A. Le grand chantier de la garde
1. Papa, Maman, la bonne et moi…
Les critères énoncés par le TF pour instaurer une garde alternée au stade des mesures protectrices de l’union conjugale, et la méthodologie préconisée: TF 5A_904/2015 du 29.09.1016
1.1. L’autorité parentale conjointe n’implique pas la garde alternée:
C. 3.2.3 et les références citées: «Bien que l’autorité parentale conjointe soit désormais la règle et qu’elle comprenne le droit de déterminer le lieu de résidence de l’enfant (art. 296 al. 2 et 301a al. 1 CC), elle n’implique pas nécessairement l’instauration d’une garde alternée. Invité à statuer à cet égard, le juge doit néanmoins examiner, nonobstant et indépendamment de l’accord des parents quant à une garde alternée, si celle-ci est possible et compatible avec le bien de l’enfant. Le bien de l’enfant constitue en effet la règle fondamentale en matière d’attribution des droits parentaux, les intérêts des parents devant être relégués au second plan.»
1.2. On ne saurait rien déduire a priori des études psychologiques et psychiatriques publiées sur le sujet:
C. 3.2.3: «La possibilité concrète d’instaurer une garde alternée et sa compatibilité avec le bien de l’enfant étant dépendantes des circonstances du cas d’espèce, rien ne saurait être déduit des diverses études psychologiques ou psychiatriques en la matière se prononçant de manière absolue en faveur ou en défaveur de l’instauration d’un tel mode de garde, puisque celles-ci ne prennent pas en considération tous les paramètres qui entrent en ligne de compte dans la pratique. Le juge doit en effet évaluer, sur la base de la situation de fait actuelle ainsi que de celle qui prévalait avant la séparation des parties, si l’instauration d’une garde alternée est effectivement à même de préserver le bien de l’enfant.»
1.3. Mais le juge devra recourir à l’évaluation sociale ou à un expert psychiatre en cas de doute sur le réel souhait de l’enfant:
C. 3.2.3: «Il faut également prendre en considération le souhait de l’enfant s’agissant de sa propre prise en charge, quand bien même il ne disposerait pas de la capacité de discernement à cet égard. Sur ce point, il appartiendra au juge du fait, qui établit les faits d’office (art. 296 al. 1 CPC et art. 314 al. 1 en relation avec l’art. 446 CC), de déterminer dans quelle mesure l’intervention d’un spécialiste, voire l’établissement d’un rapport d’évaluation sociale ou d’une expertise, est nécessaire pour interpréter le désir exprimé par l’enfant et notamment discerner s’il correspond à son désir réel.»
1.4. Les deux parents doivent essentiellement être dotés de capacités éducatives, et être aptes à communiquer et à coopérer:
C. 3.2.3: «Au nombre des critères essentiels pour cet examen, entrent en ligne de compte les capacités éducatives des parents, lesquelles doivent être données chez chacun d’eux pour pouvoir envisager l’instauration d’une garde alternée ainsi que l’existence d’une bonne capacité et volonté des parents de communiquer et coopérer compte tenu des mesures organisationnelles et de la transmission régulière d’informations que nécessite ce mode de garde.»
1.5. Quid si l’un des parents est opposé à la garde alternée?
C. 3.2.3: «A cet égard, on ne saurait déduire une incapacité à coopérer entre les parents du seul refus d’instaurer la garde alternée.»
1.6. Quid s’ils sont englués dans un conflit marqué et persistant?
C. 3.2.3: «En revanche, un conflit marqué et persistant entre les parents portant sur des questions liées à l’enfant laisse présager des difficultés futures de collaboration et aura en principe pour conséquence d’exposer de manière récurrente l’enfant à une situation conflictuelle, ce qui pourrait apparaître contraire à son intérêt.»
1.7. Et la médiation, suffit-elle ou doit-elle déboucher sur un accord?
C. 3.3: «La motivation de la cour cantonale n’est pas non plus arbitraire en tant qu’elle a considéré que la médiation parentale préconisée par le SPMi et mise en place entre les parties était un signe que leurs difficultés de communication n’étaient pas anodines. Contrairement à ce que semble penser le recourant, le seul fait que les parties aient accepté de se soumettre à cette médiation ne signifie pas encore que les problèmes de communication aient pu être surmontés par ce biais.»
