Tribunal fédéral
Pas de responsabilité du canton
Dans le canton de Lucerne, un homme a tiré à plusieurs reprises à bout portant sur son ex-amie, qui venait de rompre définitivement avec lui par courriel. Un mois plus tôt, un policier avait conseillé à la victime de le quitter, sans l’informer que l’homme avait déjà été condamné dix ans plus tôt pour meurtre et pour viol. Selon le TF, il n’existe pas de lien de causalité naturelle ou adéquate entre le conseil du policier et l’agression, et aucune responsabilité ne peut être mise à charge de l’Etat.
(2C_816/2017 du 8.6.2018)
Un objet dur dans le gratin
En mangeant un gratin de pommes de terre, un homme s’est fendu une molaire en mordant un objet dur. C’est à raison que son assurance accidents a refusé de couvrir le cas, au motif que l’existence d’une cause extérieure extraordinaire, nécessaire pour pouvoir retenir l’accident, n’est en l’espèce pas établie avec un degré de vraisemblance prépondérante, l’assuré ayant avalé l’objet sans l’identifier. Ce dernier doit supporter les conséquences de l’absence de preuve.
(8C_251/2018 du 20.6.2018)
Radié du registre des avocats
Un avocat neuchâtelois a été condamné par le Tribunal cantonal à 50 jours-amende avec sursis ainsi qu’à une amende de 800 fr. pour menaces, contrainte et dommage à la propriété. Dans le cadre d’un conflit de voisinage, il aurait notamment déclaré au ferblantier engagé par la propriétaire de l’immeuble voisin de la société qu’il administre: «Mon père est un gars du Sud. Il a le sang chaud et si ça doit finir au coup de fusil, cela finira au coup de fusil.» Le Tribunal cantonal, en considérant que le comportement que l’homme a adopté est incompatible avec la profession d’avocat, n’a pas excédé son pouvoir d’appréciation. La radiation du registre cantonal des avocats ne constitue quant à elle pas une deuxième sanction qui viendrait s’ajouter à la première, mais simplement une conséquence directe de celle-ci.
(2C_226/2018 du 9.7.2018)
Pas d’enquête pour délit contre l’honneur
Dans le cadre d’une procédure civile, un avocat a déposé une plainte pénale pour injure contre l’avocat de la partie adverse et sa cliente, pour avoir insinué dans un mémoire qu’il souffrait d’«hallucinations». Le Ministère public n’a pas ouvert d’enquête, à raison selon le tribunal cantonal zurichois. Dans le même sens, le TF décide de ne pas entrer en matière sur sa demande qu’une enquête soit ouverte, à défaut de légitimation active. L’avocat n’a en effet pas à craindre d’atteinte à sa réputation, la remarque n’ayant pas été proférée lors d’un procès en public. Le simple fait qu’il ait été partie à la procédure ne suffit pas à lui conférer la qualité pour former un recours en matière pénale au TF.
(6B_579/2018 du 5.7.2018)
Un avocat quérulent
Dans le cadre d’une procédure de divorce, un avocat a interjeté auprès de la Cour suprême du canton de Berne, puis auprès du TF, plusieurs recours pour le compte de son mandant en arguant de prétendues erreurs institutionnelles concernant la composition du tribunal régional. Simultanément, pour la procédure devant le TF, il a formulé la demande que la composition de la formation de l’autorité appelée à statuer, établie par la Cour de droit pénal, soit rejetée, en vertu du droit, déduit de l’art. 6 CEDH, à un tribunal établi par la loi. Dans leur arrêt, les juges fédéraux soulignent que l’avocat a déjà formulé des demandes identiques à de nombreuses reprises par le passé. Par ce comportement, il abuse de ses mandants pour satisfaire ses buts personnels, en lien avec la campagne privée qu’il mène au sujet des questions de composition des tribunaux. Soulignant le caractère purement procédurier de la démarche, le TF rejette le recours et met les frais de 2000 fr. à la charge de l’avocat.
(5D_56/2018 du 18.7.2018)
Demande de révision admise
Le TF admet une demande de révision d’un arrêt, contraire à sa jurisprudence constante, dans lequel il avait condamné un homme à verser 6000 fr. de dépens à la partie adverse, bien que cette dernière n’ait pas eu à déposer de mémoire de recours et n’ait dès lors pas encouru de frais. Admettant n’avoir pas pris en considération, par inadvertance, des faits pertinents qui ressortent du dossier (art. 121 let. d LTF), le TF supprime les dépens alloués, et condamne la partie adverse à supporter les frais de 1000 fr. de la procédure de révision et à verser 1500 fr. de dépens au demandeur.
(4F_18/2018 du 9.8.2018)
Restitution du délai
Selon l’art. 94 al. 1 CPP, une partie peut demander la restitution d’un délai si elle a été empêchée de l’observer et qu’elle est de ce fait exposée à un préjudice important et irréparable. Elle doit toutefois rendre vraisemblable que le défaut n’est imputable à aucune faute de sa part. Si l’erreur d’un avocat ne permet en principe pas d’obtenir la restitution d’un délai, l’exception confirme la règle en l’espèce: l’avocat grison avait mal calculé le délai de recours et avait affirmé à son client, à tort, qu’il était échu. Le mandant n’était pas en mesure de se rendre compte de l’erreur de son avocat. Comme il s’agissait en l’espèce de faits constitutifs d’une violation grave des règles de la circulation routière et de contrainte, susceptibles d’être inscrits au casier judiciaire, le TF a considéré que les conditions permettant la restitution du délai étaient remplies.
(6B_1111/2017 du 7.8.2018)
Des grands-parents peuvent voir leur petit-fils
Selon l’art. 274a al. 1 CC, le droit d’entretenir des relations personnelles peut aussi, dans des circonstances exceptionnelles, être accordé à d’autres personnes que les parents, à condition que ce soit dans l’intérêt de l’enfant. En l’espèce, c’est à raison que l’instance précédente a accordé à des grands-parents paternels dont le fils est décédé un droit de visite de deux heures, un mois sur deux, contre l’avis de la mère de l’enfant. Les tensions entre la mère et ses beaux-parents ne sont pas d’une intensité suffisante pour créer un conflit de loyauté chez l’enfant.
(5A_380/2018 du 16.8.2018)
Tribunal administratif fédéral
Renvoi en Erythrée licite et exigible
Selon le Tribunal administratif fédéral, les requérants d’asile érythréens déboutés peuvent aussi être renvoyés en Erythrée même s’ils risquent de se voir appelés au service national après leur retour. Les conditions y prévalant sont certes problématiques, mais pas au point de rendre illicite l’exécution du renvoi. Le TAF nie également le fait que, en cas de retour volontaire en Erythrée, il existe de manière générale un risque sérieux d’emprisonnement et, par là même, de traitement inhumain. L’arrêt est définitif.
(E-5022/2017 du 10.7.2018)
Regroupement familial: changement de pratique
Le Tribunal administratif fédéral assouplit sa jurisprudence, en considérant que le droit au regroupement familial déduit de l’art. 8 CEDH ne s’éteint pas lorsque l’enfant qui pouvait s’en prévaloir devient majeur en cours de procédure. A l’appui de son raisonnement, il prend en considération de récents arrêts de la CrEDH, ainsi que des principes constitutionnels, tels que la sécurité et la prévisibilité du droit, l’interdiction de l’arbitraire, l’égalité de traitement et la célérité. L’arrêt est susceptible de recours au TF.
(F-3045/2016 du 25..7.2018)