Droit pénal
Déni de justice lors de l'examen de la libération conditionnelle
Un délai de sept mois, à compter du dépôt de l'expertise, avant que le Collège des juges d'application des peines ne rende son jugement est excessif et constitue un retard injustifié. Il entrave le droit du recourant interné à voir sa libération conditionnelle réexaminée chaque année.
Etat de fait
X. a été condamné à neuf reprises, de 1965 à 1993, pour attentat à la pudeur des enfants, infractions contre les mœurs et diverses atteintes au patrimoine. Par jugement du 11 janvier 1996, le Tribunal correctionnel du district de Lavaux l'a condamné pour lésions corporelles simples intentionnelles, abus de confiance, actes d'ordre sexuel avec des enfants et commis sur une personne incapable de discernement, à la peine de quatre ans de réclusion, sous déduction de 336 jours de détention préventive, peine partiellement complémentaire à celle prononcée le 16 septembre 1993 par le Tribunal de police de La Chaux-de-Fonds, a ordonné l'internement de X en raison de son état mental, dans un établissement approprié, et a suspendu au profit dudit internement la peine prononcée.
Par jugement du 15 août 2007, dans le cadre du réexamen des internements imposé par l'entrée en vigueur de la nouvelle partie générale du Code pénal le 1er janvier 2007, le Tribunal correctionnel d'arrondissement de l'Est vaudois a ordonné la poursuite de l'internement de X. Par arrêt du 16 octobre 2007, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal a confirmé ce jugement.
Le 5 juillet 2010, l'office d'exécution des peines (ci-après: OEP) a transmis au juge d'application des peines le dossier concernant l'examen de la libération conditionnelle de X. Ce dernier a été interné aux Etablissements de la plaine de l'Orbe (ci-après: EPO) depuis le 6 mars 1996. (...) Il a toutefois été transféré dans différents établissements pénitentiaires de 2003 à 2010. Il se trouve actuellement aux EPO, au secteur de responsabilisation.
La Commission interdisciplinaire consultative concernant les délinquants nécessitant une prise en charge psychiatrique (ci-après: CIC) a constaté, dans son avis des 19 et 20 avril 2010, que le comportement de X. était resté inchangé. (...) Elle a dès lors préavisé négativement à toute ouverture de son régime de détention.
En juin 2010, la direction des EPO a émis un préavis négatif quant à l'octroi de la libération conditionnelle, soulignant l'emprise négative de X. sur ses codétenus.
Dans son courrier du 5 juillet 2010, l'OEP a proposé de refuser la libération conditionnelle de X. (...)
A la requête du recourant, une nouvelle expertise a été ordonnée (...). Le rapport du Centre universitaire romand de médecine Légale (ci-après: Curml) a été déposé le 11 avril 2011. Le rapport a mis en évidence un trouble de la préférence sexuelle à type de pédophilie et un trouble grave de la personnalité de type mixte. L'expert a précisé que le trouble de la préférence sexuelle n'avait pas d'influence sur le comportement général de l'intéressé en milieu de détention, mais présentait un risque majeur de passage à l'acte délictueux en cas de libération (...).
L'expert a relevé un important risque de récidive (...). S'agissant d'une éventuelle libération conditionnelle, l'expert a retenu que le risque de récidive serait élevé et qu'aucune modalité particulière assortie à cette libération ne serait en mesure de diminuer ce risque. (...)
(...) Dans ses déterminations des 23 juin et 14 juillet 2011 et 4 janvier 2012, X. a conclu principalement à l'octroi de la libération conditionnelle, au motif que son internement ne répond plus aux principes prévus à l'art. 56 CP et, entre autres, aux principes de la proportionnalité et de la dignité humaine, subsidiairement à ce qu'il soit procédé aux démarches ad hoc pour qu'un changement de mesure puisse être entrepris, au bénéfice d'un traitement institutionnel (art. 59 CP) (P. 34, 36 et 46). Dans son courrier du 4 janvier 2012, il a également relevé la longueur de la procédure.
Par jugement du 24 janvier 2012, le collège des juges d'application des peines a refusé d'accorder à X. la libération conditionnelle de l'internement ordonné le 11 janvier 1996 par le Tribunal du district de Lavaux et a laissé les frais à la charge de l'Etat.
(...)
Le 6 février 2012, X. a recouru contre le jugement du 24 janvier 2012. Il a conclu à ce que le Collège des juges d'application des peines a tardé sans juste motif à rendre sa décision et à la réforme de la décision entreprise en ce sens que le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois soit saisi en vue d'examiner si les conditions d'un traitement thérapeutique institutionnel sont réunies.
