1. Qu’est-ce que le bitcoin?
Le bitcoin est une monnaie cryptographique virtuelle1 créée et émise par un programme informatique (Logiciel bitcoin) dont la paternité reviendrait à un certain Satoshi Nakamoto2. Ce Logiciel bitcoin est disponible en open source depuis 2009, soit accessible à qui veut l’installer sur son ordinateur3.
Bien que n’ayant aucune valeur intrinsèque4, le bitcoin est convertible dans les devises usuelles. Son sigle est BTC (ou XBT). Comme toute monnaie, son cours varie selon l’offre et la demande5.
Trois spécificités la caractérisent. La plus notable est l’absence d’intermédiaire. Les transactions en bitcoins se font directement de particulier à particulier, sans intermédiaire, ni organe de contrôle ni banque.
Les transactions effectuées en bitcoins sont ensuite publiques, définitives et infalsifiables. Gérées par un système informatique automatique, autorégulé et collectif (la blockchain), la reconnaissance des transactions repose ainsi sur un consensus6. Les acteurs du réseau, particuliers ou les entreprises, se mettent d’accord pour dire qu’il s’est passé telle transaction et qu’elle est valable pour un certain montant, à un moment donné. Celle-ci est inscrite de manière inaltérable dans la chaîne de blocs de la blockchain7.
La troisième spécificité du bitcoin est que les transactions sont quasi instantanées et soumises à des frais minimes. Cependant, la récente popularité du bitcoin remet en cause ces avantages8.
Enfin, les transactions, bien que publiques, sont anonymes.
Ces qualités garantissent le bon fonctionnement du système.
2. Les aspects juridiques liés à l’utilisation des bitcoins
Le bitcoin étant un moyen de paiement récent, il convient de vérifier si la réglementation actuelle est suffisante pour garantir à son utilisateur une sécurité juridique.
2.1. Le bitcoin est-il une monnaie?
2.1.1 En Suisse
En Suisse, la monnaie nationale est le franc et les moyens de paiement légaux sont réglés exhaustivement par la loi. Ils comprennent les espèces métalliques, les billets de banque et les avoirs en compte de virement en francs (art. 1 et 2 LUMMP)9.
En 2014, le Conseil fédéral (CF) considérait que le bitcoin ne pouvait pas remplir le rôle de monnaie, compte tenu de sa «grande volatilité», qui l’empêche de réaliser pleinement les fonctions premières d’une monnaie, à savoir être: i) un intermédiaire dans les échanges, ii) une unité de compte et iii) une réserve de valeur10. Par ailleurs, compte tenu de la possibilité contractuelle d’accepter l’utilisation des bitcoins, et du fait que cette monnaie était, à l’époque, «un phénomène de niche»11, le Conseil fédéral a décidé de ne pas légiférer.
Le bitcoin ne peut ainsi pas être considéré comme une monnaie légale en Suisse.
2.1.2 En Europe
En Europe, en application du Traité de la Communauté européenne, le Conseil de l’UE a édicté le Règlement n° 974/1998 du 3 mai 1998 introduisant l’euro comme monnaie unique. A contrario donc, le bitcoin n’est pas une monnaie légale reconnue dans la zone Euro12.
2.1.3 Aux Etats Unis
Les Etats-Unis ont également une monnaie unique nationale, le dollar. Aussi, le bitcoin n’y est pas non plus reconnu en tant que monnaie légale. La position officielle vis-à-vis de celui-ci a toutefois varié dans le temps et selon les Etats. En 2013, un magistrat du Texas de l’US District Court a reconnu que le bitcoin était «une sorte de monnaie»13. En 2014, l’Internal Revenue Service (IRS) considérait qu’une monnaie virtuelle n’était pas une monnaie au sens légal du terme, mais pouvait être utilisée comme un moyen de paiement convertissable en dollars14. En juin 2015, l’Etat de New York est devenu le premier Etat à édicter des normes pour les entreprises ayant une activité avec les monnaies virtuelles15. Le Connecticut en a fait de même16, suivi récemment par la Californie17. Ces Etats ont défini la «monnaie virtuelle» en intégrant dans la définition ses composantes vitales, à savoir la décentralisation et le minage, et exclu de celle-ci la monnaie virtuelle pouvant être utilisée dans les jeux sur internet.
