Droit public
Alliance au 2e tour des élections cantonales
Un citoyen fribourgeois recourt auprès du Tribunal cantonal de Fribourg contre «l’acceptation par la Chancellerie de listes pour le second tour de l’élection du Conseil d’Etat qui comporteraient davantage de noms de candidats que les mêmes listes au premier tour.» Le Tribunal cantonal rejette intégralement les arguments du recourant en excluant toute violation de la loi cantonale sur les exercices politiques (LEDP; RSF 115.1) et de l’article 34 al. 2 Cst. Les juges cantonaux concluent à la légalité de la constitution de nouvelles listes, notamment.
Etat de fait
Dans l’optique des élections au Conseil d’Etat fribourgeois, les partis de droite et de Centre droit, soit le PLR, l’UDC et le Centre, ont regroupé leurs listes pour le deuxième tour des élections du 28 novembre 2021. Cette stratégie avait pour objectif de maintenir une majorité de droite au Conseil d’Etat. Elle a donné lieu à d’importantes critiques quant à l’ambiguïté du procédé, pouvant faire naître la confusion dans l’esprit des électeurs.
Extrait des considérants
Considérant que:
[…]
cela étant, se pose la question de la recevabilité temporelle du recours;
d’après l’art. 152 al. 3 LEDP, le recours contre les actes préparatoires, y compris la dénomination d’une liste (art. 37) ou son toilettage (art. 56), doit être interjeté dans le délai de cinq jours dès la connaissance du motif de recours, mais au plus tard dans le délai de dix jours dès la publication ou l’affichage des résultats du scrutin. Il n’y a pas de féries judiciaires;
les actes préparatoires couvrent les décisions d’organiser ou non une votation populaire, les messages explicatifs officiels ainsi que les autres informations envoyées au citoyen, la formulation de la question soumise au vote, ou encore les moyens d’intervention dans la campagne référendaire des particuliers et des autorités (Tornay, in La démocratie directe saisie par le juge, 2008, p. 37);
les irrégularités découvertes avant le scrutin doivent être invoquées immédiatement afin de permettre de réparer le vice et d’éviter un nouveau vote. Le citoyen qui omet d’agir ainsi s’expose à voir en principe son droit de recourir contre l’élection ou la votation périmé (ATF 145 I 282 consid. 3; 140 I 338 consid. 4.4; arrêt TF 1C_365/2019 du 5 novembre 2019 consid. 2.1);
l’irrecevabilité qui sanctionne l’inobservation d’un délai de recours n’est pas constitutive d’un formalisme excessif prohibé par l’art. 29 al. 1 Cst. Une stricte application des règles relatives aux délais est justifiée par des motifs d’égalité de traitement et par un intérêt public lié à une bonne administration de la justice et à la sécurité du droit (cf. ATF 125 V 65 consid. 1; arrêt TF 1C_158/2018 du 4 juillet 2018 consid. 4). En matière de droits politiques, la brièveté des délais et la nécessité de leur stricte application se justifient également afin de permettre que les irrégularités puissent être si possible corrigées avant la votation en cause (ATF 121 I 1 consid. 2). Le principe de la bonne foi empêche lui aussi que le citoyen attende l’issue de la votation pour se plaindre d’une irrégularité (arrêt TF 1C_365/2019 du 5 novembre 2019 consid. 2.2; Tornay, p. 36);
en l’occurrence, le recourant s’en prend à la composition des listes no 1, 3 et 5 pour le second tour de l’élection au Conseil d’Etat du 28 novembre 2021;
il s’agit manifestement d’actes préparatoires;
or, c’est par communiqué du 10 novembre 2021 que la Chancellerie d’Etat a publié les listes complètes en question, avec dénomination des différentes listes et leur composition respective (cf. www.fr.ch/cha/actualites/elections-au-conseil-detat-un-second-tour-de-scrutin-a-neuf-candidatures-aura-lieu-le-28-novembre-2021);
l’information a notamment été diffusée également le même jour à la télévision lors de l’édition du téléjournal de midi et sur le site internet de la RTS (www.rts.ch/info/regions/fribourg/12629714-alliance-contre-alliance-pour-le-conseil-detat-fribourgeois.html);
