La marge d’appréciation des tribunaux
Difficile, pour le défenseur d’office, de prévoir le montant de son indemnité. Une incertitude accentuée par le manque d’homogénéité des pratiques entre les cantons, les domaines juridiques voire entre les juges au sein d’une même autorité.
Il est certes indubitable que nos instances se réfèrent systématiquement aux règles qui forment le cadre de la détermination de l’indemnité du défenseur d’office. Ainsi:
- Le nombre d’heures nécessaires pour assurer la défense d’office du prévenu est décisif pour fixer la rémunération de l’avocat, (arrêt du TF 2C_509/2007 du 19 novembre 2007, c. 4);
- Pour fixer la rémunération du défenseur, l’autorité doit tenir en compte de la nature et l’importance de la cause, les difficultés particulières en fait et en droit, le temps consacré, la qualité du travail, le nombre de conférences, d’audiences et d’instances, le résultat obtenu ou la responsabilité assumée (arrêt du TF 6B_810/2010 du 25 mai 2011, c. 2).
Cette évaluation n’en demeure pas moins délicate pour des juges qui n’exercent plus le métier d’avocat.
Il est moins certain que les principes suivants soient considérés à leur juste valeur:
- Les autorités devraient évaluer avec retenue la nécessité des démarches entreprises puisqu’il appartient d’abord au défenseur d’examiner l’utilité des opérations pour son client (arrêt du TPF BB.2015.93 du 3 novembre 2015, c. 4.1.2). Ainsi, la marge d’appréciation de l’avocat ne devrait être remise en cause qu’en cas de disproportion évidente entre la rémunération et le service rendu;
- Les avocats d’office assument une tâche publique. Une rémunération équitable doit par conséquent leur être assurée (ATF 141 IV 124, c. 3.2).
D’abord, les tribunaux ne semblent pas faire preuve de la retenue exigée dans le cadre de la réévaluation de l’utilité des opérations réalisées par l’avocat. Ensuite, une rémunération équitable ne saurait être assurée après une réduction des indemnités du défenseur d’office de près de 50%.
Quant à la contestation devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral et le Tribunal fédéral, l’incertitude est de mise vu la jurisprudence fluctuante de nos hautes instances. Notre Haute Cour fait par ailleurs preuve d’une certaine retenue, l’autorité qui fixe l’indemnité dans le cadre de la procédure étant plus qualifiée pour apprécier la hauteur de la rémunération de l’avocat d’office (ATF 141 I 124, c. 3.2).
Le délicat travail du défenseur d’office
Les avocat·e·s assumant des mandats relevant de l’assistance judiciaire sont soumis à une certaine pression. Tel que notre Haute Cour le rappelle, le défenseur d’office doit être expéditif et efficace (ATF 117 Ia 22, c. 4b). Or, le terme expéditif renvoie à une action peu soignée incompatible avec l’exercice diligent de la profession d’avocat.
Face à ces décisions sévères, les défenseurs pourraient être amenés à ne plus assister des personnes démunies ou à fournir un service minimaliste. Au risque de voir l’inégalité devant la justice s’accroître.