Extrait des considérants
1. (...) (Procédure de recours)
2. Le recourant invoque le fait que le collège des juges d'application des peines a tardé sans juste motif à rendre sa décision dans le cadre de l'examen de la procédure de libération conditionnelle, le privant ainsi du droit à un examen annuel de la libération conditionnelle.
a) En vertu de l'art. 29 al. 1 Cst. (Constitution fédérale du 18 avril 1999; RS 101), toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. A l'instar de l'art. 6 1 CEDH (Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales; RS 0.101), qui n'offre pas à cet égard une protection plus étendue, cette disposition consacre le principe de la célérité, en ce sens qu'elle prohibe le retard injustifié à statuer; l'autorité viole cette garantie constitutionnelle lorsqu'elle ne rend pas une décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou dans le délai que la nature de l'affaire et les circonstances font apparaître comme raisonnables (ATF 135 I 265 c. 4.4; ATF 130 I 312 c. 5.1; TF 1B_219/2011, du 6 juillet 2011, c. 2.1).
b) Selon la jurisprudence, pour déterminer la durée du délai raisonnable, il y a lieu de se fonder sur des éléments objectifs. Doivent notamment être pris en compte le degré de complexité de l'affaire, l'enjeu que revêt le litige pour l'intéressé ainsi que le comportement de ce dernier et des autorités compétentes. L'attitude de l'intéressé s'apprécie avec moins de rigueur en procédure pénale et administrative qu'en procédure civile. Celui-ci doit néanmoins entreprendre ce qui est en son pouvoir pour que l'autorité fasse diligence, notamment en incitant celle-ci à accélérer la procédure ou en recourant pour retard injustifié. Par ailleurs, on ne saurait reprocher à l'autorité quelques temps morts, qui sont inévitables dans une procédure. Lorsque aucun d'eux n'est d'une durée vraiment choquante, c'est l'appréciation d'ensemble qui prévaut. Des périodes d'activité intense peuvent donc compenser le fait que le dossier a été laissé momentanément de côté en raison d'autres affaires. Le principe de la célérité peut être violé, même si les autorités pénales n'ont commis aucune faute. Celles-ci ne sauraient donc exciper des insuffisances de leur organisation judiciaire (ATF 130 IV 54 c. 3.3.3; ATF 130 I 312 c. 5.2; TF 6B_908/2009 du 3 novembre 2010, c. 3.1 non publié à l'ATF 136 IV 188).
c) Si un retard injustifié ou déni de justice est constaté, la violation des dispositions procédurales en question peut être réparée d'emblée par la constatation d'une violation du principe de célérité, une admission partielle du recours sur ce point et la mise à la charge de l'Etat des frais de justice (ATF 137 IV 118 c. 2.2; ATF 137 IV 92 c. 3.2.3).
d) L'art. 64b al. 1 CP dispose que l'autorité compétente examine au moins une fois par an si l'auteur peut être libéré conditionnellement de l'internement (lit. a) et au moins une fois tous les deux ans si les conditions d'un traitement thérapeutique institutionnelles sont réunies (lit. b).
e) En l'espèce, la procédure de réexamen a été ouverte le 6 juillet 2010 et le jugement n'a été rendu que le 24 janvier 2012. Le recourant ne se plaint toutefois pas de la durée générale de la procédure mais du temps écoulé entre le dépôt de l'expertise, le 11 avril 2011, et le jugement du 24 janvier 2012. En effet, il ressort du dossier qu'une audience était prévue le 14 septembre 2011 mais qu'elle a été annulée et reportée au 20 décembre 2010 en raison de problèmes de santé du recourant (P. 7, 12 et 22). En outre, le recourant a requis, le 19 novembre 2010, qu'une expertise soit mise en œuvre. Le juge d'application des peines n'est donc pas resté inactif.
Cela étant, à compter du dépôt de l'expertise le 11 avril 2011 et des déterminations des parties en juin et juillet 2011, sept mois se sont écoulés avant que le collège des juges ne rende son jugement. Bien qu'il s'agisse d'une affaire délicate, ce délai est excessif. Au demeurant, comme l'a souligné le recourant, il entrave son droit à voir sa libération conditionnelle réexaminée chaque année.
Par conséquent, il convient de constater le retard injustifié mis par le collège des juges d'application des peines pour rendre le jugement et d'en donner acte au recourant. Conformément à la jurisprudence (ATF 137 IV 118 déjà cité), le recours sera admis sur ce point, avec les conséquences y relatives quant aux frais.
(...)
4. Il résulte de ce qui précède que le recours doit être partiellement admis en raison du retard mis à statuer et rejeté pour le surplus. Les frais de la procédure de recours, constitués de l'émolument d'arrêt (art. 422 al. 1 CPP), par 1320 fr. (art. 20 al. 1 TFJP [tarif des frais judiciaires pénaux, RSV 312.03.1]), et des frais imputables à la défense d'office (art. 422 al. 1 et 2 lit. a CPP), fixés à 630 fr. plus la TVA par 50 fr. 40 soit un total de 680 fr. 40, seront donc laissés à la charge de l'Etat.
(Arrêt de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois du 21 février 2012, AP10.016358-GRV)
Droit des assurances sociales
Retrait d'un recours par téléphone
La question de savoir si un recours peut être valablement retiré par référence à un entretien téléphonique n'a pas lieu d'être examinée, dès lors que la recourante ne discute pas le fait que le délai légal de réclamation devant la commission n'a pas été respecté.
Etat de fait
Le 10 juillet 2009, la Commission du district de la Sarine pour l'aide et les soins à domicile (ci-après: la commission) a rendu une décision, par laquelle elle a accordé à S. une aide financière de 15 fr. par jour (soit 60% de l'indemnité forfaitaire complète). La prénommée a formé réclamation le 4 septembre 2009. Par décision du 5 octobre 2009, la commission a déclaré la réclamation irrecevable pour cause de tardiveté.
