1. Interprétation des accords passés entre époux: l’utilisation de l’art. 18 CO et le principe de la confiance
1.1. Les conventions sur les effets accessoires du divorce
TF 5A _760/2012 du 27 février 2013 – «Pour déterminer ce que les époux ont pris en considération lors de la fixation de la contribution d’entretien, il faut interpréter la convention selon les principes applicables aux contrats. Le juge doit ainsi recourir en premier lieu à l’interprétation subjective, c’est-à-dire rechercher la réelle et commune intention des parties (art. 18 al. 1 CO). Ce n’est que si le juge ne parvient pas à déterminer la volonté réelle des parties ou s’il constate qu’une partie n’a pas compris la volonté exprimée par l’autre à l’époque de la conclusion du contrat qu’il doit recourir à l’interprétation objective, en déterminant le sens que, d’après les règles de la bonne foi, chacune d’elles pouvait et devait raisonnablement prêter aux déclarations de volonté de l’autre (application du principe de la confiance).» (c. 5.3.1).
TF 5A_672/2012 du 3 avril 2013 – «Une convention entre époux doit s’interpréter selon les règles applicables aux contrats. Si la concordance des volontés effectives des parties n’est pas prouvée, leurs déclarations de volonté s’interprètent selon le principe de la confiance (c.10.1). En l’absence d’accord contraire, des codébiteurs solidaires sont présumés assumer une part égale de la dette (art. 148 CO), de sorte que celui qui prétend autre chose doit le prouver.» (c. 8.3.2).
1.2. La convention de vie
TF 5A_173/2013 du 4 juillet 2013 – Convention conclue entre époux au sujet de la répartition des tâches et des ressources. «Pour fixer la contribution d’entretien due entre époux, le juge des mesures provisionnelles doit se baser sur la convention, expresse ou tacite, que les époux ont conclue au sujet de la répartition des tâches et des ressources entre eux (art. 163 al. 2 CC). L’art. 163 CC est en effet la cause de l’obligation d’entretien réciproque des époux (ATF 130 III 537 c. 3.2). Le juge ne doit donc pas trancher, même sous l’angle de la vraisemblance, les questions de fond, objet du procès en divorce, en particulier celle de savoir si le mariage a influencé concrètement la situation financière du conjoint (ATF 137 III 385 c. 3, précisant l’ATF 128 III 65).» (c. 4.2).
2. Les liens et leurs effets
2.1. Le lien affectif au logement, comme critère d’attribution primant les droits réels ou contractuels sur celui-ci, à prouver par celui qui l’éprouve
TF 5A_930/2012 du 16 mai 2013 – «Lors de l’attribution provisoire du logement familial, le juge des mesures protectrices de l’union conjugale doit examiner en premier lieu à quel époux le domicile conjugal est le plus utile, au vu de ses besoins concrets. Si ce premier critère de l’utilité ne donne pas de résultat clair, le juge doit, en second lieu, examiner à quel époux on peut le plus raisonnablement imposer de déménager, compte tenu de toutes les circonstances. Si ce second critère ne donne pas non plus de résultat clair, le juge doit alors tenir compte des droits réels ou contractuels sur le logement.» (c. 3.3.3).
TF 5A_132/2013 et 5A_133/2013 du 24 mai 2013 – Attribution du logement familial. «Le recourant n’est pas parvenu à démontrer l’arbitraire de la décision de l’autorité cantonale qui a accordé à l’épouse le logement familial, en raison du fait qu’elle s’était particulièrement impliquée dans les démarches liées à l’achat du terrain et à la construction de cet immeuble (lien affectif), qu’elle avait davantage de liens avec le Valais que son mari qui n’a aucune famille en Suisse et qu’elle souffrait encore des séquelles liées au cancer dont elle a été atteinte il y a plusieurs années, en sorte que l’on ne pouvait raisonnablement exiger d’elle qu’elle emménage avec sa mère de 81 ans, à supposer que le logement soit suffisamment grand pour l’accueillir, même à titre provisoire.» (c. 3.2 et 4.2.2).