En conclusion, il existe actuellement un consensus: le bitcoin n’est pas une monnaie légale. D’ailleurs, l’acronyme du bitcoin n’est pas inclus dans le code international de la représentation des monnaies ISO 421718. Il n’en reste pas moins que, pour ses utilisateurs, le bitcoin constitue un intermédiaire dans les échanges, une unité de compte exprimant le prix des biens et des services et que la réserve de valeur est donnée par l’utilisation qui en est faite depuis neuf ans. On pourrait donc parler de «quasi-monnaie».
2.1.4 Principaux risques liés à l’utilisation du bitcoin comme moyen de paiement
Même s’il n’a pas, en Suisse, le statut de monnaie légale, les parties à un contrat sont libres de prévoir que le paiement d’une dette interviendra au moyen de bitcoins19. Toutefois, l’absence de reconnaissance légale prive le bitcoin de protection ou d’avantages dont les autres monnaies bénéficient, que ce soit le franc suisse ou les monnaies dites fiat, soit les monnaies ayant cours légal dans un autre Etat (EUR, USD, etc.)20.
D’abord, le Code des obligations (CO) prévoit que le paiement d’une dette en argent s’effectue par un moyen de paiement ayant cours légal dans la monnaie due (art. 64 CO). Ainsi, si la dette est en CHF, elle ne pourra être éteinte qu’en CHF, la même règle s’appliquant à une dette libellée en EUR ou en USD. Avec le bitcoin, cette règle ne trouve pas application. Ainsi, le créancier d’une dette exprimée en BTC n’est pas obligé d’accepter le remboursement de sa dette en BTC et, si le paiement intervient en BTC, il est juridiquement légitimé à considérer sa dette non éteinte et en réclamer le remboursement en CHF, par exemple. Ensuite, en cas de poursuite, le créancier doit au préalable convertir sa créance en francs suisses via un jugement ou une transaction21. Enfin, aucun intérêt de retard ne peut être réclamé, sauf à ce que les parties aient prévu dans leur convention i) de convertir la créance en francs suisses en cas de demeure du débiteur ou ii) un intérêt de retard conventionnel22.
2.2 Le bitcoin et son traitement par la législation
Bien qu’il ne soit pas une monnaie officielle, l’utilisation du bitcoin est appréhendée par plusieurs législations préexistantes, sur le plan fiscal et sur le plan du blanchiment d’argent notamment.
2.2.1 Taxation
2.2.1.1 En Suisse
En 2017, Franco Gennari, chef du Service titres et produits dérivés de l’Administration fédérale des contributions, a considéré que le bitcoin constituait, d’un point de vue fiscal, une monnaie étrangère. Il doit être déclaré au 31 décembre de chaque année et converti en francs suisses dans la comptabilité des entreprises ou des particuliers qui l’utilisent. Les utilisateurs suisses sont ainsi taxés sur leurs bénéfices, respectivement leurs revenus, réalisés en bitcoins en Suisse, tout comme sur leur capital, respectivement leur fortune conservée dans cette même devise23. Par ailleurs, les gains obtenus lors des transactions effectuées en bitcoins sont considérés comme des gains en capital et exonérés d’impôt; les pertes n’étant, quant à elles, pas déductibles (art. 16 al. 3 LIFD; art. 7 al. 4 let. b LHID). Cela étant, selon le volume et le genre de transactions opérées, l’AFC pourrait requalifier l’activité en une activité lucrative indépendante avec, pour conséquence, que les gains et les pertes ainsi obtenus devraient être taxés sous l’angle de l’impôt sur le revenu24.
S’agissant de la TVA, la facturation de la plupart des biens et services ne peut pas être effectuée uniquement en monnaie étrangère. La monnaie nationale doit être mentionnée, complétée avec le montant correspondant en monnaie étrangère25. Il en devrait aller ainsi de même s’agissant des factures en BTC. La TVA est, pour mémoire, versée à l’AFC par l’assujetti, soit quiconque exploitant une entreprise ayant un chiffre d’affaires annuel supérieur à 100 000 francs (art. 10 LTVA)26. Le principe est que toutes les prestations fournies sur le territoire suisse par des assujettis moyennant une contre-prestation sont soumises à la TVA (art. 18 LTVA). En revanche, ne sont pas imposables les opérations réalisées dans les domaines du marché monétaire et du marché des capitaux, soit, plus particulièrement, les opérations portant sur les moyens de paiement légaux y compris leur négociation. L’exception à l’exception en la matière concerne les pièces de collection (billets et monnaies) qui ne sont normalement pas utilisées comme moyen de paiement légal (les numismates, par exemple). Aucune position officielle n’a toutefois été publiée à ce sujet.
