Il est des domaines du droit qu’on pourrait qualifier de désertiques en matière de publication francophone. Certes, il y a bien de plus ou moins petites oasis quelque part. On s’en souvient pour y avoir trouvé, à un moment donné, la source dont on avait besoin. Mais le souvenir s’estompe à mesure que le temps passe, au point qu’il ne reste qu’une impression, presque une illusion, de croire à la possibilité d’une île au milieu de rien.
Tel était le cas du droit pénal des mineurs. L’entrée en vigueur de la Loi fédérale régissant la condition des mineurs (DPMin), en 2007, puis celle de la procédure applicable aux mineurs (PPMin), en 2011, étaient pourtant une invitation à la densification. De l’augmentation de l’étendue législative pouvait découler une augmentation du coefficient de son utilisation à des fins critiques. Il a cependant fallu attendre 2018, non pas pour assister encore à une colonisation mais bien à une exploitation rationnelle du terrain en moins d’une année. Parus de façon très rapprochée, deux commentaires en français font désormais honneur à cette matière. On pourrait craindre un mitage. Il n’en est rien.
En 2018 est paru un commentaire intitulé Droit pénal et justice des mineurs, édité par le professeur Nicolas Queloz de l’Université de Fribourg. Cet ouvrage s’ouvre d’abord par un hommage aux pionniers s’étant occupés de la justice des mineurs. L’introduction historique, criminologique et juridique replace la matière dans son développement à travers le temps, comme un rappel à l’ordre bienveillant à ceux qui ne courent qu’après la dernière jurisprudence du Tribunal fédéral, possédés par un présentisme épouvantable. L’ouvrage se mue ensuite en un outil des plus pratiques. Disposition par disposition, le DPMin et la PPMin sont alors décortiqués, de sorte que le lecteur dispose désormais d’une boussole au quotidien.
Au début de 2019 est paru le Petit commentaire DPMin chez Helbing Lichtenhahn. Il ne faut cependant pas en déduire un rapport de filiation avec le précédent ouvrage. Les deux commentaires s’inscrivent bien plutôt dans une relation fraternelle, ce qui implique traits communs et caractère distinct. Là où le premier manifeste une prise de distance avec l’action, le second en fait son axiome. Le regard des auteurs est celui du terrain. Le droit matériel est observé sous toutes ses coutures, dans la perspective de dégager ses éventuels défauts et les moyens d’y parer pour répondre aux questions qui n’attendent pas, sinon une modification législative, du moins un arrêt topique de notre Haute Cour. Aussi, on se demande avec impatience: pour quand le petit dernier en droit formel?
Droit pénal et justice des mineurs en Suisse
Nicolas Queloz (Ed.)
Zurich, Schulthess, 2018,
630 pages, 188 fr.
Petit commentaire DPMin
M. Geiger, E. Redondo, L. Tirelli
Bâle, Helbing Lichtenhahn, 2018,
668 pages, 178 fr.