1.8. Quels critères sont déterminants, finalement, pour instaurer une garde alternée, hormis le souhait de l’enfant?
C. 3.2.3. et les références citées: «Il faut également tenir compte de la situation géographique et de la distance séparant les logements des deux parents, de la stabilité qu’apporte à l’enfant le maintien de la situation antérieure, en ce sens notamment qu’une garde alternée sera instaurée plus facilement lorsque les deux parents s’occupaient de l’enfant en alternance déjà avant la séparation, de la possibilité pour les parents de s’occuper personnellement de l’enfant, de l’âge de ce dernier et de son appartenance à une fratrie ou à un cercle social»; «Hormis l’existence de capacités éducatives chez les deux parents (…), les autres critères d’appréciation sont interdépendants et leur importance respective varie en fonction des circonstances du cas d’espèce. Ainsi, les critères de la stabilité et de la possibilité pour le parent de s’occuper personnellement de l’enfant auront un rôle prépondérant chez les nourrissons et les enfants en bas âge alors que l’appartenance à un cercle social sera particulièrement importante pour un adolescent. La capacité de collaboration et de communication des parents est, quant à elle, d’autant plus importante lorsque l’enfant concerné est déjà scolarisé ou qu’un certain éloignement géographique entre les domiciles respectifs des parents nécessite une plus grande organisation.»
1.9. Comment choisir le parent attributaire exclusif de la garde, si l’alternance ne sert pas le bien de l’enfant?
C. 3.2.4: «Si le juge arrive à la conclusion qu’une garde alternée n’est pas dans l’intérêt de l’enfant, il devra alors déterminer auquel des deux parents il attribue la garde en tenant compte, pour l’essentiel, des mêmes critères d’évaluation et en appréciant, en sus, la capacité de chaque parent à favoriser les contacts entre l’enfant et l’autre parent.»
1.10. Rechercher la stabilité des enfants, et s’en remettre aux désirs de la nounou, si elle est le référent principal des enfants:
C. 3.3: Le fait d’octroyer la garde exclusive à la mère permet aux enfants de «demeurer auprès de leur nounou qui représente leur principale personne de référence et est garante d’une certaine stabilité nécessaire à leur bien-être». Voir aussi, sur le sujet, TF 5A_991/2015 du 29 septembre 2016 qui confirme également la garde exclusive octroyée à la mère, car le père n’offre pas un environnement stable aux enfants, et manque de capacités éducatives.
2. Mes enfants, ma femme, son départ pour un autre et la contre-indication lacrymale…
Les critères énoncés par le TF pour instaurer une garde exclusive au stade des mesures protectrices de l’union conjugale, et la méthodologie préconisée: TF 5A_450/2016 du 04.10.2016.
Le critère principal des capacités éducatives des parents a été reformulé de manière à mettre l’accent sur son caractère primaire et essentiel: le juge «devra, en premier lieu examiner si chacun des parents dispose de capacités éducatives, l’attribution de la garde étant d’emblée exclue si celles-ci font défaut». Les autres critères posés dans les arrêts TF 5A_904/2015 du 29 septembre 2016 et 5A_991/2015 du 29 septembre 2016 ne seront donc examinés que si ce critère est donné. Ne dispose pas de compétences parentales permettant de lui attribuer la garde, le père «plus disponible en temps que la mère», qui éprouve des difficultés à accepter la séparation et à différencier la conjugalité de la parentalité et qui implique les enfants dans le conflit, en confiant sa souffrance à sa fille aînée, ce qui a des répercussions négatives sur cette dernière, crée des angoisses chez elle et attise vraisemblablement son ressenti contre sa mère qu’elle tient pour responsable de cette situation au point de ne plus vouloir la voir.
De plus, le critère de la capacité et la volonté de chaque parent de favoriser les contacts entre l’autre parent et l’enfant, initialement appliqué au stade de l’examen de l’attribution de la garde exclusive (arrêt 5A_904/2015 du 29 septembre 2016, c. 3.2.4: «Si le juge arrive à la conclusion qu’une garde alternée n’est pas dans l’intérêt de l’enfant, il devra alors déterminer auquel des deux parents il attribue la garde en tenant compte, pour l’essentiel, des mêmes critères d’évaluation et en appréciant, en sus, la capacité de chaque parent à favoriser les contacts entre l’enfant et l’autre parent.»), fait désormais partie des critères à apprécier pour l’octroi de la garde alternée (c. 4.3.1).
3. Enfants confiés régulièrement à des tiers: quels critères adopter pour attribuer la garde?
TF 5A_474/2016 et 5A_487/2016 du 27.10.2016
C. 4.3.2 (all.): Si les deux parents disposent de capacités éducatives et de possibilités identiquement restreintes de s’occuper personnellement de leurs enfants, alors le critère de la stabilité géographique et des relations familières peut être prépondérant.