TF 5A_248/2013 du 25 juillet 2013 – Critère du lien affectif au logement conjugal. «L’attribution du logement conjugal en mesures protectrices requiert une pesée des intérêts de chaque époux. Lorsque les enfants du couple sont majeurs et ont quitté le logement, il convient d’examiner les autres circonstances. Il n’est pas arbitraire de qualifier de faible l’attachement affectif de l’épouse au logement, bien qu’elle se soit investie durant les travaux de construction et ait noué de bons rapports de voisinage. Comme les époux occupaient ce logement depuis environ trois ans, l’attachement de l’épouse n’est pas comparable à celui existant après l’occupation d’un lieu de vie durant vingt ans, dans lequel les époux ont construit la majeure partie de leur vie familiale.» (c. 3.2). Critère subsidiaire de la propriété du logement. «En cas de situation d’impasse, soit lorsqu’aucun époux n’invoque d’intérêt prépondérant valable à l’attribution du logement conjugal, la prise en considération du droit de propriété n’est pas arbitraire pour attribuer le logement.» (c. 3.3).
2.2. Le lien affectif au compagnon de vie humain, comme circonstance permettant la suspension ou la suppression d’un entretien dû, en l’absence d’assistance de ce compagnon
2.2.1. Le concubinage ne se conçoit qu’hétérosexuel, et en principe exclusif
TF 5A _760/2012 du 27 février 2013 – «Le concubinage qualifié (ou stable) est une communauté de vie d’une certaine durée entre deux personnes de sexe opposé, à caractère en principe exclusif, qui présente une composante tant spirituelle que corporelle et économique. Elle est parfois désignée comme communauté de toit, de table et de lit.» (c. 5.1.2.1).
2.2.2. Le lien spirituel et corporel au compagnon de vie, à prouver par le débirentier
TF 5A _760/2012 du 27 février 2013 – «Il incombe au débiteur d’entretien de prouver que le créancier d’entretien vit dans un concubinage qualifié avec un nouveau partenaire. Il existe une présomption réfragable qu’un concubinage est qualifié lorsqu’il dure depuis cinq ans au moment de l’ouverture de l’action en modification du jugement de divorce. L’existence ou non d’un concubinage qualifié ne dépend pas des moyens financiers des concubins, mais de leurs sentiments mutuels et de l’existence d’une communauté de destins.» (c. 5.1.2.1). «Il appartient au débiteur de l’entretien d’établir l’existence d’un concubinage simple ou qualifié.» (c. 6.3.2).
2.2.3. Le concubinage simple2 et ses effets: diminution de moitié des frais communs, même si le crédirentier ne perçoit aucune assistance de son concubin
TF 5A_610/2012 du 20 mars 2013 – «Si le conjoint réclamant des contributions d’entretien en mesures protectrices vit avec un nouveau partenaire qui, dans les faits, l’entretient, sa prétention est réduite du montant des prestations effectivement reçues. S’il ne perçoit rien de son partenaire, il forme cependant avec lui une communauté de vie (concubinage simple) qui lui permet de réaliser des économies, de sorte qu’il convient de partager en deux les frais communs (montant de base, loyer) dans le calcul du minimum vital (ATF 138 III 97).» (c. 6.2.).
2.2.4. Le concubinage qualifié et ses effets: suspension voire même suppression possible de l’entretien, indépendamment d’une amélioration de la situation financière du crédirentier
TF 5A _760/2012 du 27 février 2013 – «Le concubinage qualifié (ou concubinage stable) du créancier de l’entretien n’entraîne pas, par application analogique de l’art. 130 al. 2 CC relatif au remariage, une extinction de l’obligation d’entretien. L’art. 129 al. 1 CC, qui permet au juge de diminuer, de supprimer ou de suspendre la rente pendant une durée déterminée, peut cependant trouver application lorsque le créancier vit
dans un concubinage qualifié.» (c. 5.1.1.).
TF 5A_610/2012 du 20 mars 2013 – «Si le conjoint vit en concubinage qualifié (communauté complète, exclusive et durable de toit, de table et de lit), son droit à l’entretien tombe dès lors que ce concubinage lui apporte les mêmes avantages qu’un remariage. Il faut examiner si la communauté de vie est si étroite que les concubins sont prêts à se prêter mutuellement assistance (comme l’art. 159 al. 3 CC l’exige de conjoints), sans se préoccuper de savoir si le concubin dispose des ressources financières nécessaires.» (c. 6.2).