2.2.1.2 En Europe
La politique fiscale est de la compétence exclusive des Etats membres, sous réserve de quelques délégations limitées27. S’agissant des impôts directs, la France considère, depuis le 11 juillet 2014, que les gains provenant de la vente de bitcoins, occasionnels ou périodiques, sont soumis à l’impôt sur le revenu et les bitcoins stockés sur un support électronique sont soumis à l’impôt sur la fortune (ISF)28. Pour la TVA, domaine largement harmonisé au niveau européen, la Cour de justice européenne a rendu un arrêt, en 2015, considérant que les échanges bitcoins-euros étaient exonérés de TVA29, reconnaissant ainsi que le bitcoin n’était pas un bien mais une «devise»30.
2.2.1.3 Aux Etats-Unis
A la fin de mars 2014, l’IRS considérait i) qu’une monnaie virtuelle ayant une contrevaleur en monnaie fiat est une «propriété» au sens de l’impôt fédéral, de sorte que les principes applicables à la vente et à l’achat d’une «propriété» sont applicables mutadis mutandis au bitcoin (on pense ici au gains en capital31), ii) qu’une personne physique qui fait du «minage» est soumise aux taxes d’indépendant, si elle en tire un revenu et qu’un salaire versé en bitcoins par un employeur est sujet aux taxes ordinaires sur le revenu32.
Pour le surplus, il n’existe pas de TVA fédérale à proprement parler aux Etats-Unis, mais plutôt une taxe sur la vente (sales and use tax) dans la plupart des Etats33. Cette taxe est appliquée au consommateur final, mais pas aux intermédiaires, qui peuvent s’en décharger en présentant un certificat de revente. Chaque Etat gère les conditions de cet impôt. Cette taxe est applicable sur les biens et services qui sont personnels et tangibles. Pour le Département des impôts de New York par exemple, le bitcoin est un bien intangible de sorte que son achat n’est pas soumis à la sales tax. En revanche, si, en contrepartie des bitcoins, une partie reçoit des biens ou des services qui sont sujets à la taxe sur la vente, cette partie devra s’affranchir de cette dernière sur la base du prix du marché des bitcoins utilisés au moment de la transaction, converti en USD34.
La Suisse, les Etats-Unis et la France s’accordent ainsi à dire qu’un revenu effectué en bitcoins doit être soumis à l’impôt sur le revenu. L’UE et certains Etats des Etats-Unis estiment que la vente et l’achat de bitcoins – que ces derniers soient considérés comme des biens ou des moyens d’échange – sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée. Un doute subsiste sur cette question en Suisse, même si la législation actuelle devrait faire pencher la balance vers une interprétation similaire, en l’absence de position officielle.
2.2.2 Blanchiment d’argent
Une des critiques régulièrement portées contre le bitcoin est que le quasi-anonymat qu’il garantit à ses utilisateurs favorise les transactions illicites et le blanchiment d’argent. La fermeture par le FBI, en 2013, du site internet Silk Road35 spécialisé dans le commerce de biens illégaux et d’autres sites identiques, l’utilisation massive des bitcoins sur des réseaux informatiques parallèles dits «dark web»36, ou son utilisation lors de paiement de rançons37, n’ont fait que renforcer ce soupçon.
2.2.2.1 En Suisse
Le blanchiment d’argent est réprimé par le Code pénal38, les intermédiaires financiers devant respecter la loi sur le blanchiment d’argent (LBA) et l’ordonnance de la Finma sur le blanchiment d’argent (OBA–Finma), ainsi que la Convention de diligence (CDB 16) s’il s’agit d’une banque.