S. a déféré cette dernière décision au Tribunal cantonal fribourgeois, en concluant à son annulation et à l'octroi d'une indemnité forfaitaire complète (25 fr. par jour). A l'appui de son recours, elle exposait notamment que, en raison des féries judiciaires, sa réclamation n'était pas tardive.
Dans une lettre du 27 janvier 2010, le juge délégué à l'instruction a informé l'intéressée que son recours lui paraissait dépourvu de chances de succès et que le Tribunal cantonal pourrait donc être amené à le rejeter. Il l'a priée de lui communiquer si elle entendait maintenir son recours ou le retirer.
Par écriture du 10 février 2010, S. a déclaré persister dans ses conclusions. Par lettre du 17 septembre 2010, le juge délégué, faisant référence à un entretien téléphonique avec S. en date du 13 septembre 2010, a pris note de l'intention de la prénommée de retirer son recours. Il a précisé qu'il en attendait confirmation également par écrit. S. n'a pas répondu.
Par jugement du 24 septembre 2010, le Tribunal cantonal a classé la procédure et rayé la cause du rôle, au motif que celle-ci était devenue sans objet ensuite du retrait du recours. Dans ses considérants, le Tribunal cantonal a, subsidiairement, rejeté le recours sur le fond («Cela étant, si la recourante avait maintenu son recours, ce dernier aurait été rejeté car manifestement mal fondé.»)
S. interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement, dont elle requiert l'annulation. Elle conclut au renvoi de la cause au tribunal cantonal pour qu'il rende un nouveau jugement.
Extrait des considérants
(...)
3. La recourante reproche au premier juge d'avoir retenu, de manière arbitraire (art. 9 Cst.), qu'elle retirait son recours dirigé contre la décision de la commission du 5 octobre 2009 au sens de l'art. 94 CPJA. Elle fait valoir que le dossier cantonal ne contient aucune pièce susceptible d'établir qu'elle a exprimé sa volonté d'abandonner la procédure et que la seule référence à un entretien téléphonique ne constitue pas une preuve suffisante à cet égard. Elle se plaint, en outre, de la partialité du juge (cf. art. 30 Cst.). A ses yeux, la teneur des lettres des 27 janvier et 17 septembre 2010 montrait que celui-ci était guidé par une opinion préconçue. Enfin, elle estime qu'au regard des arguments circonstanciés qu'elle avait développés dans ses écritures, l'autorité cantonale n'était pas fondée à rendre un jugement selon la forme simplifiée de l'art. 99 CPJA.
4. En l'occurrence, le jugement attaqué comporte deux motivations. Le premier juge a tout d'abord pris acte du retrait du recours. Dans une motivation subsidiaire, il a également rejeté le recours au fond. Il a jugé qu'à teneur du texte de l'art. 30 al. 2 CPJA («Dans les affaires relevant du Tribunal cantonal [...]»), la suspension des délais du 15 juillet au 15 août s'appliquait uniquement aux litiges portés devant le tribunal cantonal en tant qu'autorité de recours et non pas à la procédure de réclamation devant la commission.
5. Selon la jurisprudence, lorsque la décision attaquée comporte plusieurs motivations indépendantes, alternatives ou subsidiaires, toutes suffisantes pour sceller le sort de la cause, le recourant doit, sous peine d'irrecevabilité, indiquer en quoi chacune d'elles est contraire au droit. En effet, s'il arrive à la conclusion que l'autorité précédente a déclaré à tort un recours irrecevable, le Tribunal fédéral peut renoncer à annuler la décision attaquée et examiner les motifs subsidiaires par lesquels l'action ou le recours a été rejeté au fond. L'art. 42 al. 2 LTF impose au recourant de développer, dans l'acte de recours, des griefs à l'encontre de chacune des motivations de la décision attaquée (ATF 133 IV 119 consid. 6.3 p. 121; FLORENCE AUBRY GIRARDIN, in Commentaire de la LTF, 2009, N° 32 ad art. 42 LTF; LAURENT MERZ, in Basler Kommentar, Bundesgerichtsgesetz, 2008, N° 73 ad art. 42 LTF).
6. Si la recourante discute les considérants où l'autorité cantonale prend acte de sa décision de renoncer à la procédure, elle n'expose en revanche aucune argumentation au sujet de la seconde motivation, qui se rapporte à la question du respect du délai légal de réclamation devant la commission. Au vu de la jurisprudence précitée, il n'y a donc pas lieu d'examiner le grief relatif à la première motivation du jugement attaqué (retrait du recours).
7. Quant au grief portant sur la partialité du juge délégué, il doit être rejeté. En effet, d'après la jurisprudence, l'instruction normale d'un recours comprend également la possibilité de proposer à la personne qui recourt le retrait de son acte lorsque des circonstances le justifient. Ce procédé, qui implique certes une appréciation sur les chances de succès du recours, ne constitue pas une prévention contre celle-ci. Il exprime simplement l'opinion que s'est forgée le juge délégué à l'instruction sur la base du dossier. Ce seul fait ne permet pas de conclure à une quelconque partialité, mais relève de l'administration de la justice selon le principe de l'économie de procédure, la recourante restant toujours libre de maintenir son recours (voir les arrêts 2A.346/1997 et 2A.590/1998 respectivement des 6 novembre 1997 et 20 janvier 1999).
