauvais traitements ne sont que rarement publics, s’appuient sur l’isolement et la honte de la personne et ne laissent que peu de preuves matérielles 17. On y retrouve d’ailleurs les mêmes reproches de la part des autorités d’application: invocation tardive des faits, intensité insuffisante des persécutions, absence de systématique dans la persécution, focalisation sur le comportement de la victime.
Afin de permettre une protection adéquate, il est indispensable de ne pas s’appesantir sur certaines contradictions, d’avoir une appréciation globale, en tenant compte des difficultés particulières des personnes migrantes qui demandent une protection (la langue, les aspects socioculturels notamment en lien avec le rapport avec l’autorité étatique, les limites de la mémoire, les conséquences des troubles post-traumatiques, les règles propres au champ pénal, etc.). À défaut de jurisprudence en matière d’asile au niveau de la Haute Cour (art. 83 let. d LTF), il serait sans doute intéressant de s’inspirer de la jurisprudence du TAF en la matière ainsi que de celle de la CJUE ou de la CourEDH 18 et des critiques émises, en particulier la nécessité d’appliquer le principe in dubio pro refugio.
Sur la base des nombreux arrêts consultés, ce qui nous paraît distinguer le meilleur du pire, ce n’était pas l’état de fait, mais la capacité ou non à prendre en compte la situation globale, soit l’approche du dossier par les juges de Mon-Repos.
Migrantes avant d’être victimes de violences
Alors que les cas d’application de l’art. 50 LEI sont fondés sur un droit au renouvellement de l’autorisation de séjour, le taux d’acceptation, selon les arrêts que nous avons répertoriés pour des femmes, sur les années 2020 à 2022, est passé de 50% en 2020 à 14% pour 2021 et à 0% sur les neuf premiers mois de 2022.
Dans ce contexte, il semble pertinent de faire un lien avec un récent article portant l’examen de la jurisprudence du TAF concernant l’annulation des naturalisations facilitées 19. En effet, le regroupement familial est devenu, pour les ressortissant·e·s d’États tiers 20 ne pouvant se prévaloir d’être des personnes hautement qualifiées ou ne cherchant pas une protection en lien avec des motifs d’asile, pratiquement la seule porte d’entrée en Suisse. L’ouverture à la libre circulation des personnes de l’UE s’est effectivement accompagnée d’une fermeture à toute immigration non européenne. Le mariage, le regroupement familial et ensuite la naturalisation facilitée (art. 36 LN) font donc l’objet de toutes les attentions, puisque susceptibles d’être utilisées abusivement. Si les mariages binationaux sont suspects, leur dissolution l’est encore davantage. Une femme victime de violences conjugales est donc loin d’être appréhendée comme une potentielle victime, mais perçue avant tout comme une migrante susceptible de vouloir contourner les limitations propres à la politique migratoire 21.
À la lecture des arrêts du TF consultés, nous avons été convaincues que si aucune situation ne trouvait plus grâce aux yeux du TF, c’est bien qu’il y avait un biais d’analyse empêchant de reconnaître la violence conjugale chez les femmes migrantes, dès le moment où cette reconnaissance pouvait leur amener un quelconque avantage sur le plan du permis de séjour 22. Par l’intériorisation d’une politique institutionnelle du soupçon, on ne cherche plus à savoir si la personne a rendu vraisemblable la violence subie, mais à éviter à tout prix la possibilité d’un abus de droit. À pousser jusqu’au bout cette grille d’analyse, la protection prévue par l’art. 50 LEI sera sans peine vidée de toute substance 23, les violences invoquées restant en dessous de l’intensité 24 ou de la systématique 25 exigées. Pourtant, la violence conjugale existe bel et bien chez les femmes migrantes, et la violence conjugale, là aussi, tue 26. Seule une appréciation fine et globale, comme dans de nombreux arrêts positifs du début de l’année 2020, ainsi que l’application du principe in dubio pro victima, permettraient d’en limiter l’ampleur. ❙
1 Convention des Nations unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF).
2 Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul).
3 Des hommes peuvent aussi invoquer l’art. 50 LEI, et nous avons relevé plusieurs arrêts les concernant (14 hommes vs 35 femmes). Tous les recours les concernant ont été rejetés. Dans cet article, nous avons décidé de nous concentrer sur les situations dont les victimes sont des femmes cisgenres, considérant la problématique de la violence conjugale comme composante de la domination masculine. La violence conjugale qui peut exister d’une femme sur un homme ou dans un couple de personnes de même sexe faisant appel à d’autres mécanismes et ne pouvant s’appuyer sur les mêmes représentations sociales, nous l’avons écartée de la présente discussion.