2.3. Le lien éducatif entravé par les relations avec le parent non gardien, comme source de suspension de ces relations
TF 5A_932/2012 du 5 mars 2013 – Exercice du droit de visite sous surveillance. Le droit de visite peut être limité lorsqu’il peut perturber les relations de l’enfant avec l’autre parent ou rendre l’éducation de l’enfant plus difficile (art. 274 al. 1 CC). Le bien de l’enfant est menacé quand son développement corporel, mental ou moral est mis en danger s’il passe du temps seul avec le parent privé du droit de garde. Le droit de visite ne peut pas être complètement retiré aux parents sans motifs particulièrement graves, de sorte qu’une mise en danger du développement de l’enfant ne doit être admise que restrictivement. L’attitude défensive de l’enfant manifestée à l’égard du parent privé du droit de garde ne suffit pas, mais le point de vue de l’enfant doit être pris en compte (principe de subsidiarité) et seule la mesure la moins contraignante (principe de proportionnalité) peut être ordonnée. Le Tribunal de première instance dispose d’un large pouvoir d’appréciation (c. 5.1).
2.4. Le caractère usuel des relations personnelles du parent non gardien avec l’enfant
TF 5A_50/2013 du 19 mars 2013 – Fixation des relations personnelles. Art. 273 al. 1 CC. «Autoriser le parent titulaire du droit de visite à téléphoner à ses enfants en soirée, lui accorder des temps de visite exceptionnels aux anniversaires ainsi qu’au début et à la fin des vacances, entre dans le droit de visite normal.» (c. 6.1 et 6.3).
3. L’entretien, la solidarité post-divorce et l’égalité de traitement entre époux
3.1. L’entretien «convenable» post-divorce, pour les époux et les enfants
TF 5A_743/2012 du 6 mars 2013 – «L’entretien entre époux, prononcé à titre de mesure provisionnelle pour la durée de la procédure de divorce, se fonde sur l’art. 163 CC, même lorsque la séparation du couple semble définitive. Pour fixer le montant de la contribution d’entretien, le juge considère en premier lieu la répartition, conventionnelle ou tacite, des tâches et des ressources entre les époux. Il applique ensuite le principe voulant que chaque époux contribue selon ses facultés aux frais supplémentaires engendrés par la séparation. Si les ressources sont suffisantes, chaque époux a droit au maintien du niveau de vie antérieur à la séparation. Le crédirentier doit alléguer et rendre vraisemblables les dépenses nécessaires au maintien de son train de vie. Si le maintien de ce train de vie est impossible, les époux ont droit à un niveau de vie identique. Finalement, les enfants mineurs ont également droit au maintien de leur train de vie.» (c. 6.1.2).
3.2. Solidarité post-matrimoniale et limite d’âge: on glisse de 45 à 54 ans
TF 5A_71/2013 du 28 mars 2013 – Revenu hypothétique de la débirentière; 125 CC. «Le principe jurisprudentiel voulant qu’on ne puisse en principe plus attendre d’une femme au foyer de plus de 45 ans au moment de la séparation qu’elle reprenne une activité lucrative n’est pas une règle rigide. Il s’agit bien plutôt d’une présomption qui peut être renversée par d’autres éléments plaidant pour la reprise d’une activité lucrative. En outre, la tendance va vers l’augmentation de cette limite d’âge à 50 ans.» (c. 1.3).
TF 5A_98/2013 du 19 avril 2013 – «Clean break» et solidarité post-matrimoniale. «En principe, chaque époux devrait pourvoir seul à son propre entretien après le divorce (principe du «clean break»). Toutefois, lorsqu’un des ex-époux ne peut pas assumer son entretien convenable et que l’autre peut combler la différence entre sa capacité d’entretien et l’entretien convenable, le premier peut réclamer une contribution. Imputer un salaire hypothétique correspondant à une activité à 20%-30%, puis à 50%-60% après deux ans est admissible dans les circonstances d’espèce.» – Mariage de vingt ans avec répartition traditionnelle des tâches, épouse de 54 ans. (c. 3.2).