elle a également fait l’objet d’un large article publié dans le quotidien La Liberté du lendemain 11 novembre 2021 (https://epaper.laliberte.ch/html5/reader/production/default.aspx?pubname =&edid=79d171a3-86bb-4d9e-afb0-fcbaf6218025);
le recours a été déposé pour sa part le 16 novembre 2021;
le délai de recours de cinq jours de l’art. 152 al. 3 LEDP commence à courir à compter de la connaissance du motif de recours;
or, la communication de la Chancellerie d’Etat en vue du second tour de scrutin du 28 novembre 2021, laquelle a fait l’objet d’une publication dans la Feuille officielle du canton de Fribourg no 46 du 19 novembre 2021, ne mentionne que les candidats qui participeront au scrutin et indique ceux qui se sont retirés, sans préciser la dénomination et le contenu des listes;
en revanche, si l’on se fonde sur la date du communiqué de la Chancellerie du 10 novembre 2021, lequel donne connaissance des listes complètes, y compris la dénomination des différentes listes et leur composition respective, le recours a été déposé hors délai;
que s’il faut admettre que c’est à compter de sa diffusion dans la presse écrite que l’information a été portée à la connaissance du citoyen recourant, son recours du 16 novembre 2021 l’a été en temps utile;
cette question peut toutefois souffrir de rester indécise dès lors que le recours doit de toute manière être rejeté;
l’élection des membres du Conseil d’Etat se fait selon le système majoritaire, en vertu des art. 106 al. 1 de la Constitution cantonale du 16 mai 2004 (Cst.; RSF10.1), 83 al. 1 et 92 al. 1 LEDP;
selon l’art. 55 al. 1 LEDP, pour les élections se déroulant selon le mode de scrutin proportionnel, si une personne est portée candidate sur plus d’une liste, son nom est immédiatement éliminé de toutes les listes;
manifestement, de par son texte clair et sans ambiguïté, cette disposition ne s’applique qu’aux élections se déroulant selon le système proportionnel, quand bien même elle figure sous les dispositions communes (ch. 3.3.1) du chapitre portant sur les élections au Conseil des Etats et des autorités cantonales et communales (ch. 3.3.), soit aussi les élections au Conseil d’Etat (ch. 3.3.3);
[…]
à cet égard, la Cour de céans, confirmée par le Tribunal fédéral, a par ailleurs déjà eu l’occasion de constater qu’une alliance entre partis qui font figurer sur leur propre liste électorale les noms des candidats issus de leurs rangs ainsi que ceux de leurs alliés n’est pas interdite par la loi (arrêts TC FR 601 2011 152 du 20 décembre 2011; TF 1C_575/2011 du 27 mars 2012);
la constitution d’une alliance entre le Centre, le PLR et l’UDC, faisant figurer leurs cinq candidats sur chacune des trois listes, ne saurait ainsi, sur le principe, être remise en cause, tout comme d’ailleurs celle réalisée par les partis de gauche déjà lors du premier tour et renouvelée pour le second tour;
il est précisé qu’il ne s’agit en revanche nullement d’un apparentement, de toute manière expressément exclu lors des élections cantonales et communales (cf. art. 66 LEDP), puisque les suffrages des électeurs sont attribués uniquement aux candidats et non pas aux listes sur lesquelles ils apparaissent (cf. arrêt TF 1C_575/2011 du 27 mars 2012);
la question qui se pose dès lors est celle de savoir si une telle alliance peut n’être conclue qu’en vue du second tour, question non résolue dans l’arrêt précité dès lors que l’alliance de gauche, certes contestée à l’occasion du second tour, avait déjà été convenue pour le premier tour;
[…]
selon le Message no 227 du Conseil d’Etat du 26 avril 2000 accompagnant le projet de loi sur l’exercice des droits politiques (Bulletin des lois du Grand Conseil 2001, p. 3 ss), dans le cas des élections majoritaires, la possibilité reste offerte de changer de candidat entre les deux tours de scrutin. La solution est désormais la même pour toutes les élections à la majoritaire, tant au niveau cantonal (Conseil des Etats, Conseil d’Etat ou préfets) qu’au niveau communal (Conseil communal) (Message, ad art. 92, p. 14);