8. L'art. 99 CPJA prévoit que l'autorité de recours peut motiver sommairement la décision par laquelle elle rejette un recours manifestement mal fondé ou admet un recours manifestement bien fondé. La recourante ne démontre toutefois pas en quoi le premier juge aurait appliqué arbitrairement cette disposition, puisque son recours ne contient aucun développement sur la question (au fond) du délai.
9. Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité.
(Arrêt du 12 janvier 2011 8C_884/2010 de la Ire Cour de droit social du Tribunal fédéral)
Droit international privé
Devoir de verser une caution
Qui n'a pas de domicile fixe en Suisse peut être tenu de verser une caution pour assurer le paiement des dépens, lorsque son domicile se trouve dans un Etat partie à la Convention de Lugano.
Etat de fait
Le ressortissant britannique X., domicilié en Grande-Bretagne, s'est vainement plaint, auprès du Tribunal de district de Zurich, de l'annulation des décisions de l'assemblée générale extraordinaire de la société Y. Le Tribunal cantonal zurichois a rejeté le recours élevé contre ce jugement. X effectue un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre cette dernière décision. Y a sollicité du TF que X. soit tenu de verser une caution pour assurer le paiement des dépens, puisqu'il ne possède pas de domicile en Suisse.
Extrait des considérants
(...) In Erwägung, dass das Bezirksgericht Zürich mit Urteil vom 9. Juli 2010 die Klage des Beschwerdeführers auf Ungültigerklärung der Beschlüsse der ausserordentlichen Generalversammlung der Beschwerdegegnerin vom 14. Februar 2007 und eventuell auf Verpflichtung der Beschwerdegegnerin zur Übergabe von 90 Namenaktien zum Bezugspreis von je Fr. 1000.- abwies; dass der Beschwerdeführer dieses Urteil beim Obergericht des Kantons Zürich anfocht, das mit Urteil vom 16. November 2011 dessen Berufung abwies und den erstinstanzlichen Entscheid bestätigte; dass der Beschwerdeführer den Entscheid des Obergerichts am 9. Januar 2012 mit Beschwerde in Zivilsachen beim Bundesgericht anfocht; dass der Beschwerdeführer den von ihm verlangten Gerichtskostenvorschuss von Fr. 7000.- am 26. Januar 2012 bezahlte;
dass die Beschwerdegegnerin mit Eingabe vom 26. Januar 2012 das Gesucht stellte, der Beschwerdeführer sei gestützt auf Art. 62 Abs. 2 BGG zur Sicherstellung einer allfällig geschuldeten Parteientschädigung zu verpflichten, weil er keinen Wohnsitz in der Schweiz habe;
dass der Beschwerdeführer mit Stellungnahme vom 10. Februar 2012 die Abweisung des Gesuchs um Sicherstellung beantragte; das der Beschwerdeführer unstreitig in Grossbritannien Wohnsitz hat;
dass eine Partei, die keinen festen Wohnsitz in der Schweiz hat, auf Begehren einer Gegenpartei zur Sicherstellung einer allfälligen Parteientschädigung verpflichtet werden kann (Art. 62 Abs. 2 BGG);
dass sich der Beschwerdeführer erfolglos auf das Schweizerisch-britische Abkommen über Zivilprozessrecht vom 3. Dezember 1937 (SR 0.274.183.671) beruft, da er gemäss dem einschlägigen Art. 3 Abs. 2 (lit. b) nur dann von der Sicherstellung hätte befreit werden können, wenn er nachgewiesen hätte, dass er im Gebiet der Schweiz unbewegliches oder anderes nicht ohne weiteres übertragbares Eigentum besitzt, das zur Deckung der Prozesskosten hinreicht, was er aber nicht getan hat; dass dem Beschwerdeführer sodann auch der Hinweis auf das Übereinkommen über die gerichtliche Zuständigkeit und die Anerkennung und Vollstreckung von Entscheidungen in Zivil- und Handelssachen vom 30. Oktober 2007 (SR 0.275.12; LugÜ) nicht weiter hilft, weil dieses Übereinkommen ausschliesslich Fragen der Zuständigkeit sowie der Anerkennung und Vollstreckung und nicht des Erkenntnisverfahrens im Urteilsstaat regelt und den Grundsatz der Gleichbehandlung von In- und Ausländern in Bezug auf die Sicherstellung deshalb bloss im Zusammenhang mit dem Vollstreckungsverfahren vorsieht (Art. 51 LugÜ; Hofmann/Kunz, in: Basler Kommentar, 2011, N 4 zu Art. 51 LugÜ); dass der Beschwerdeführer somit in Anwendung von Art. 62 Abs. 2 BGG zur Sicherstellung einer allfällig der Beschwerdegegnerin geschuldeten Parteientschädigung zu verpflichten ist; dass diese Parteientschädigung voraussichtlich den Betrag von Fr. 8000.- nicht überschreiten dürfte; verfügt die Präsidentin:
1. Das Sicherstellungsbegehren wird gutgeheissen und der Beschwerdeführer mit beiliegender Verfügung aufgefordert, bei der Bundesgerichtskasse als Sicherstellung einer allfälligen Parteientschädigung an die Beschwerdegegnerin bis zum 5. März 2012 den Betrag von Fr. 8000.- in bar zu hinterlegen; (...)