3.3. Pas de contribution globale à la famille; individualisation des créances.
TF 5A_743/2012 du 6 mars 2013 – «La contribution d’entretien en faveur d’un enfant en mesures provisionnelles ressort de l’art. 176 al. 3 CC, qui renvoie aux art. 273 ss CC. Puisque l’entretien des enfants et celui du conjoint ne reposent pas sur les mêmes bases légales, la contribution due à l’entretien de la famille doit en principe être fixée de manière séparée pour le conjoint d’une part et pour les enfants d’autre part. On ne saurait pourtant en déduire qu’une contribution globale aboutit à un résultat arbitraire.» (c. 6.2.2). «L’art. 133 al. 1 CC, qui autorise le juge du divorce à fixer la contribution d’entretien due aux enfants pour la période suivant leur majorité, s’applique également aux mesures provisionnelles prises durant la procédure de divorce.» (c. 6.3.2).
3.4. Prise en compte des dettes fiscales et hypothécaires dans la répartition de l’excédent
TF 5A_747/2012 du 2 avril 2013 – «Les dettes personnelles d’un époux à l’égard des tiers, y compris du fisc, ne sont pas considérées dans le calcul du minimum vital de la famille mais dans la répartition de l’éventuel excédent entre les époux. Le fait que la dette ait été contractée dans l’intérêt d’un seul époux ou, au contraire, pour l’entretien de la famille est décisif. Ainsi, les dettes consécutives à un prêt hypothécaire ne sont prises en compte que si le crédit profite aux deux conjoints. La soustraction des amortissements du bénéfice net de l’entreprise plaide davantage en faveur d’une dette personnelle (c. 5.3). Les dettes hypothécaires servant l’acquisition d’un bien immobilier ne sont prises en compte dans le calcul du minimum vital que si elles concernent le logement familial selon la volonté commune des époux.» (c. 5.4).
3.5. Prise en compte de la fortune des époux
TF 5A_279/2013 du 10 juillet 2013 – Mise à contribution de la fortune des époux (art. 125 al. 2 ch. 5 CC). La fixation du montant et de la durée de la contribution d’entretien dépend notamment des revenus et de la fortune des époux. La fonction et la composition de leur fortune déterminent si le crédirentier ou le débirentier doivent mettre celle-ci à contribution. Rien ne s’oppose à l’utilisation de la fortune servant de prévoyance pour garantir la sécurité de l’entretien de l’époux à l’échéance de la contribution. On ne peut pas refuser de considérer une fortune sous prétexte qu’elle résulte d’un héritage ou qu’elle a été investie dans le logement de famille. L’égalité de traitement entre époux s’oppose à ne prendre en compte la fortune que d’un époux et pas de l’autre. Dans le cas d’espèce, le Tribunal cantonal n’a pas violé le droit fédéral par son refus de prendre en compte la fortune des deux époux. Il a relevé que celle de l’époux se matérialisait entièrement dans le logement de famille et a admis que l’égalité de traitement entre conjoints s’opposait à la mise à contribution de la fortune de l’épouse pour assurer son entretien (c. 2.1).
4. Les expectatives découlant du régime matrimonial
4.1. La récompense de l’art. 206 CC garantie à sa valeur nominale; sa traduction en cas de copropriété
TF 5A_61/2013 et 5A_85/2013 du 4 juillet 2013 – Part à la plus-value en cas d’aliénation d’un bien avant la liquidation du régime matrimonial (art. 206 CC). «Le deuxième alinéa de l’art. 206 CC déroge à la disposition générale du premier sur deux points. D’une part, le paiement devient exigible avant la liquidation du régime matrimonial, soit dès l’aliénation du bien. D’autre part, le prix de l’aliénation fixe la valeur déterminante, qui ne correspond pas nécessairement à la valeur vénale (c. 5.3.2). Le silence de l’art. 206 al. 2 CC sur une éventuelle moins-value ne signifie pas que la garantie de la valeur nominale posée au premier alinéa est ici écartée ou qu’elle trouve une limite dans le produit de la réalisation du bien. Le deuxième alinéa poursuit aussi le but de protéger l’époux ayant contribué à l’amélioration d’un bien de l’autre lorsque ce dernier l’aliène avant la dissolution du régime matrimonial.» (c. 5.3.3). Effets d’une copropriété sur l’art. 206 CC. « Si les époux sont copropriétaires chacun par moitié d’un bien, les investissements personnels de chacun visant l’amélioration confèrent uniquement le droit à la moitié de l’investissement et de la plus-value.» (c. 5.3.4).