4. Déplacement d’enfants, comment décider…
4.1. De l’aller: planification concrète pour comparer les situations
4.1.1. A l’étranger
ATF 142 III 481. 482 (TF 5A_450/2015 du 11 mars 2015, all.)
C. 2.3: Le législateur national doit se référer aux diverses recommandations émises par la Déclaration de Washington adoptée par la Conférence internationale de juges en mars 2010, aux recommandations du Conseil de l’Europe de mai 2011 sur les droits et le statut des enfants et sur la responsabilité parentale, et aux travaux en cours de la Conférence de La Haye sur les déménagements familiaux internationaux. Il ressort de ces documents que l’état de la recherche sociopsychologique ne conclut pas de manière univoque sur la question de savoir si le bien de l’enfant est mieux servi par des contacts avec les deux parents ou par la qualité des relations avec le parent gardien. Peu d’Etats ont réglementé le déménagement de la famille au moyen de règles de procédure spécifiques. Quelques Etats traitent la question sous l’angle de la garde et du droit de l’autorité parentale. Ce qui est déterminant dans cette procédure est de savoir à quelle maxime elle obéit. Le législateur national reste dès lors libre de déterminer le contenu du droit visant à déterminer la résidence habituelle des enfants (en particulier en lien avec le déplacement).
C. 2.6.: Le principe du bien de l’enfant est de rang constitutionnel (art. 11 Cst.). C’est à l’aune de celui-ci qu’il convient d’examiner le lieu approprié de résidence de l’enfant, si l’un de ses parents déménage.
C. 2.7. Le point de départ de cet examen est le mode de prise en charge de l’enfant jusque-là. Il ne s’agit pas de se demander si le bien de l’enfant serait mieux servi par le maintien de l’état antérieur, mais bien plus de se demander si le bien de l’enfant serait mieux préservé s’il part avec le parent qui déménage ou s’il reste avec l’autre parent. Cette question est résolue sous l’angle de l’art. 301a al. 5 CC par l’examen de l’ensemble des circonstances qui prévalent jusque-là et qui devraient être adaptées en cas de déménagement (prise en charge de l’enfant, relations personnelles et entretien).
C. 2.8. L’examen de la manière avec laquelle les modalités régissant la prise en charge, les relations personnelles et l’entretien doivent être adaptés est obligatoire, même lorsque le déplacement de l’enfant n’est pas autorisé.
ATF 142 III 498 (TF 5A_945/2015 du 7 juillet 2016, all.):
La volonté du législateur de respecter la liberté d’établissement et de mouvement n’est pas en cause. Ce qui est décisif, c’est de déterminer si, dans la nouvelle situation, le bien de l’enfant est mieux préservé par un départ avec le parent qui souhaite déménager ou par un maintien auprès de celui qui reste sur place. Le point central est le bien de l’enfant, qui se détermine selon les circonstances du cas d’espèce. Si les enfants ont été jusqu’alors pris en charge dans une mesure plus ou moins égale par les deux parents, et si ceux-ci sont prêts à poursuivre cette prise en charge, il faut déterminer sur la base des circonstances du cas concret quelle solution garantira, à l’avenir, mieux les intérêts de l’enfant. La raison du départ du parent peut jouer un rôle indirect dans des cas particuliers, lorsque le départ est manifestement destiné à éloigner l’enfant du parent qui reste. Dans de tels cas, une attribution de l’enfant au parent restant en Suisse pourrait entrer en considération.
C. 4.4.: Les critères développés par le TF pour décider de l’attribution de la garde des enfants en cas de mesures protectrices de l’union conjugale et de divorce sont applicables à la fixation de la résidence habituelle des enfants en vertu de l’art. 301a CC (déplacement envisagé).
C. 4.5.: Lorsqu’un parent envisage de s’établir dans un pays étranger dont il ne parle pas la langue et qui n’est pas celui de sa nationalité, où il aurait de la famille ou des liens, en compagnie d’un partenaire avec lequel il n’est pas en relation depuis deux ans au moins et avec lequel il n’a pas conclu de partenariat enregistré qui le protégerait des conséquences économiques d’une éventuelle rupture, il convient de préférer la stabilité que représente le maintien de l’enfant au lieu dans lequel il a vécu jusque-là (cas de concubins pratiquant, jusque-là, la garde alternée d’un enfant qui, entendu à l’âge de 6 ans, avait exprimé le désir de ne pas être arraché à son environnement, l’enfant étant confié partiellement à la garde de tiers par ses parents tous les deux actifs professionnellement à temps partiel).