4 Rapport du Groupe de travail Femmes migrantes & violences conjugales à l’attention du Grevio, les violences conjugales à l’égard des femmes étrangères ayant un statut précaire en Suisse, odae-romand.ch/wp/wp-content/uploads/2021/07/GT_rapportGREVIO_web.pdf (consulté le 4 janvier 2023). Les critiques émises viennent d’ailleurs d’être reprises dans le rapport du GREVIO concernant la Suisse, publié le 15 novembre 2022 (en particulier points 259 ss.), rm.coe.int/grevio-inf-2022-27-fre-rapport-final-suisse-publication/1680a8fc76 (consulté le 4 janvier 2023).
5 Initiative parlementaire 21.504 «Garantir la pratique pour raisons personnelles majeures visées à l’article 50 LEI en cas de violence domestique».
6 TF 2C_693/2019 du 21.1.2020.
7 TF 2C_922/2019 du 26.2.2020.
8 TF 2C_915/2019 du 13.3.2020.
9 TF 2C_776/2019 du 14.4.2020.
10 Plusieurs éléments de fait sont issus de l’arrêt cantonal consulté.
11 TF 2C_423/2020 du 26.8.2020.
12 Dans cette affaire, une expertise légale a constaté que le mari a probablement frappé son épouse avec la main, compressé son cou, l’a jetée à terre et menacée avec un couteau. On ne comprend pas comment il est possible que l’action pénale ne se soit pas poursuivie d’office. Ce type de classement devrait à notre avis attirer l’attention des pénalistes.
13 TF 2C_365/2020 du 26.8.2020.
14 TF 2C_1050/2021 du 28.4.2022.
15 TF 2C_922/2019 du 26.2.2020, TF 2C_915/2019 du 13.3.2020 et TF 2C_776/2019 du 14.4.2020.
16 Natalia Perez, La preuve et la vraisemblance au sens de l’art. 7 de la Loi sur l’asile, in: Natalia Perez et Minh Son Nguyen (dir.), Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. II p. 99 ss. et nombreuses références citées.
17 La situation des personnes LGBTIQ+ dans le domaine de l’asile, Rapport ODAE, novembre 2022.
18 Par exemple arrêt de la CourEDH dans l’affaire M.A. c. Suisse du 18 novembre 2014, requête n° 52589/13.
19 Dietrich Choffat, Marta Roca i Escoda et Hélène Martin, À certifier conforme. Les couples binationaux face à la loi helvétique, in: Revue Européenne des Migration Internationales, 2020, 36, pp. 281-304.
20 Sur l’ensemble des arrêts examinés, aucun recours n’a été déposé par une ressortissante européenne, puisque, dans l’hypothèse où elle aurait été victime de violence, il lui était bien plus aisé d’invoquer son droit propre à la libre circulation, plutôt que l’art. 50 LEI.
21 Un exemple caricatural est l’article paru le 13 septembre 2022 publié dans le Tages Anzeiger, puis sur différentes plateformes de Tamedia, intitulé «Le ‹coup de la Russe›, un véritable cauchemar pour les hommes» et qui présente la violence comme une «arme féminine en cas de divorce». L’article en question monte en épingle un cas particulier sur la seule base du témoignage du mari, pour affirmer que «certaines personnes d’origine extra-européenne invoquent des violences domestiques en cas de divorce uniquement pour éviter de se faire expulser». Voir compte rendu et réaction: asile.ch/2022/09/22/le-coup-de-la-russe-victimes-de-violences-conjugales-discreditees-dans-un-article/
22 À noter que quand la violence conjugale évoquée sert à retirer à l’auteur une autorisation de séjour, sa vraisemblance est admise très facilement. On citera deux arrêts à titre d’exemple: l’arrêt du TF 2C_162/2022 du 11.5.2022, où l’existence d’une violence conjugale a été retenue malgré une plainte pénale classée, pour considérer que l’intégration du mari tunisien n’était pas réussie et qu’il ne pouvait invoquer l’art. 50 LEI. Dans le même ordre, l’arrêt du TF 1C_776/2021 du 22.2.2022 retient l’existence d’une violence conjugale passée pour annuler une naturalisation facilitée sur les seules déclarations de l’épouse et sans qu’aucune plainte pénale n’ait été déposée.
23 L’inquiétude est d’ailleurs partagée par la Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes dans ses observations finales concernant la Suisse du 21 octobre 2022, tbinternet.ohchr.org/_layouts/15/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=CEDAW/C/CHE/CO/6&Lang=en, consulté le 4.1.2023.
24 ATF 136 II 1.
25 TF 2C_295/2012 du 5.9.2012.
26 «En 2021, 23 homicides perpétrés ont été enregistrés dans la sphère domestique (28 en 2020), ce qui représente 55% de tous les homicides perpétrés enregistrés par la police en Suisse (total: 42). Sur ces 23 homicides, 16 ont eu lieu dans le cadre d’une relation de couple actuelle ou passée, dont 15 femmes et 1 homme ont été tués.» bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/criminalite-droit-penal/police/violence-domestique.html, consulté le 4.1.2023.