Les banques et autres intermédiaires financiers doivent mettre en place des mécanismes visant, entre autres, à vérifier de manière approfondie l’identité de leurs clients, s’assurer de la régularité de leur situation fiscale et contrôler l’origine de leurs fonds, afin de lutter activement contre le blanchiment d’argent. En sus, des catégories de clients sont devenues désormais personae non grata et certaines transactions sont refusées ou limitées, car jugées trop risquées39. A défaut de telles mesures et, en cas de soupçons, l’intermédiaire financier (voire ses employés) encourt de lourdes conséquences, sur le plan tant pénal qu’administratif40.
Quelques banques (Swissquote, Fortis) ont commencé à proposer des transactions en bitcoins, mais pas encore de comptes bancaires à proprement parler. Les bitcoins sont donc achetés, vendus, échangés et conservés sur des plateformes virtuelles qui offrent tantôt des wallets, tantôt des services d’une bourse en ligne. Selon la Finma, l’achat et la vente de bitcoins à titre professionnel, à l’instar de ces plateformes, sont soumis à la LBA. Dès lors, ces plateformes «doivent s’affilier à un organisme d’autorégulation (OAR) ou faire une demande d’autorisation auprès de la Finma en tant qu’intermédiaire financier directement soumis» (IFDS) avant de commencer leur activité commerciale»41. En outre, le devoir de diligence dans ce domaine doit être accru, «notamment en matière d’identification du client»42. A cet égard, la Finma accepte depuis juillet 2016 que la vérification d’identité soit effectuée sous certaines conditions au moyen d’une vidéo43. Depuis la modification de l’OBA-Finma, il est même possible pour les intermédiaires financiers, à certaines conditions, d’effectuer et d’accepter des paiements jusquà 5000 francs par mois, sans avoir besoin d’identifier formellement le client44. Ainsi, bien que l’obligation d’identification ne soit pas absolue en cas de transactions avec des bitcoins, elle demeure le principe.
Sur initiative du CF, l’ordonnance sur les banques a été modifiée pour assouplir l’exigence d’autorisation bancaire pour les plateformes de crowdfunding ou de change, par exemple. Ces modifications sont entrées en vigueur le 1er janvier 201845.
En revanche, l’achat et la vente de biens ou de services au moyen de bitcoins ne doit pas faire l’objet d’une autorisation spécifique46, les obligations classiques de diligence s’agissant de l’origine des fonds devant toutefois être respectées, notamment par l’avocat47.
En Suisse, il existe plusieurs plateformes en ligne de change de bitcoins. Les deux principales sont bity.com et bitcoinsuisse.ch qui proposent également du courtage et du négoce en ligne. Elles ont toutes les deux obtenu l’agrément de la Finma48. D’autres sociétés offrent la possibilité de créer des wallets, afin de conserver les bitcoins (xapo49, digitalbitbox50, etc.). Elles requièrent généralement davantage d’informations personnelles, comme l’adresse ou la date de naissance et se réservent le droit de clôturer le portemonnaie en ligne si les informations transmises sont inexactes51. Par ailleurs, des sociétés se spécialisent dans l’indentification – par corrélation statistique notamment – des utilisateurs de cryptomonnaies52. L’anonymat des utilisateurs est donc relatif.
2.2.2.2 En Europe
Le Parlement européen s’est prononcé, en mai 2015, en faveur d’un renforcement des règles visant à lutter contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Il a adopté un train de mesures (Directive 2015/849) ayant pour but principal de garantir la traçabilité totale des virements de fonds au sein, à destination et en provenance de l’UE. L’une de ces mesures est l’interdiction pour les établissements financiers et de crédit de tenir des comptes anonymes. L’identification du titulaire ou du bénéficiaire économique doit ainsi être obligatoirement effectuée avant que ses comptes ne soient utilisés53. L’UE souhaite ériger une définition unifiée de l’infraction de blanchiment de capitaux dans le cadre d’une nouvelle directive, non encore adoptée54.