(Ordonnance judiciaire 4A_10/ 2012 de la 1re Cour de droit civil du Tribunal fédéral du 15 février 2012)
L'actualité des tribunaux fédéraux
Tribunal administratif fédéral
La Suisse ne répond pas d'un faux extrait du casier judiciaire
Un Turc déjà condamné ne peut rendre la Confédération responsable de ce que l'Office fédéral de la justice (OFJ) lui a faussement établi un extrait de casier judiciaire vierge dans le cadre de sa procédure de naturalisation. Sur la base de ce document incorrect, il avait été naturalisé sur les plans communal et cantonal. Mais sur le plan fédéral, la faute avait été découverte et la naturalisation refusée. L'homme exigea par la suite le remboursement des frais engagés jusqu'alors, soit 3100 fr. Le Tribunal administratif fédéral estime que la condition de l'illégalité manque pour qu'une responsabilité de la Suisse soit admise: l'intéressé lui-même pouvait reconnaître facilement l'erreur, et ne devait donc pas accorder crédit au faux renseignement de l'OFJ.
(A-793/2011 du 20.2.2012)
AXA doit modifier sa procédure de notification
La Fondation de prévoyance AXA ne doit plus adresser ouvertement les inscriptions à une caisse de retraite dans le cadre d'une distribution interne à l'employeur du moment. Le Tribunal administratif fédéral a approuvé une recommandation du Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence, selon laquelle AXA doit à l'avenir adresser les documents directement à la personne assurée. Le Tribunal constate que ces inscriptions comportent des données personnelles touchant à la situation de pension de l'assuré. Certes, les employeurs assument une position d'organe dans l'organisation de la caisse de pension. Ils n'ont cependant pas besoin de ces données pour remplir leur fonction.
(A-4467/2011 du 10.04.2011)
Délai de convocation trop court des personnes effectuant un service civil
Les personnes effectuant un service civil qui n'organisent pas elles-mêmes leur engagement doivent être convoquées au plus tard trois mois avant le début de leur affectation. Le Tribunal administratif fédéral a jugé que le délai de 30 jours seulement fixé par le Conseil fédéral pour les engagements ordinaires n'est pas conforme à la loi. La loi fédérale sur le service civil (LSC) autorise certes le Conseil fédéral à fixer des délais de convocation plus courts dans certains cas. Cela ne concerne cependant que les engagements de service civil visant à surmonter une catastrophe ou une situation critique, tout comme les engagements de courte durée, mais non les cas normaux.
(B_5589/2011 du 5.3.2012)
Espaces supplémentaires pour les chaises roulantes dans les nouveaux trains
Les CFF doivent équiper les nouveaux trains Intercity prévus d'un espace supplémentaire destiné aux chaises roulantes à l'extérieur du wagon-restaurant, estime le Tribunal administratif fédéral. D'après leurs plans, les futurs wagons à deux étages prévus pour les longues distances IC200 accueilleraient l'espace dévolu aux chaises roulantes ainsi que des toilettes accessibles par ces handicapés dans la zone de ravitaillement, au pont inférieur du wagon-restaurant. D'après les juges, les personnes en chaises roulantes seraient moins bien traitées que les autres voyageurs, s'ils devaient en principe voyager dans le secteur restauration. Cela conduirait à les défavoriser au sens de la loi fédérale sur l'élimination des inégalités frappant les personnes handicapées (Lhand). Il serait en revanche disproportionné, selon le Tribunal, de prévoir la construction difficilement réalisable d'un ascenseur dans le wagon-restaurant.
(A-1130/2011 du 5.3.2012)
Tribunal fédéral
Des capteurs solaires éblouissants ne sont pas nocifs
Le Tribunal fédéral a rejeté la plainte d'une propriétaire d'habitation qui était éblouie par moments par les capteurs solaires installés sur le toit de la maison voisine et qui exigeait, en conséquence, une correction de l'installation. Les capteurs solaires projettent certes un rayonnement lumineux chaque printemps et chaque automne sur le fonds voisin, qui passe en 90 minutes du balcon en façade au jardin. D'après la première Cour de droit public, cette réflexion lumineuse ne constitue pas une nuisance sujette à assainissement au sens de la loi fédérale sur la protection de l'environnement (LPE). La densité lumineuse est plus faible que le rayonnement solaire direct et l'être humain dispose de réflexes naturels de protection. Même sans protection, l'éblouissement ne dure ponctuellement que 15 minutes. On n'est donc pas en présence d'une atteinte importante à la santé. Il n'existait pas de mesures proportionnées susceptibles d'être prises pour réduire l'éblouissement.
(1C_177/2011 du 9.2.2012)
La TV alémanique n'a pas discriminé l'Association contre les usines d'animaux (Acusa)
La TV alémanique («Schweizer Fernsehen (SF)») n'a pas discriminé dans ses informations
l'Association contre les usines d'animaux. Le président de l'association Erwin Kessler avait saisi en 2008 et 2009 l'Autorité indépendante d'examen des plaintes en matière de radio-télévision (AIEP) en invoquant le fait qu'il était depuis des années systématiquement l'objet d'un boycott de la part de SF, ce que l'AIEP avait nié. D'après le Tribunal fédéral, il existe des motifs objectifs justifiant le relatif petit nombre d'informations concernant l'Acusa sur la TV alémanique. Certains comportements de SF peuvent toutefois, selon le TF, faire preuve d'une certaine animosité à l'égard de l'association.