4.2. La «créance» de participation au bénéfice de l’union conjugale: une expectative jusqu’à la dissolution du régime
TF 5A_690/2012 et 5A_694/2012 du 26 mars 2013 – Créances en remboursement et créance de participation au bénéfice de l’union conjugale. «L’ouverture de la faillite n’entraîne pas la dissolution du régime de participation aux acquêts au profit du régime de la séparation de biens (contrairement à la séparation de biens légale qui intervient en cas de communauté de biens; art. 188 et 236 CC), de sorte qu’aucune liquidation du régime n’intervient durant la faillite. Les créances en remboursement, de même que la créance de participation au bénéfice de l’union conjugale ne constituent que des expectatives jusqu’à la dissolution du régime. Ainsi, elles ne doivent pas être inventoriées dans la faillite et ne tombent pas dans la masse active. Le failli n’a pas à les déclarer dans sa faillite. Dans le cadre d’une liquidation ultérieure du régime matrimonial, il n’y a aucune raison de considérer que le failli a renoncé à ces deux types d’expectatives à l’égard de son conjoint, sous prétexte qu’il ne les a pas déclarés dans sa faillite.» (c. 3.3).
5. La procédure
5.1. L’enfant majeur devra passer par la procédure ordinaire pour réclamer son entretien
TF 5A_689/2012 du 3 juillet 2013 – La demande d’aliments (art. 329 CC) déposée par une personne majeure est soumise aux règles ordinaires de procédure. Elle est régie par la procédure ordinaire lorsque la valeur litigieuse dépasse 30 000 fr. (c. 3.4-3.5). Cet arrêt pourrait également avoir des incidences sur la procédure applicable à la demande en contribution d’entretien de l’enfant majeur. Après avoir constaté que la doctrine est partagée sur la question de la procédure applicable en matière de dette alimentaire (indépendamment du reste de la question de savoir si elle concerne un créancier majeur ou mineur), le Tribunal fédéral procède à une interprétation littérale, puis historique et téléologique de l’art. 329 al. 3 CC (c. 3.2-3.4). Il parvient à la conclusion que ce renvoi ne peut pas viser, et ce malgré le texte du message (FF 2006 6954), l’application des art. 295 et 296 CPC au créancier d’entretien majeur, ces dispositions ne concernant que les enfants mineurs. Déjà sous l’ancien droit, la jurisprudence (ATF 118 II 93, JdT 1995 I 100) considérait que l’on ne pouvait pas retenir l’application de la maxime officielle lorsque le créancier d’aliments était majeur. Or, le message n’aborde nulle part la question d’un tel créancier, se contentant de dire que le renvoi de l’art. 329 al. 3 CC assurait le maintien de la solution alors en vigueur. Il n’est pas non plus envisageable d’admettre que le renvoi ne porterait que sur l’application de la procédure simplifiée de l’art. 295 CPC, mais non sur les maximes de procédure de l’art. 296 CPC (ce qui maintiendrait la solution de l’ancien droit), un tel procédé débouchant, sans nécessité, sur la création d’une nouvelle procédure spéciale, sans base légale expresse. Quant à l’application directe des art. 243 ss CPC, elle est exclue, faute de renvoi à ces dispositions à l’art. 329 al. 3 CC.
5.2. Le chevauchement des procédures de mesures protectrices de l’union conjugale et de divorce: quid si les premières n’ont pas été tranchées, alors que, le divorce est prononcé et n’accorde pas de contribution d’entretien?
TF 5A_933/2012 du 17 mai 2013 – «Les mesures protectrices régissent ainsi les contributions d’entretien pour toute la durée de la procédure de divorce, à moins que des mesures provisionnelles ne les modifient. Si le jugement de divorce n’alloue aucune contribution d’entretien, le crédirentier conserve ses prétentions pour la période précédant l’entrée en force dudit jugement, même si les mesures protectrices n’ont pas encore été rendues au prononcé du jugement précité.» (c. 5.3).
