Tribunal administratif fédéral
La honte annihile la concurrence
La loi sur les cartels ne s’applique pas à la fixation des prix des médicaments contre les troubles de l’érection, Viagra, Cialis et Levitra, (non remboursés par l’assurance de base), qui est déjà soumise à l’interdiction de publicité prévue par la législation sur les médicaments et subit par ailleurs l’influence du «facteur honte», à savoir le besoin de discrétion de l’acheteur, qui ne va pas facilement procéder à des comparaisons de prix. Le Tribunal administratif fédéral a par conséquent annulé des sanctions pour un total de 5,7 millions de fr. infligées par la Comco aux entreprises Bayer, Pfizer et Eli Lilly pour avoir passé un accord illicite en fixant des prix publics recommandés.
(entre autres B-364/2010 du 3.12.2013)
Changement de procédure exigé
L’organe de décision pour la planification de la médecine hautement spécialisée (MHS/HSM) doit modifier sa procédure. Concernant le traitement des enfants grièvement brûlés il avait, en 2011, décidé en une seule fois quels traitements doivent être absolument attribués à la médecine hautement spécialisée et à quels centres les mandats de prestations correspondants doivent être accordés. Mais selon le TAF, ces questions devront à l’avenir être réglées en deux temps. La procédure unique a pour conséquence que, concernant la question de l’attribution, les hôpitaux concernés ne peuvent se prononcer que sur la définition des traitements, ce qui viole le droit d’être entendu. Ainsi, la décision d’attribuer le traitement des enfants gravement brûlés au Kinderspital de Zurich et au Centre universitaire romand des brûlés (rattaché au CHUV) doit être annulée.
(C-6539/2011 du 26.11.2013)
Tribunal fédéral
Accident de noyau de cerise
Se casser une dent en mordant dans un noyau de cerise resté dans une confiture maison est, sur le plan juridique, un accident. Le dommage ainsi subi par une Vaudoise doit être pris en charge par son assureur-accidents. Ce dernier n’a pas réussi à imposer son point de vue, selon lequel il faut s’attendre à trouver des débris de noyau dans une confiture maison, après un dénoyautage à la main ou à la machine. Selon le TF, on est au contraire en présence, dans ce cas, d’une «cause extérieure extraordinaire» entrant dans la notion d’accident au sens de l’art. 4 LPGA. Et peu importe que les cerises aient été dénoyautées industriellement ou manuellement. Rien ne permet de penser que la première méthode est plus fiable que la seconde.
(9C_553/2013 du 17.10.2013)
Pas de marge de tolérance pour l’alcootest
Plus aucune marge de tolérance n’est accordée en cas d’alcootest. Depuis 2005, le taux maximal d’alcool dans le sang pour les automobilistes est fixé à 0,5 pour mille. Entre 0,5 et 0,8 pour mille, un alcootest suffit à établir l’état d’ébriété, sans passer par une prise de sang. Une ancienne jurisprudence permettait néanmoins de soustraire une valeur de 20%, correspondant à la marge d’erreur de la mesure. Mais celle-ci n’est plus en accord avec la réglementation actuelle, a jugé le TF. Le législateur a créé un contrôle simplifié entre 0,5 et 0,8 pour mille, afin d’établir le degré d’alcoolémie sans faire d’analyses très poussées. Cela ne profite finalement pas forcément à la personne contrôlée, qui a la possibilité d’exiger un test sanguin. Mais si elle reconnaît les résultats de deux alcootests par sa signature, c’est le plus bas des deux taux mesurés qui fait foi.
(6B_186/2013 du 26.9.2013)
Responsable d’une chute dans le bus
Le conducteur d’une voiture de livraison a été rendu pénalement responsable de la chute d’une passagère survenue dans un véhicule de ligne. Ce conducteur avait brièvement stoppé à une place d’arrêt et avait ensuite roulé sur la ligne de bus. Lors du freinage du bus, une passagère était tombée et s’était blessée. La justice zurichoise a condamné le conducteur de la voiture de livraison pour lésions corporelles par négligence. Le TF a confirmé la sanction. L’auteur de l’infraction a vainement tenté de convaincre les juges que le risque d’une telle chute doit être supporté par le passager du bus qui ne se tient pas fermement. Le TF rappelle qu’il faut des circonstances vraiment extraordinaires pour que la part de responsabilité de la victime relègue au second plan le comportement de l’accusé.
(6B_286/2013 du 14.10.2013)
Autorité parentale: les limites d’une convention
Des parents non mariés détenant l’autorité parentale conjointe ne peuvent pas régler à l’avance de manière contraignante l’entretien et la garde de leur enfant en prévision d’une éventuelle séparation future. Dans le cas concret, le couple a cessé la vie commune, entrant en conflit au sujet de la garde de leur fille. Les autorités de protection de l’enfant du nouveau domicile de la mère ont fixé de nouvelles règles. Devant le TF, le père a fait valoir l’accord passé avec son ex-amie, qui avait été ratifié par l’autorité tutélaire et l’emporterait, selon lui, sur les nouvelles règles. Mais le TF observe, au contraire, que les autorités compétentes doivent prendre en compte les changements de situation intervenus, afin de trouver une solution conforme au bien de l’enfant. Dans le cas d’espèce, il était apparu que l’accord initial ne correspondait plus au bien de l’enfant, au regard du conflit parental.
(5A_198/2013 du 14.11.2013)
Réparation du tort moral pour l’«ex» de Hirschmann
Un tribunal peut renoncer à rendre un jugement en interdiction de l’atteinte en matière de protection de la personnalité (en l’occurrence celle de l’ex-amie du jet-setteur Carl Hirschmann), si cette interdiction n’apparaît plus nécessaire en raison de l’écoulement du temps. Le Tribunal cantonal zurichois a cependant conclu de manière injustifiée que la personne concernée avait obtenu suffisamment réparation à la suite de la publication d’articles sur l’affaire dans les médias et que la publication des excuses du jet-setteur était par conséquent superflue. L’ex-amie est en droit d’obtenir que les tiers apprennent l’atteinte commise et les excuses de Hirschmann en bonne et due forme. Il appartient à la justice zurichoise de fixer les modalités de la publication.
(5A_309/2013 du 4.11.2013)
Spot refusé injustement par la TV
La Télévision suisse alémanique a refusé de manière injustifiée la diffusion d’un spot publicitaire de l’Association contre les usines d’animaux, Acusa, dans lequel la TV était elle-même critiquée. La publicité comprenait ces mots: «(…) ce que la télévision suisse passe sous silence (...)». La TV a invoqué l’atteinte à la réputation, ce qui a été considéré comme légitime par l’Autorité indépendante d’examen des plaintes en matière de radio-télévision (AIEP). Le TF constate en revanche que dans le domaine publicitaire, la SSR est liée par les droits fondamentaux et se doit d’adopter une position neutre et objective. Dans ces conditions, elle doit aussi tolérer une certaine critique vis-à-vis d’elle-même. Le spot de Vgt relève du domaine de protection de la liberté d’expression; il n’y avait pas de base légale pour sa limitation. L’annonce n’était pas non plus illicite. La seule crainte de la SSR qu’il puisse toucher à sa réputation ne justifie le refus de diffusion.
(2C_1032/2012 du 16.11.2013)