(2C_408/2011 du 24.2.2012)
Pas de droit de recours pour les défenseurs des consommateurs
Les organisations de défense des consommateurs ne sont pas autorisées à exercer un droit de recours au Tribunal administratif fédéral s'agissant de décider s'il faut autoriser la vente de produits étrangers d'après le principe «Cassis de Dijon». Dans le cas jugé, la Fondation pour la protection des consommateurs avait critiqué le fait que l'information sur le produit figurant sur des bonbons à la crème allemands, autorisés en 2010 par l'Office fédéral de la santé publique, ne figurait pas dans la taille d'écriture prescrite par la législation suisse en matière de denrées alimentaires. D'après le Tribunal, l'intérêt au maintien du standard de fabrication helvétique constitue un intérêt public. Le droit de recourir suppose toutefois que l'intéressé fasse valoir ses propres intérêts. Les organisations de protection des consommateurs n'auraient la qualité pour agir que si la loi les y autorisait explicitement.
(C-465/2011 du 28.3.2012)
Surprise à propos de la levée des scellés
Le Tribunal fédéral ne veut pas décider en tant que première et unique instance de recours sur les très nombreux cas de levée des scellés, contrairement à ce que prévoit la loi (voir les arts. 248, 380 CPP et 80 LTF). Il n'est donc pas entré en matière sur un tel recours et a renvoyé la cause au Tribunal cantonal thurgovien, afin qu'il tranche la question. La première Cour de droit public a estimé que la procédure de levée des scellés constituait avant tout pour le législateur une procédure accélérée. Il n'a cependant pas pensé au fait que le Tribunal fédéral n'était pas équipé pour pouvoir passer en revue et traiter rapidement d'importantes quantités de données. Dans de telles extrémités, il convient de prévoir la voie normale avec deux instances de recours et de n'autoriser qu'ensuite la saisie du TF. A l'avenir, il convient d'adresser ces recours directement auprès du TF, qui transmettra ensuite ces cas particulièrement riches et variés. Il est surprenant que cette décision de portée importante ne soit pas publiée aux ATF.
(1B_595/2011 du 21.3.2012)
Parents musulmans amendés
Des parents musulmans bâlois ont été sanctionnés à bon droit d'une amende de 1400 fr., parce qu'ils n'avaient pas envoyé leurs deux filles suivre l'enseignement obligatoire mixte de natation destiné aux élèves du degré primaire. Le Tribunal fédéral renvoie dans sa décision à son jugement de principe de 2008, selon lequel le devoir de suivre le cours de natation ne porte pas atteinte au noyau central de la liberté religieuse et l'accomplissement des obligations scolaires tout comme l'intérêt à ce que la population musulmane s'intègre passent fondamentalement avant l'observation de prescriptions religieuses. Il n'existe pas de motif de changer cette jurisprudence, affirme le TF. En outre, la base légale prévoyant la fréquentation du cours de natation est suffisante.
(2C_666/2011 du 7.3.2012)
Arrêts destinés à publication
Droit public et droit administratif
Les villes peuvent mettre le coût des déchets abandonnés sur le domaine public (littering) à la charge des entreprises responsables de cette pollution (par exemple les restaurants «take away»). Mais ces coûts ne peuvent pas, comme l'a fait la ville de Berne, être mis à la charge de tous les propriétaires d'immeubles par le biais de la taxe de base pour l'élimination des déchets.
(2C_239/2011 du 21.2.2012)
Le Tribunal fédéral a annulé la décision de classement de la justice fribourgeoise dans l'affaire du policier qui avait tiré contre une voiture volée, tuant le passager de celle-ci. La Cour suprême critique une application prématurée du principe selon lequel «le doute profite à l'accusé». Il estime que, au stade de la décision de renvoi devant un tribunal, il faut au contraire appliquer le principe «in dubio pro duriore», (en cas de doute, il faut procéder à une mise en accusation), bien qu'il ne soit pas expressément prévu par la nouvelle procédure pénale.
(1B_687/2011 du 27.3.2012)
Le Tribunal fédéral a pour la première fois approuvé une planification communale pour l'implantation d'antennes de téléphonie mobile. Il s'agit en l'occurrence du plan de la commune bernoise de Urtenen-Schönbühl, selon lequel les installations doivent prendre place dans la mesure du possible dans les zones non destinées à l'habitat, puis dans les zones mixtes et, seulement en dernier lieu, dans les zones d'habitation. Les opérateurs de téléphonie mobile doivent démontrer qu'un lieu d'implantation en zone prioritaire n'entre pas en ligne de compte pour des raisons techniques, et rendre vraisemblable qu'il est impossible d'y louer ou d'y acheter un emplacement à des conditions acceptables.
(1C_449/2011 du 19.3.2012)
Droit civil
La notification de la commination de faillite ne place pas le destinataire dans une situation où il doit compter avec l'envoi de la convocation à l'audience de faillite, c'est pourquoi, en cas d'omission de la retirer, la notification fictive ne s'applique pas.