5.3. Suspension des relations personnelles avec un enfant: mesures provisionnelles ou mesure de protection?
TF 5A_932/2012 du 5 mars 2013 – Qualification des modalités ordonnées par l’autorité de protection de l’enfant. «Constitue une décision sur mesures provisionnelles, au sens de l’art. 98 LTF, celle de l’autorité compétente qui suspend les relations personnelles entre un parent et son enfant pour une durée maximale déterminée et ordonne expressément un réexamen de la situation après l’écoulement d’un certain délai. En revanche, l’autorité de protection de l’enfant ne prononce pas de mesures provisionnelles si elle prend des mesures, en mentionnant que le tribunal devra se prononcer sur l’affaire à une certaine date au plus tard et statuer, par la même occasion, sur le droit de visite. Dans ce cas, l’autorité de protection de l’enfant se réserve le droit de modifier les modalités du droit de visite selon l’évolution de l’enfant (art. 313 al. 1 CC).» (c. 2.1).
5.4. Réplique, bonne foi et droit d’être entendu
TF 5A_862/2012 du 30 mai 2013 – Droit de réplique. «Le droit de réplique découle du droit d’être entendu (art. 29 Cst.) et vaut pour toutes les procédures judiciaires. Toute prise de position ou pièce nouvelle versée au dossier doit dès lors être communiquée aux parties pour leur permettre de décider si elles veulent ou non faire usage de leur faculté de se déterminer. Le tribunal peut, exceptionnellement (art. 102 al. 3 LTF) ou lorsque les circonstances le justifient (art. 225 CPC), ordonner un second échange d’écritures. S’il y renonce, il doit néanmoins transmettre la prise de position ou la pièce nouvelle à l’autre partie pour détermination éventuelle. A défaut de réaction de sa part, l’autre partie est réputée avoir renoncé à son droit de réplique, en vertu du principe de la bonne foi. En effet, elle ne peut attendre sans réagir l’issue de la cause, dont elle estime qu’elle lui est défavorable, pour ensuite invoquer la violation de son droit d’être entendue.» (c. 3.2.1.2).
5.5. L’unité du jugement de divorce: aussi en matière internationale
TF 5A_874/2012 du 19 mars 2013 – Unité du jugement de divorce et action en complément. «Le droit suisse reconnaît, avec quelques exceptions, le principe de l’unité du jugement de divorce aussi en matière internationale. Si le juge du divorce a oublié de régler certains points, par exemple l’entretien ou le partage de la prévoyance professionnelle, une action en complément du jugement est ouverte.» (c. 2.1).
6. Le droit étranger et sa réception
6.1. La clause d’exception de l’art. 15 LDIP comme moyen d’appliquer le droit suisse en complétant un jugement de divorce étranger
TF 5A_874/2012 du 19 mars 2013 – Droit applicable au partage de la prévoyance professionnelle. Clause d’exception aux art. 64 al. 2 et 63 al. 2 LDIP. «Conformément à l’art. 15 LDIP, l’application du droit suisse sur le partage de la prévoyance professionnelle à la place de la loi nationale commune des époux peut se justifier lorsque les époux ont vécu exclusivement en Suisse, que leurs avoirs de prévoyance se trouvent uniquement en Suisse et que leur dernière résidence commune était en Suisse.» (c. 4.3).
6.2. L’intérêt supérieur de l’enfant comme moyen de ne pas reconnaître un droit de visite étranger
TF 5A_90/2013 du 27 juin 2013 – Reconnaissance d’un droit de visite étranger (belge) et régime de l’art. 85 LDIP. Art. 10 al. 1 lit. d CE 80 et art. 5 CLaH 96 appliqué à titre de droit national. Un droit de visite empêchant notamment le parent gardien et l’enfant de passer des vacances ensemble n’est pas conforme à l’intérêt de l’enfant. Refus de reconnaître le régime de visite prescrit par le jugement belge ayant permis le départ de la mère de Belgique avec l’enfant, eu égard au fait qu’avant la demande de reconnaissance de ce jugement en Suisse une décision provisionnelle lausannoise a été rendue, modifiant les relations personnelles de l’enfant avec son parent non gardien. y
1 Mes remerciements vont à Carine Pedro, collaboratrice scientifique de mon Étude, pour son aide dans le recensement des arrêts qui font l’objet de cette contribution