4.1.2. En Suisse ATF 142 III 502 (TF 5A_581/2015)
Art. 301a al. 2 let. b et al. 5 CC.
Les «conséquences importantes pour l’exercice de l’autorité parentale» ont trait avant tout à la participation de chaque parent à la prise en charge de l’enfant; la question de savoir si le mode de prise en charge de l’enfant peut être maintenu est déterminante (c. 2.4.1). Le déménagement est soumis à accord en cas de conséquences importantes soit pour l’exercice de l’autorité parentale soit pour les relations personnelles (c. 2.4.2). L’autorisation concernant le déménagement à l’intérieur du territoire suisse est soumise aux mêmes critères que ceux développés en lien avec le déplacement de l’enfant à l’étranger (c. 2.5). L’examen de l’adaptation des modalités régissant la prise en charge, les relations personnelles et l’entretien ne doit pas être dissocié de la question du déménagement, compte tenu du lien étroit entre ces éléments (c. 2.6). A cet égard, il convient de clarifier le mode de prise en charge de l’enfant appliqué jusqu’alors, les contours du déménagement, les besoins de l’enfant ainsi que la prise en charge, offerte et effectivement possible, par les parents (c. 2.7).
4.2. Du retour: La situation personnelle du parent ravisseur?
TF 5A_827/2016 du 30 novembre 2016
C. 3.1: «En matière internationale, le droit de garde comprend le droit portant sur les soins de la personne de l’enfant, et en particulier celui de décider de son lieu de résidence (art. 5 let. a CLaH80).»
C. 7.2.: Le fait que la mère considère son propre retour en Pologne comme intolérable, aux niveaux financier et professionnel, n’est pas pertinent pour l’examen de l’exception au retour.
4.3. Écouter la voix de l’enfant de 14 ans.
TF 5A_709/2016 du 30.11.2016
C. 5.5.1 et références citées: Un enfant a atteint un degré de maturité suffisant pour s’opposer au retour au sens d’art. 13 al. 2 CLaH80 lorsqu’il est en mesure de comprendre le sens et la problématique de la décision portant sur le retour. « Il doit en particulier être capable de saisir que la procédure ne concerne ni la question du droit de garde, ni celle de l’autorité parentale, mais tend uniquement à rétablir la situation antérieure au déplacement illicite; il doit aussi être conscient que le point de savoir dans quel Etat et auprès duquel de ses parents il vivra à l’avenir sera tranché, après son retour dans le pays d’origine, par les autorités judiciaires de ce pays». Ce n’est pas un droit de choisir librement le lieu de séjour de la famille.
C. 5.5.2: «(…) la fille était âgée de quatorze ans et avait manifestement la maturité suffisante pour être entendue (…)»; «Quant aux motifs avancés par la fille pour demeurer en Suisse et s’opposer à son retour au Brésil, à savoir son intégration sociale et scolaire depuis près de deux ans, ainsi que les relations qu’elle peut entretenir en Suisse avec sa demi-sœur qui vit avec elle et sa mère une semaine sur deux, ils ne sauraient être considérés comme un simple «souhait d’enfant», mais indiquent que la volonté de la fille est sérieuse et réfléchie et repose sur des raisons particulières et compréhensibles.» L’exception est satisfaite.
B. Le financement de la garde
1. L’entretien d’enfants confiés partiellement à des tiers, l’application non rétroactive du nouveau droit (art. 285 al. 2n CC), et… la règle des 10/16 ans pour les concubins au foyer
TF 5A_335/2015 du 3 mars 2016 (all.)
C. 5.3 et 5.4 et références citées: Les frais de garde par un tiers ne sont pas inclus dans les «coûts des soins de l’enfant» ni dans les «frais d’éducation» des tabelles zurichoises, et doivent, sous l’empire du droit de 2016, être pris en charge par la mère qui a la garde de l’enfant, lorsqu’elle n’est pas mariée avec le père. Pour des parents non mariés, on n’a pas de règle pour le revenu hypothétique à imputer au parent gardien. Le TF indique toutefois que, à compter du 1er janvier 2017, la règle des «10/16 ans» développée au sujet de l’entretien après divorce (par application de l’art. 125 al. 2 ch. 6 CC) pourra être appliquée aux parents non mariés, et rappelle que le nouvel art. 285 al. 2 CC qui entre en vigueur le 1er janvier 2017 ne déploie pas d’effets anticipés, parce qu’il ne tend pas à concrétiser une règle existante ou à combler une lacune du droit, mais met en œuvre un véritable changement de système dans la fixation de la prise en charge de l’enfant.