les dispositions susmentionnées qui ont pour objet le premier tour et le second tour des élections selon le système majoritaire, dont l’art. 91 LEDP invoqué par le recourant, ne portent que sur les candidats et candidates qui peuvent rester dans la course au second tour ainsi que sur les personnes qui peuvent cas échéant les remplacer et ceux et celles qui sont éliminés;
ces articles ne contiennent en revanche aucune précision sur les listes sur lesquelles ils figureront pour le second tour. Il sied ainsi de constater que ces dispositions n’excluent en particulier aucunement la confection de nouvelles listes ou de listes modifiées en vue du deuxième scrutin comportant un autre nombre de candidats, contrairement à ce que prétend le recourant;
en outre, selon la jurisprudence, les scrutins du premier et du deuxième tour selon le système majoritaire constituent des opérations électorales distinctes, indépendantes l’une de l’autre (cf. arrêt TF 1C_160/2021 du 27 septembre 2021 consid. 6.2);
[…]
partant, rien n’empêche, à défaut de disposition contraire dans la loi, que les partis concluent une alliance en vue du second tour, alors même qu’ils ne l’avaient pas fait au premier tour, constituent de nouvelles listes et présentent des candidats de remplacement, même en nombre plus important que ceux qui figuraient sur les listes du premier tour (cf. arrêt TF 1C_160/2021 du 27 septembre 2021);
dans le même ordre d’idées, rien n’empêche non plus que les candidats au second tour figurent sur plusieurs listes, dès lors que les candidatures multipliées ne sont interdites que dans le cadre du système proportionnel, comme déjà évoqué;
il y a de plus lieu de rappeler que, dans le cadre du système majoritaire dans lequel la personnalité des candidats tient une place importante, les électrices et les électeurs portent leur voix en priorité sur une personne à élire, avant d’opter pour un parti, l’intitulé d’une liste n’ayant pas nécessairement une importance déterminante à cet égard (cf. arrêt TF 1C_160/2021 du 27 septembre 2021 consid. 6.2 in fine);
enfin, la libre formation de l’opinion des citoyens et citoyennes, au sens de l’art 34 al. 2 de la Constitution fédérale du 18 avril 1999 (RS 101), n’est pas non plus entravée par un tel procédé et rien ne permet de retenir qu’il en résulterait une confusion, les citoyennes et citoyens restant en mesure d’identifier les candidats auxquels ils veulent offrir leur voix (cf. arrêt TC GE ACST/10/2021 du 23 mars 2021 consid 8e);
[…]
dans ces circonstances, force est d’en conclure que l’alliance conclue par la droite en vue du second tour de l’élection au Conseil d’Etat et la composition des listes no 1, 3 et 5 qui en résulte sont conformes à la LEDP et à l’art. 34 al. 2 Cst.;
Arrêt 601 2021 175 du 19 novembre 2021 de la 1re Cour administrative du Tribunal cantonal de Fribourg
Procédure administrative
Dépens à la charge de l’Etat du Valais
En date du 2 octobre 2020, le Département de la sécurité, des institutions et du sport (DSIS) a admis un recours contre une décision du Bureau de recouvrement et d’avances des pensions alimentaires (BRAPA). Le DSIS conclut que le BRAPA n’était pas habilité à réclamer le
remboursement des avances pour le recouvrement de contributions d’entretien, la fortune des personnes vivant en ménage commun ne pouvant pas être prise en compte selon l’interprétation du texte de loi applicable. A l’issue de sa décision, le DSIS alloue une indemnité de
1 000 francs pour les dépens de l’avocat de la recourante. Le DSIS rend ensuite une nouvelle décision et modifie les points relatifs à l’assistance judiciaire. L’avocat et sa cliente obtiennent gain de cause après avoir introduit un recours au Tribunal cantonal contre cette décision en invoquant la violation de leur droit d’être entendu et de la loi sur l’assistance judiciaire.