L’activité des établissements financiers et de crédit est réglementée par trois directives: les directives 2013/36/UE du 26 juin 2013, 2007/64/CE du 13 novembre 2007 et 2009/110/CE du 16 septembre 2009. En résumé, ces établissements doivent obtenir un agrément étatique55 qui est délivré lorsqu’ils peuvent démontrer avoir mis en place les mesures de contrôle interne de gestion des risques en matière de blanchiment d’argent56. Autrement dit, les plateformes virtuelles qui acceptent des fonds ou proposent l’achat et la vente de bitcoins doivent obtenir cet agrément et identifier leurs utilisateurs57. Pour s’assurer que cette réglementation soit respectée, diverses institutions de surveillance ont été créées au niveau du secteur bancaire, des assurances et des marchés financiers58.
2.2.2.3 Aux Etats-Unis
De nombreuses lois luttent contre le blanchiment d’argent, soit notamment, dans l’ordre chronologique: Bank Secrecy Act de 1970, Money Laundering Control Act de 1986, Money Laundering Suppression Act de 1994, Money Laundering and Financial Crimes Strategie Act de 1998, International Money Laundering Abatement and Financial Anti-Terrorism Act de 2001. Le blanchiment d’argent est considéré comme un crime fédéral. Pour aider les institutions financières à respecter les différentes obligations découlant de ces nombreuses législations, un manuel intitulé «Bank Secrecy Act, Anti-Money Laundering and Office of Foreign Assets Control» les reprend, exemples à l’appui.
L’établissement proposant des services financiers au moyen de bitcoins doit être autorisé à le faire conformément au Titre 18 de l’United State Code59. Les établissements bancaires qui exercent leurs activités avec des monnaies fiat doivent être enregistrés auprès du Department of the Treasury, institution de surveillance sur le plan fédéral60. Pour les monnaies virtuelles, la National Conference of Commissioners on Uniform State Laws a préparé, en octobre 2017, un projet de loi61. Il ancre, pour les entreprises ayant une activité avec ces monnaies, l’obligation de s’enregistrer, l’obligation d’obtenir une licence et institue diverses protections pour les consommateurs. En attendant que la loi soit promulguée, certains Etats, comme New York, le Connecticut et la Californie ont déjà légiféré en la matière62.
La Suisse, l’UE et les Etats-Unis s’accordent ainsi à dire que, en principe, tout intermédiaire financier doit être agréé et suivre les règles applicables en matière de lutte contre le blanchiment d’argent, et ce indépendamment de la devise utilisée, avec le caveat que, aux Etats-Unis, aucune loi fédérale en matière d’agrément n’est encore en vigueur pour les monnaies virtuelles.
3. Conclusions
Comme on l’a vu, que le consommateur se rassure, même si le bitcoin n’est pas encore considéré comme une monnaie au sens juridique du terme, il existe en Suisse, en Europe et aux Etats-Unis, diverses législations entourant son utilisation, notamment en matière de blanchiment d’argent et d’agrément nécessaire pour les intermédiaires financiers, y compris les plateformes de change. Ces derniers sont surveillés par l’Etat, ce qui garantit une certaine sécurité juridique. Ainsi, le bitcoin en lui-même ne présente pas de défis légaux majeurs et inconnus qui ne soient pas déjà couverts par les réglementations existantes. L’utilisateur suisse doit toutefois être attentif à trois éléments, soit au fait que son créancier pourrait légalement considérer que sa dette libellée en bitcoins n’est pas éteinte même si celle-ci a été remboursée par ce biais. Ensuite, avant de poursuivre un débiteur pour une dette en bitcoins, le créancier devrait, préalablement, faire convertir dans un jugement ou une transaction la dette en francs suisses sans pouvoir toutefois réclamer des intérêts de retard, sauf à avoir pris les devants conventionnellement. Ce qui ne va pas sans poser quelques difficultés pratiques, eu égard à l’extrême volatilité du bitcoin. Enfin, il ne faut pas oublier que l’anonymat lié à l’utilisation du bitcoin n’est que partiel et que des voix s’élèvent pour réclamer la divulgation de l’identité des utilisateurs 63… y
1Rapport du GAFI, Virtual Currencies Key definition and potential AML/CFT Risk, juin 2014, p. 3; Rapport du CF sur les monnaies virtuelles, 25.6.2014, p. 8.
2Satoshi Nakamoto, Bitcoin: A Peer-to-Peer Electronic Cash System, p. 4.