C. Les relations personnelles et le refus de l’enfant
1. Non, c’est non: la volonté ferme des enfants adolescents
TF 5A_367/2015 du 12.08.2016
C. 5.1.3 (all.): Dans cette jurisprudence, le TF pose clairement le principe que, dans le cas d’enfants plus âgés, une volonté, exprimée de manière constante et explicite, d’entretenir des relations personnelles avec le parent non gardien, occupe le premier plan et doit être pris en compte. Cela peut amener à renoncer complètement aux relations personnelles, car on ne doit pas les organiser contre le refus des enfants, âgés respectivement de 15 et 16 ans1.
2. Heil Kinder?
TF 5A_728/2015 du 25.08.2016
C. 2.1 et références citées (all.): L’organisation des relations personnelles dans la famille en question est imposée par l’enfant mineur (âgé de 13 ans), qui a exprimé sa volonté d’avoir un droit de visite de son père, non accompagné. Cependant, malgré le fait que l’enfant doit être entendu dans le cadre de sa procédure, cela ne signifie pas qu’il peut se déterminer librement, de manière autonome, sur l’organisation de ce droit de visite. C’est son intérêt supérieur qui doit primer, en tenant compte de la situation concrète et de l’âge en question. La volonté de l’enfant ne peut pas être assimilée à son bien-être, puisque ces deux éléments peuvent tout à fait être en dés-accord.
D. L’autorité parentale au service de l’enfant, comment y trouver sa place de parent?
1. Rappel des principes de limitation
ATF 141 III 472 (5A_923/2014 du 27 août 2015), JdT 2016 II p. 130 ss: Art. 298 al. 1, art. 298b al. 2 et art. 298d al. 1 CC; attribution de l’autorité parentale exclusive.
C. 4.6: «(…) il n’est pas possible de retenir les mêmes conditions pour l’attribution exclusive de l’autorité parentale à l’un des parents en vertu des art. 298 ss CC et pour le retrait de l’autorité prononcé sur la base de l’art. 311 CC. Au contraire, un conflit durable et grave entre les parents ou une incapacité persistante à communiquer par exemple, peuvent justifier l’attribution de l’autorité parentale à l’un des parents lorsque le problème a un effet négatif sur le bien de l’enfant et que la mesure permet d’espérer une amélioration. L’autorité parentale conjointe est une coquille vide lorsqu’une collaboration entre les parents n’est pas possible et il n’est en tous les cas pas conforme au bien de l’enfant que l’autorité de protection ou même le juge doivent prendre de manière durable les décisions pour lesquelles, en cas d’autorité parentale conjointe, l’accord des deux parents est nécessaire.»
C. 4.7: Une certaine importance et périodicité du conflit ou de la déficience dans la communication sont nécessaires ; des oppositions ou divergences ponctuelles, qui apparaissent souvent en cas de séparation ou de divorce, ne sauraient pas être la cause d’une attribution exclusive de l’autorité parentale. Même en cas de conflit important, mais qui paraît comme un fait isolé, on doit vérifier le principe de subsidiarité et voir si une décision judiciaire qui touche à certains éléments de l’autorité parentale (par exemple, éducation, religion) ne pourra remédier à la situation. L’attribution exclusive doit rester une exception strictement limitée.
2. Le départ à l’étranger de l’un des parents ne change rien ATF 142 III 1
C. 3.3 à 3.6: «La simple allégation d’un conflit futur, les différends opposant les parents dans le cadre d’une procédure pendante ou au sujet même du départ de l’enfant, ne justifient en principe pas l’attribution exclusive de l’autorité parentale.»
3. L’autorité parentale n’est pas un moyen de sanction
ATF 142 III 197
C. 3.5 et 3.7: «L’autorité parentale conjointe suppose que chaque parent puisse entretenir un certain lien physique avec l’enfant, ait un accès à l’information concernant celui-ci et qu’il existe un accord minimal entre les parents au sujet des intérêts de l’enfant. La décision sur l’autorité parentale ne saurait être motivée par la volonté de sanctionner le parent qui ne coopère pas.»2
4. Les limites du pouvoir. Mon nom est Personne, n.f. Droit de l’enfant de connaître ses origines et droit de la mère de taire le nom du père3
TF 5A_220/2016 du 15.07.2016.