Etat de fait
Après son divorce, A. est condamné à verser des contributions à son épouse X. et à son fils. A. ne verse pas les contributions dues, obligeant X. à requérir une avance auprès du BRAPA. Le BRAPA reconsidère la situation de X. après avoir appris qu’elle vivait en ménage commun avec son père et conclut à la prise en compte de la fortune de ce dernier. Cette décision est annulée, mais l’affaire n’est pas close puisque le DSIS rend une nouvelle décision défavorable à X., la soumettant à une nouvelle obligation de remboursement des dépens. La cliente et son avocat réclament que l’assistance judiciaire soit déclarée sans objet, le montant des dépens devant être reconsidérés et mis à la charge du canton.
Extrait des considérants
[…]
2.2 Le droit d’être entendu garanti par l’article 29 al. 2 Cst. comprend notamment le droit pour l’intéressé de prendre connaissance du dossier, de s’exprimer sur les éléments pertinents avant qu’une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 146 IV 218 consid. 3.1.1; ATF 145 I 167 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 1C_202/2020 du 17 février 2021 consid. 3.1; ATF 143 V 71 consid. 4.1). De même, la jurisprudence a déduit du droit d’être entendu de l’article 29 alinéa 2 Cst. l’obligation pour l’autorité de motiver sa décision, afin que l’intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l’attaquer en connaissance de cause (ATF 142 I 135 - 6 - consid. 2.1). La motivation d’une décision est suffisante lorsque l’autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l’ont guidée et sur lesquels elle a fondé son raisonnement. L’autorité ne doit toutefois pas se prononcer sur tous les moyens des parties; elle peut se limiter aux questions décisives (ATF 142 II 154 consid. 4.2). En droit cantonal, aux termes de l’article 24 LPJA, lorsque la situation juridique d’une partie a été fixée par une décision, celle-ci ne doit pas être modifiée à son détriment, soit par l’autorité qui a pris la décision, soit par une autre autorité, sans que la possibilité ait été offerte à la partie de se déterminer sur les motifs invoqués. L’article 29 alinéa 3 1re phrase LPJA précise, en outre, que la décision écrite doit être motivée en fait et en droit. Enfin, l’autorité peut rectifier en tout temps les erreurs de rédaction, fautes de calcul ou autres inadvertances contenues dans sa décision, d’office ou à la demande écrite d’une partie (art. 64 al. 3 LPJA).
2.3 En l’espèce, la décision du 18 décembre 2020 a été envoyée aux parties sans aucune explication. Force est de constater qu’elle ne contient aucune motivation sur les raisons ayant conduit à l’annulation de la décision précédente, ni sur les modifications qu’elle contient. Elle n’indique pas non plus expressément que le prononcé précédent est remplacé par celui-ci. Ainsi, il n’est pas possible, sur la seule base du nouveau texte, de déterminer quels sont les motifs qui ont fondé le raisonnement de l’autorité.