(5A_895/2011 du 6.3.2012)
La jurisprudence portant sur la notion de «cause non dépourvue de chance de succès» développée dans le cadre du droit à l'assistance judiciaire gratuite de l'art. 29 al. 3 Cst. est aussi valable pour l'interprétation de l'art.117 CPC, qui règle l'assistance judiciaire.
(5A_842/2011 du 24.2.2012)
Sur la base de l'art. 336 al. 2 lit. b CO, une entreprise a le droit de licencier pour des raisons économiques un employé assurant la représentation des travailleurs (en l'occurrence un ancien président de la commission du personnel du Tages-Anzeiger).
(4A_415/2011 du 19.3.2012)
La FIFA n'a pas le droit de menacer d'une interdiction illimitée d'exercer sa profession un joueur qui n'a pas respecté un accord l'obligeant à verser des dommages - intérêts. La sanction est contraire à l'ordre public, car une interdiction illimitée d'exercer sa profession représente une atteinte grave aux droits de la personnalité et méconnaît les limites fondamentales de tout lien à caractère contractuel.
(4A_558/2011 du 27.3.2012)
La requête de la réalisation des biens par voie de saisie (art. 117 LP) ne peut pas servir à faire constater l'illicéité de la publication du commandement de payer.
(5A_776/2011 du 15.3.2012)
Les parents d'un enfant tué dans un accident de la route peuvent rendre l'auteur de l'accident responsable du dommage résultant du choc qu'ils ont subi (par exemple la perte de gain due à l'incapacité de travail). Reste ouverte la question de savoir s'il faut établir un lien de causalité adéquate.
(4A_364/2011 du 7.2.2012)
Droit pénal
Si le jugement pénal n'est notifié ni par oral ni par écrit dans le dispositif, mais qu'il est communiqué directement avec les motivations, la déclaration d'appel doit être adressée dans un délai de 20 jours à la juridiction d'appel (art. 399 al. 3 CPP) et non dans le délai de 10 jours prévu pour annoncer l'appel au Tribunal de première instance (art. 399 al. 1).
(6B_816/2011 du 1.3.2012)
Droit des assurances sociales
Il est possible de descendre en dessous de la fourchette des frais de justice allant de 200 à 1000 fr. dans la procédure de recours concernant des prestations de l'AI (art. 69 al. 1bis de la LAI), à condition que cela puisse être justifié par une décision.
(9C_792/2011 du 21.2.2012)
Pendant la détention préventive, on ne peut prétendre aux indemnités journalières de l'assurance accidents. Il n'existe pas de raison valable de s'écarter de l'art. 21 al. 5 LPGA et de suspendre pour des motifs d'opportunité, comme dans le cas des rentes AI, le versement de ces indemnités seulement en cas de détention de plus de trois mois.
(8C_337/2011 du 28.2.2011)
Fixation des principes du calcul du droit aux prestations complémentaires (PC) en cas d'union libre avec un enfant commun, lorsque le demandeur des PC se charge de la garde de l'enfant et permet ainsi à sa partenaire d'acquérir un revenu.
(9C_614/2011 du 15.3.2012)
Les citoyens d'un pays de l'UE vivant en Suisse doivent également cotiser à l'AVS s'ils reçoivent une rente de vieillesse de leur pays d'origine.
(9C_533/2011 du15.3.2012)
Une décision de rente AI pour les gens du voyage ne doit pas être prise selon les mêmes critères que pour les sédentaires. En particulier, les opportunités de travailler doivent être examinées différemment. Appliquer les mêmes exigences en la matière aux gens du voyage qu'aux sédentaires revient à violer l'interdiction de toute discrimination.
(9C_540/2011 du 15.3.2012)
Derniers arrêts de Strasbourg
La Cour protège les fraudeurs fiscaux helvétiques de l'obligation de s'auto dénoncer
La Cour a accepté par 5 voix contre 2 la requête d'un homme d'affaires suisse, qui avait été puni d'une amende de 5000 fr. au total en 1994 pour n'avoir pas remis certaines pièces relatives à ses revenus et à sa fortune. Les documents exigés par les autorités fiscales vaudoises se référaient à l'année 1989-1990. Le Tribunal fédéral avait confirmé le 2 octobre 2003 les amendes résultant de la procédure fiscale (arrêt 2P.278/2002).
Même avant la conclusion des autorités fiscales vaudoises, l'Administration fiscale fédérale avait ouvert une enquête en 1999 pour soupçons de fraude fiscale. Bien que la procédure fiscale cantonale et la procédure fédérale qui y était liée aient été menées indépendamment l'une de l'autre conformément au droit suisse, elles étaient étroitement mêlées. Ce lien de connexité était si étroit aux yeux de la Cour de Strasbourg que les garanties de procès équitable fixées par la Convention (art. 6 CEDH) s'agissant du procès pénal devaient aussi être respectées dans la première procédure administrative.