3https://fr.wikipedia.org/wiki/Bitcoin; www.clubic.com: pour créer des bitcoins, il faut installer deux logiciels, l’un qui permet de se connecter au réseau, d’interagir avec les autres utilisateurs de bitcoins et d’installer la technologie «blockchain», l’autre pour générer des bitcoins. Pour simplifier, les termes «Logiciel bitcoin» comprennent l’ensemble de logiciels et autres matériaux informatiques permettant la création des bitcoins.
4Le bitcoin n’a aucune contre-valeur en or, contrairement au franc suisse.
5http://www.bitcoincours.com/: propose un convertisseur de bitcoins en EUR et USD notamment; http://coinmarketcap.com/: présente la liste des cryptomonnaies les plus courantes et leur contre-valeur en dollars.
6D. Geiben/O. Jean-Marie/T. Verbiest/J.-F. Villotte, Bitcoin et Blockchain, Vers un nouveau paradigme de la confiance numérique?, 2016, pp. 26-27.
7Serge Roukine, Comprendre et utiliser le Bitcoin, Paris, p. 86.
8Arnaud Masset, Le bitcoin est-il bientôt prêt à concurrencer Paypal et Visa?, Le Temps du 18.12.2017.
9Loi fédérale sur l’unité monétaire et les moyens de paiements (LUMMP).
10Rapport du CF sur les monnaies virtuelles, 25.6.2014, p. 5.
11Idem supra, p. 10.
12Dans son rapport annuel de 2015, la Banque centrale européenne arrive à la même conclusion (European Central Bank, Eurosystem, Virtual currency schemes – a further analysis, February 2015, p. 4).
13Nick Renaud-Komiya, Bitcoin is a currency, rules US judge, article du 16.8.2013, http://www.independent.co.uk
14Notice 2014-21 de l’IRS.
15Regulation 23 NYCRR Part 200 Virtual Currencies du 24.6.2015.
16Substitute House Bill No. 6800, Public Act No. 15-53, An Act concerning (…) virtual currencies du 19.6.2015.
17The Virtual Currency Act du 30.3.2017.
18ISO 4217: 2015 – Current currency and funds code list au 1.1.2018.
19Le bitcoin peut être utilisé pour régler son café à Genève, payer son traitement de médecine chinoise à Nyon, régler des démarches administratives à Zoug ou acheter son forfait de ski à Saint-Moritz (https://coinmap.org; Stéphane Loignon, En Suisse, le paradis de l’argent crypté, Le Parisien magazine du 14.12.2016; Gabriel Sasson, Le paiement en bitcoin gagne les Alpes suisses, Le Temps du 29.12.2017).
20Et, de manière générale, aux autres monnaies virtuelles.
21Sébastien Gobat, Les monnaies virtuelles à l’épreuve de la LP, Questions choisies à l’exemple du bitcoin, in: PJA 2016, pp. 1095-1105; le TF a considéré que tel devait être le cas d’une dette en chèques WIR, s’agissant d’un moyen de paiement non reconnu par la loi, ne pouvant pas faire l’objet d’une poursuite, faute d’avoir un cours légal (ATF 94 III 74, c. 3).
22L’art. 104 CO prévoit en effet que seule une somme d’argent peut porter intérêt; Vincent Mignon, Le bitcoin, un nouveau défi pour le juriste suisse?, in: Jusletter du 4.5.2015.
23Art. 1 al. 1 let. a et b de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct (LIFD); art. 16 LIFD; art. 57 LIFD; art. 31, al. 4 de la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID); art. 66, al. 1 LHID.
24Art. 18 al. 2 LIFD; Circulaire de l’AFC n° 36 – Commerce professionnel de titres du 27.6.2012.
25Art. 3 et 10 de l’ordonnance sur les prix (OIP); Notice n° 21, TVA et monnaies étrangères émise par l’AFC en vigueur au 1.1.2018.
26Loi fédérale régissant la taxe sur la valeur ajoutée (LTVA).
27Art. 110-113 du Traité sur le fonctionnement de l’UE (version consolidée 2012/C 326/01); Dario Paternoster, Politique Fiscale, in: Fiches techniques sur l’Union européenne, mars 2017.
28BNC - BIC - ENR - PAT - Régime fiscal applicable aux bitcoins, Bulletin officiel des finances publiques du 11.7.2014.