En sus d’une absence de motivation sur les modifications qu’elle contient, la décision a également été prise au détriment de la recourante, en ce sens qu’elle modifie ses droits en ce qui concerne les dépens (cf. consid. 3.3 infra). Elle ne constitue dès lors pas, comme l’estime, à tort, le DSIS, une simple rectification d’une erreur de rédaction au sens de l’article 64 alinéa 3 LPJA. Dès lors, elle ne pouvait être prise sans permettre à celle-ci de se déterminer sur les motifs invoqués, conformément à l’article 24 LPJA précité. Pour ces seuls motifs déjà, la décision du 18 décembre 2020 viole le droit d’être entendue de la recourante et doit être annulée. Ce grief est donc admis. Par économie de procédure, la Cour de céans décide cependant, au lieu de renvoyer le dossier à l’autorité inférieure pour nouvelle décision, d’examiner le mérite des autres griefs soulevés.
3.1 Dans un second moyen, les recourants invoquent la violation des règles relatives à l’assistance judiciaire, notamment de l’article 122 alinéa 2 CPC, applicable aux causes de droit administratif par renvoi de l’article 81 LPJA. Selon eux, X. ayant obtenu gain de cause lors de son recours auprès du DSIS, ce dernier aurait dû lui octroyer des dépens et non une indemnité au titre de l’assistance judiciaire. Cette décision, qui expose la recourante à devoir rembourser la rémunération de son conseil lorsqu’elle sera revenue à meilleure fortune, a ainsi été prise à son détriment.
3.2 La loi du 11 février 2009 sur l’assistance judiciaire (LAJ; RS/VS 177.7) est applicable dans les causes administratives et en matière d’assurances sociales (LAJ, Titre 2). Son article 2 alinéa 1 prévoit qu’une personne a droit à l’assistance judiciaire si elle ne dispose pas de ressources suffisantes (let. a) et pour autant que sa cause ne paraisse pas dépourvue de toute chance de succès (let. b). Le bénéfice d’un conseil juridique commis d’office n’est de surcroît accordé que s’il est nécessaire à la défense des intérêts du requérant (art. 2 al. 2 LAJ). D’après la jurisprudence, un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre, et qu’elles ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu’une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s’y engager en raison des frais qu’elle s’exposerait à devoir supporter. Il ne l’est pas non plus lorsque les chances de succès et les risques d’échec s’équilibrent à peu près ou que les premières ne sont que légèrement inférieures aux secondes (ATF 138 III 217 consid. 2.2). La situation doit être appréciée à la date du dépôt de la requête (ATF 129 I 129 consid. 2.3.1) et sur la base d’un examen sommaire (ATF 142 III 138 consid. 5.1). L’article 8 alinéa 2 de cette même loi précise que, lorsque l’assisté obtient gain de cause, le conseil juridique commis d’office est rémunéré par la collectivité si les dépens ne peuvent être obtenus de la partie adverse, celle-ci se révélant insolvable. La formulation de cet article est similaire à celle de l’article 122 alinéa 2 CPC cité par les recourants et applicable par renvoi de l’article 7 LAJ et 81 alinéa 1 LPJA. Aux termes de l’article 10 alinéa 1 lettre a LAJ, sous réserve du droit fédéral, la collectivité tenue au financement exige de l’assisté le remboursement de ses prestations si la situation économique de ce dernier, ayant permis l’octroi de l’assistance judiciaire, s’est améliorée, notamment lorsqu’il acquiert des moyens suffisants à l’issue de la procédure. Sauf dans les cas dans lesquels l’article 88 alinéa 5 [LPJA] est applicable, l’autorité de recours allouera, sur requête, à la partie ayant entièrement ou partiellement gain de cause le remboursement des frais nécessaires qui lui ont été occasionnés (dépens) (art. 91 al. 1 LPJA).