C. 3.1 et références citées: Le bien-être de l’enfant ne se résume pas à la satisfaction de ses besoins matériels mais comprend tout ce qui est propre à favoriser son développement corporel, intellectuel et moral. Ainsi, une bonne situation financière de la mère n’exclut pas, en elle seule, l’institution d’une curatelle de paternité. En l’espèce, la situation de la mère n’apparaît pas aussi confortable qu’elle le prétend et son opposition à la curatelle et à l’établissement du lien de filiation prive sa fille du droit à une contribution d’entretien (qui est subordonnée à la présence d’un rapport de filiation; cf. art. 276 CC).
C. 3.2 et références citées: L’enfant a le droit de faire établir sa filiation paternelle, car «la connaissance de l’ascendance est un élément important de la construction de la personnalité (art. 7 al. 1 CDE; art. 8 § 1 CEDH; art. 119 al. 2 let. g Cst.). Certes, la révélation de l’identité du père peut s’avérer contraire à l’intérêt de l’enfant. En revanche, des «raisons personnelles» non explicitées de la mère, comme dans le cas d’espèce, ne suffisent pas pour renoncer à l’action en paternité. Une telle renonciation doit être motivée par l’intérêt de l’enfant et non pas par celui des parents de ne pas dévoiler une relation susceptible à compromettre leur propre réputation. En outre, l’enfant capable de discernement reste libre à intenter l’action par lui-même (art. 19c al. 1 CC cum art. 261 CC).
5. L’utilité de la médiation convenue: étape obligatoire avant la procédure judiciaire
ATF 142 III 296 (TF 4A_628/2015 du 16.03.2016):
Une clause de médiation contenue dans un contrat, qui n’a pas été respectée, est un motif d’irrecevabilité qui entraîne l’incompétence de l’arbitre ou du juge saisi.
C. 2.4.3. et références citées: On ne doit pas permettre à une des parties de se délier de l’engagement obligatoire souscrit par elle dans le contrat. Si on considère que la procédure de conciliation n’est pas vouée à l’échec, «on aurait tort de sous-estimer le rôle dévolu au médiateur dans la liquidation d’un différent et l’influence bénéfique que peut avoir sur des parties en conflit la force de persuasion d’une personne rompue à l’emploi des méthodes alternatives de règlement de litiges». Les statistiques montrent, en outre, qu’une médiation qui a lieu en cours d’une procédure arbitrale a des fortes chances d’aboutir.
E. Régimes matrimoniaux et «donation mixte»:
le TF tranche une question controversée
ATF 142 III 257 (5A_143/2015 du 23.03.2016)
C. 4.3.2 et 4.3.3: L’acquisition d’un bien à la suite d’un partage successoral constitue un remploi du droit à une quote-part de la masse successorale. Le droit à une quote-part de la masse successorale, respectivement le droit à une part de la liquidation de la communauté héréditaire, est acquis à travers la dévolution successorale et constitue un bien propre (art. 198 ch. 2 CC). Les biens de la succession sur lesquels un héritier acquiert la propriété individuelle à la suite du partage de la succession prennent la place de son droit à une quote-part de la masse successorale (ATF 91 II 86, c. 3), ce qui constitue dès lors un remploi (art. 197 al. 2 ch. 5 et art. 198 ch. 4 CC).
C. 4.3.3: Pour attribuer le bien à une des masses successorales, on applique la règle du remploi ordinaire. Cette solution donne un résultat identique à celui auquel aboutit la doctrine en recourant aux règles sur la donation mixte, mais ce n’est pas celles-ci qui s’appliquent en réalité. y
1Attention à la perte, qui peut s’ensuivre, du droit à la contribution d’entretien à la majorité, fondée tant sur l’art. 277 al. 2 CC que sur la violation, par l’enfant, de ses devoirs ancrés dans l’art. 272 CC, cf. ATF 127 I 202 c. 3e; 120 II 177 c. 3c et les arrêts cités; 113 II 374 c. 2; 111 II 411 c. 2; TF 5A_137/2015 du 9 avril 2015
c. 5.1; 5A_64/2015 du 2 avril 2015
c. 5.1.1; 5A_182/2014 du 12 décembre 2014 c. 3.2; 5A_560/2011 du 25 novembre 2011 c. 4.1; 5C.205/2004 c. 5.1 publié in FamPra.ch 2005 p. 414.
2… et à qui l’autorité parentale exclusive est ainsi attribuée…
3Cf. art. 8, 10 à 14, 119 al. 2 let g Cst.