29Jugement de la 5e Chambre de la CJUE du 22.10.2015, C 264/14, interprétant l’art. 135 § 1 de la Directive européenne 2006/112.
30Le bitcoin était accepté, en l’espèce, contractuellement comme moyen de paiement.
31Le bitcoin serait ainsi considéré comme un actif (à l’instar des obligations ou des actions) et ne serait pas rangé avec les devises étrangères.
32IRS Virtual Currency Guidance: Virtual Currency Is Treated as Property for U.S. Federal Tax Purposes; General Rules for Property Transactions Apply, IRS News, IR-2014-36 du 25.20.2014 et Notice 2014-21 de l’IRS.
33https://en.wikipedia.org/wiki/Sales_taxes_in_the_United_States.
34Memorandum TSB-M-14(5)C, (7)I, (17)S of Tax Department Policy on Transactions Using Convertible Virtual Currency of New York du 5.12.2014; Ernst and Young, Worldwide-VAT-GST-and-sales-tax-guide-2017, p. 1086.
35Rapport du CF sur les monnaies virtuelles, 25.6.2014, p. 20.
36https://www.torproject.org/.
37Jean-Paul Pinte, Demandes de rançons en bitcoins: la menace qui fait trembler les autorités, et va les obliger à se mettre à la page, article du 21.2.2016 (http://www.atlantico.fr).
38Art. 305bis et 305ter CP, voir également les art. 70 à 72 CP pour la réception de fonds d’origine criminelle.
39Chantal Mathez de Senger, Banques: le rapport de force a changé, article du 23.9.2013 de Bilan.
40Carlo Lombardini, Banques et blanchiment d’argent, 2016, p. 2.
41Fiche d’information Finma du 25.6.2014 sur les bitcoins.
42Ibidem.
43Circulaire Finma 2016/7 – Identification par vidéo et en ligne.
44Art. 11 OBA-Finma.
45Commentaires sur la modification de l’ordonnance sur les banques (FinTech) du Département fédéral des finances du 5.7.2017.
46Fiche d’information Finma du 25.6.2014 sur les bitcoins.
47Article 305bis ou 305bis ch. 1 bis CP (pour autant que 300 000 fr. d’impôts aient été soustraits en Suisse ou à l’étranger); Benoît Chappuis et Daniel Tunik, Honoraires d’avocat et blanchiment d’argent in: Revue de l’Avocat 3/2009, pp. 115-118; Sébastien Fanti, Clic informatique: La rémunération de l’avocat en bitcoins – Perspectives légales et déontologiques (I) in: Revue de l’Avocat 2/2014, p. 85: Jay Cohen, avocat au Texas, conclut un contrat avec ses clients dans lequel ils s’engagent à ne pas remettre à celui-ci des fonds de source illicite.
48Kevin Helms, How Bitcoin Companies can legally operate in Switzerland, article du 1.2.2017, https://news.bitcoin.com
49https://xapo.com/wallet/.
50https://digitalbitbox.com/.
51https://xapo.com//privacy/.
52https://www.elliptic.co/; https://ciphertrace.com/.
53Art. 10 de la Directive 2015/849.
54Proposal for a Directive of the European Parliament and of the Council on countering money laundering by criminal law du 21.12.2016.
55Art. 8 de la Directive 2013/36/UE.
56Art. 5 de la Directive 2007/64/CE; Directive (UE) 2015/849.
57Art. 13 de la Directive 2015/849.
58Règlement UE n° 1093/2010; https://www.eba.europa.eu/languages/home_fr.
59Section 1960 – Prohibition of unlicensed money transmitting businesses of the United States Code, 2006 Edition, Supplement 4, Title 18 – Crimes and criminal procedure: risque d’emprisonnement jusqu’à cinq ans en cas d’activité sans autorisation.
60https://www.treasury.gov/about/role-of-treasury/Pages/default.aspx.
61Uniform Regulation of Virtual Currency Business Act du 9.10.2017.
62Section 200.15, Title 23 of the New York Codes, Rules and Regulations; Form for Connecticut Money Transmission License et Division 11 du Financial Code of California.
63Olivia Detroyat, Bitcoin, vers la fin de l’anonymat des transactions?, Le Figaro du 3.1.2018.