3.3 En l’espère, le DSIS a entièrement admis le recours du 20 avril 2020 de X. qui a, dès lors, sur la base des dispositions précitées, obtenu gain de cause. Ayant expressément pris une conclusion en ce sens, elle avait ainsi droit à des dépens, fixés à plein tarif. Cette constatation aurait dû rendre sans objet sa requête d’assistance judiciaire et conduire à l’allocation de dépens, à charge de l’Etat du Valais, au sens des articles 91 alinéa 1 LPJA et 8 alinéa 2 LAJ. En prévoyant, dans sa nouvelle décision, que l’assistance judiciaire était accordée à la recourante et qu’une indemnité lui était allouée à ce titre, le DSIS n’a pas respecté les dispositions précitées. De plus, il a modifié les droits de la recourante. En effet, l’octroi de l’assistance judiciaire va de pair avec l’obligation de remboursement prévue à l’article 10 alinéa 1 lettre a LAJ en cas d’amélioration de la situation économique de l’assisté. Or, une telle obligation de remboursement n’existe pas en cas d’octroi de dépens au sens des articles 91 alinéa 1 LPJA et 8 alinéa 2 LAJ. Dès lors, en modifiant le dispositif de sa décision du 18 décembre 2020 pour y mentionner expressément, sous chiffre 4, «un montant de 1’000 fr. est alloué à Me M. au titre de l’assistance judiciaire», en lieu et place de la formulation du dispositif précédent qui indiquait expressément qu’«une indemnité de 1’000 fr. est allouée à X. pour ses dépens, à charge du service de l’action sociale», le DSIS a également soumis cette dernière à une nouvelle obligation de remboursement (art. 10 al. 1 LAJ). Partant, il a modifié la décision au détriment de la recourante et ne s’est pas contenté, comme il l’affirme, à tort, de corriger une simple erreur de rédaction au sens de l’article 64 alinéa 3 LPJA. […] Au vu de ce qui précède, le DSIS a effectivement violé les règles relatives à l’assistance judiciaire en matière de droit administratif. Ce grief est donc également admis.
4.2 Le tarif des dépens dans les causes civiles, pénales et administratives portées devant une autorité judiciaire ou administrative est déterminé par la loi fixant le tarif des frais et dépens devant les autorités judiciaires ou administratives du 11 février 2009 (LTar ; RS/VS 173.8). L’article 4 alinéa 3 LTar précise que les frais du conseil juridiquecomprennent les honoraires, calculés selon les articles 27ss de la loi, auxquels s’ajoutent les débours. Aux termes de l’article 27 alinéa 1 LTar, les honoraires sont fixés entre un minimum et un maximum prévus par la loi, d’après la nature et l’importance de la cause, ses difficultés, l’ampleur du travail, le temps utilement consacré par le conseil juridique et la situation financière de la partie. En matière de droit public, ils sont fixés d’après les règles des articles 37 ss LTar. Pour la procédure de recours administratif, les honoraires sont fixés entre 550 et 8800 fr. (art. 37 al. 2 LTar). Le dépôt d’une note de frais (décompte au sens de l’article 5 al. 2 LTar) n’a pas de portée obligatoire pour l’autorité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_162/2013 du 8 juillet 2013 consid. 3.2 ; ACDP A1 20 182 du 15 juin 2021 consid. 5.2.1 et ACDP A1 18 48 du 16 mars 2018 consid. d). Le juge qui s’écarte d’une note de frais doit cependant motiver sa décision (arrêt du Tribunal fédéral 4D_37/2018 du 5 avril 2019 consid. 4). La LTar consacre le principe de l’évaluation globale des dépens (art. 4 al. 1 et art. 27 al. 4 LTar). L’autorité dispose dans ce cadre d’un large pouvoir d’appréciation qu’elle doit néanmoins exercer dans les limites fixées par la loi (ATF 143 I 227 consid. 4.3.3). Cela signifie qu’elle n’est pas entièrement libre en la matière, la fixation des dépens impliquant «une appréciation consciencieuse des critères qui découlent de l’esprit et du but de la réglementation légale» (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2D_35/2016 du 21 avril 2017 consid. 6.2 et la jurisprudence citée). Ainsi, le montant des honoraires du conseil juridique doit être évalué sur la base d’une pondération de critères que cite l’article 27 alinéa 1 LTar, parmi lesquels figure le temps utilement consacré par ledit conseil juridique à la défense de la cause. Comme le permet la jurisprudence (ATF 141 I 124 consid. 4.3), la rémunération que prévoit la LTar est donc fixée sur la base d’un forfait et non en fonction d’un tarif horaire (RVJ 2012 p. 210 consid. 5.1, citée p. ex. in: ACDP A1 20 186 du 10 juin 2021 consid. 5.3.3 et A1 17 248 du 13 mai 2019 consid. 2.2.4). En l’absence de motifs particuliers prévus par la loi, elle doit demeurer dans les limites légales (cf. ACDP A1 17 248 précité consid. 2.2.4 et A1 15 112 du 20 novembre 2015 consid. 5.3, citant notamment l’arrêt du Tribunal fédéral 1C_53/2015 du 12 mai 2015 consid. 2.2).