La procédure vaudoise ne satisfaisait pas au standard établi par la Cour sous deux points de vue. Tout d'abord, le principe de l'égalité des armes dans le procès pénal avait été violé (art. 6 I CEDH), parce que le contribuable, du fait de son comportement peu coopérant, n'avait obtenu qu'un droit limité de consulter le dossier. D'un autre côté, la procédure cantonale a violé le droit du contribuable à ne pas s'autoincriminer. Les amendes avaient pour but de mettre l'homme d'affaires sous pression et de l'inciter à révéler des documents relatifs à ses revenus et à sa fortune. Il devait compter sur le fait que les informations résultant de ces documents permettraient d'utiliser contre lui des données relatives à des revenus non déclarés. La majorité de la Cour a évoqué à ce propos son arrêt N° 31827/96 «J. B. contre Suisse» du 3 mai 2011 (lire le résumé dans plaidoyer 3/2001).
La nouvelle juge suisse, Helen Keller, faisait partie de la majorité de la Cour. Le juge slovène et sa collègue irlandaise ont au contraire voté contre une violation de la convention. Ils ont réfuté l'application mécanique de garanties de droit pénal à la procédure de fraude fiscale. Le juge Zupanic a mis en garde contre l'ouverture de la boîte de Pandore, qui conduirait les contribuables de tous les Etats parties à la CEDH à formuler de multiples objections contre leur collaboration à la procédure d'imposition par le fisc. La juge Power-Forde a souligné une série d'incertitudes dans la jurisprudence actuelle de la Cour s'agissant de la protection contre le devoir de s'autoincriminer et de récolter des preuves dans ce cadre. Elle a mis en doute en particulier le critère de distinction utilisé jusqu'alors pour savoir si un moyen de preuve existe indépendamment de la volonté de la personne concernée et peut donc être soulevé (comme par exemple le taux d'alcool dans le sang, qui peut être prélevé au moyen d'une prise de sang après un accident). Elle a souhaité que la Grande Chambre vienne apporter de la clarté dans ce domaine. On ignore pour l'heure si elle traitera de ce cas.
La Suisse a réformé en 2008 la question du refus de répondre et de l'utilisation des moyens de preuve dans les procédures de soustraction fiscale (voir l'art. 183 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct, RS 642.11).
(Arrêt de la 5e Chambre N° 11663/04 «Chambaz contre Suisse» du 5 avril 2012)
L'absence de congé de paternité est une discrimination liée au sexe
Dans un arrêt de principe, la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l'homme a déclaré, par 16 voix contre une, qu'exclure les militaires masculins du congé parental était une discrimination. Cet arrêt concernait un père russe au bénéfice de la garde des enfants qui, contrairement aux femmes incorporées dans l'armée, n'avait aucun droit au congé parental (de trois ans en Russie).
La Cour a relevé que, s'agissant de cette importante question, d'autres Etats parties sont touchés, parce que leur ordre juridique prévoit des différences analogues entre les mères et les pères. Après une revue de droit comparé auprès de 33 Etats membres du Conseil de l'Europe, la Cour constate que la Suisse fait partie, dans le domaine tant civil que militaire, des Etats qui limitent le congé parental aux mères.
Certes, il ne découle de la convention aucun devoir des Etats membres de prévoir un congé parental payé. Mais, si un pays prévoit un tel congé (comme c'est le cas de la majorité des Etats du Conseil de l'Europe), il ne doit pas prévoir des différences discriminatoires (art. 14 en lien avec l'art. 8 CEDH). Le congé permet au parent qui en bénéficie de s'occuper à la maison d'un nouveau-né. De ce point de vue, le père et la mère sont, selon la Cour, dans une situation analogue. La différence doit reposer sur une justification objective et raisonnable. La Cour a refusé globalement les arguments invoqués par la Russie. Cela vaut notamment pour le rôle particulier de la femme dans l'éducation des enfants. Depuis les années 1980, la société européenne s'est fortement développée dans le sens d'une répartition égalitaire de la responsabilité en matière d'éducation des enfants. Dans le domaine civil, seule une petite minorité d'Etats parties à la CEDH limiterait encore le congé parental aux mères. L'exclusion du congé de paternité ne compense pas un inconvénient défavorisant les femmes, mais cimente bien au contraire les images traditionnelles des rôles entre les sexes. Cela ne fait pas qu'empêcher les pères de vivre leur vie de famille, mais limite aussi les chances des femmes de faire carrière.
Certes, la puissance et l'efficacité de l'armée peut justifier certaines limitations du congé de paternité des militaires. Une interdiction générale et automatique de congé parental pour tous les pères en uniforme va cependant trop loin et est discriminatoire.
(Arrêt de Grande Chambre N° 30078/06 «Konstantin Markin c. Russie» du 22 mars 2012)
En présence d'un concubinage, l'Etat doit s'en tenir à l'obligation de témoigner
Les Etats parties à la CEDH ne sont pas tenus de libérer des concubins de longue date de l'obligation de témoigner dans une enquête pénale, et de les traiter de la même manière que des couples mariés ou enregistrés. La Grande Chambre de la Cour a rejeté, dans un arrêt de principe, la requête d'une Néerlandaise, qui refusait de témoigner après un meurtre, parce qu'elle habitait depuis 18 ans avec le suspect et avait deux enfants de lui. Elle avait subi 13 jours d'emprisonnement dans le cadre de l'astreinte par corps.
(Arrêt de Grande Chambre N° 42857/05 «Van der Heijden c. Pays-Bas» du 3 avril 2012)
F. Z./S. Fr