Selon la jurisprudence, l’autorité de recours ou le juge n’est pas toujours tenu de motiver la décision par laquelle elle ou il fixe le montant des dépens alloués à une partie obtenant totalement ou partiellement gain de cause dans un procès. Il est admis de façon générale que l’autorité de recours ou le juge est en mesure de se rendre compte de la nature et de l’ampleur des opérations que le procès a nécessitées. Lorsqu’il existe un tarif ou une règle légale fixant des minima et maxima, la décision ne doit être motivée que si elle sort de ces limites, si des éléments extraordinaires sont invoqués par la partie concernée ou si l’autorité de recours ou le juge s’écarte d’une note de frais produite par l’intéressé et alloue une indemnité inférieure au montant habituel, en dépit d’une pratique bien définie (ATF 139 V 496 consid. 5.1 et arrêt du Tribunal fédéral 4D_37/2018 du 5 avril 2019 consid. 4).
4.3 En l’espèce, la première note de frais de Me M. relative à la procédure de recours administratif devant le DSIS a été produite en annexe au recours de droit administratif du 25 janvier 2021 auprès de la Cour de céans. Dès lors qu’elle n’avait pas été portée à sa connaissance, le DSIS ne pouvait donc pas tenir compte de ce document dans la fixation des dépens telle qu’effectuée dans les décisions du 2 octobre et du 18 décembre 2020. Ainsi, c’est à juste titre que l’autorité a fixé les dépens octroyés à X. sans tenir compte de la note d’honoraires. Cependant, c’est sur la base des principes valant dans le cadre d’une indemnisation du conseil juridique en vertu des dispositions en matière d’assistance judiciaire que le DSIS a arrêté le montant accordé à titre de dépens (cf. décision du 2 octobre 2020, consid. 3, page 7 et décision du 18 décembre 2020, consid. 3, page 7), notamment en se fondant sur l’article 30 alinéa 1 LTar, qui prévoit une indemnisation à hauteur de 70% des honoraires prévus dans la loi. Or, comme on l’a retenu ci-dessus (cf. consid. 3.3, supra), X. ayant obtenu entièrement gain de cause dans le cadre de son recours administratif, la demande d’assistance judiciaire aurait dû être déclarée sans objet et des dépens à plein tarif auraient dû lui être octroyés. Dès lors, ce ne sont pas des honoraires correspondant au 70% des honoraires prévus aux articles 31 à 40 LTar (cf. art. 31 al. 1 LTar) qui auraient dû être accordés, mais bien des honoraires correspondant au 100% de ces derniers (art. 27 al. 1 LTar). Ainsi, en soi, bien que l’allocation d’un montant de 1’000 fr. à titre de dépens respecte la fourchette visée par l’article 37 alinéa 1 LTar, l’indemnité a été fixée sur une base d’évaluation inapplicable en l’espèce. De plus, il n’existe dans le cas particulier, aucun motif justifiant d’allouer un montant ramené en dessous du minimum prévu dans la LTar (cf. art. 29 al. 2 et 3 LTar).
[…]
Arrêt A1 21 17 / A2 21 9 du 31 août 2021 de la Cour de droit public du Tribunal cantonal du Valais