Quatre. C’est le nombre de fois que le Tribunal fédéral (TF) a cassé un jugement ordonnant l’internement à vie. Autant de recours admis que de recours déposés1, le dernier arrêt datant du 26 février 20182.
Quatre. C’est aussi le nombre d’idées reçues sur l’internement à vie en général. Et il est indispensable de les démonter, sans lassitude aucune.
1 «Casser l’internement à vie, c’est violer la volonté populaire»
Le préambule de la Constitution fédérale (Cst.) rappelle l’état d’esprit du mouvement fondateur de la Confédération. Résolus à renouveler leur alliance pour renforcer en particulier la liberté, la démocratie et la paix dans un esprit de solidarité et d’ouverture au monde, le peuple et les cantons suisses ont arrêté un certain nombre de règles fondamentales. Celles-ci ont notamment pour but de permettre de vivre ensemble – malgré la diversité – dans le respect de l’autre et l’équité. Il en va de l’avenir des générations futures. Aussi, la force d’une communauté se mesure au bien-être du plus faible de ses membres.
Parmi les règles les plus générales figure le principe d’un Etat de droit. Le droit est la base et la limite de l’activité de l’Etat3. Et l’ordre juridique répond à une hiérarchie. La Confédération et les cantons respectent par exemple le droit international4. Il en résulte que le juge ne peut pas appliquer une loi fédérale qui violerait un droit fondamental consacré par une convention internationale5.
Dans sa brochure «La Suisse et le droit international», la Société suisse de droit international (SSDI) rappelle les grands principes y relatifs6. Tout d’abord, le droit international7 a un champ d’application large. Il règle d’abord le rapport entre les Etats mais également les droits et les obligations des individus dans certaines situations8. Le droit international est en outre de première importance pour les petits Etats. Si les grandes puissances peuvent défendre leurs intérêts via différentes pressions (économiques ou militaires), la Suisse et ses nationaux peuvent compter sur la primauté du droit sur la force en cas de litiges9. Malgré sa dimension extraterritoriale, le droit international public n’en demeure pas moins un droit national. En effet, aucun Etat ne peut être contraint par une règle sans y avoir au préalable consenti, de sorte qu’il fait entièrement sien les principes convenus10. Il en découle logiquement la primauté précitée. A cet égard, le droit international prime la loi et même la Constitution fédérale11. Les Etats sont effectivement tenus par leurs engagements internationaux, auxquels ils ne peuvent se soustraire en invoquant des institutions qui leur sont propres, sauf à violer le principe même d’un accord (pacta sunt servanda). Ne pas respecter ce principe serait un danger. La Suisse n’apparaîtrait plus comme un pays fiable12. Quant aux individus, les droits fondamentaux ne seraient plus garantis puisqu’ils seraient exposés à l’incertitude. C’est pourquoi, le droit suisse consacre la primauté du droit international sur le droit national.
Le 3 mai 2000, un comité d’initiative déposait auprès de la Chancellerie fédérale, sous la forme d’un projet rédigé de toutes pièces et muni de 194 390 signatures valables, l’initiative populaire «Internement à vie pour les délinquants sexuels ou violents jugés dangereux et non amendables»13.
Le 4 avril 2001, le Conseil fédéral recommandait le rejet de cette initiative sans lui opposer de contre-projet. La révision du Code pénal suisse (CP) en cours à l’époque prévoyait déjà toute une série d’innovations en vue d’améliorer la protection de la société contre les criminels dangereux.
Le 8 février 2004, le peuple et les cantons se sont prononcés en faveur de l’initiative populaire14, acceptant ainsi le nouvel art. 123a Cst. qui est entré en vigueur immédiatement.
Le texte actuel est le suivant. Si un délinquant sexuel ou violent est qualifié d’extrêmement dangereux et non amendable dans les expertises nécessaires au jugement, il est interné à vie en raison du risque élevé de récidive. Toute mise en liberté anticipée et tout congé sont exclus15. De nouvelles expertises ne sont effectuées que si de nouvelles connaissances scientifiques permettent d’établir que le délinquant peut être amendé et qu’il ne représente dès lors plus de danger pour la collectivité. L’autorité qui prononce la levée de l’internement au vu de ces expertises est responsable en cas de récidive16. Toute expertise concernant le délinquant est établie par au moins deux experts indépendants qui prennent en considération tous les éléments pertinents17.
Dans son arrêt du 26 février 2018, le Tribunal fédéral a cassé l’internement à vie prononcé en suivant ni plus ni moins que la volonté populaire.
Il a admis le recours au motif que les deux experts n’ont pas conclu à une inaccessibilité à vie à tout traitement18. Le texte de l’initiative populaire et, a fortiori, l’art. 123a Cst. prévoient expressément cette exigence. Aussi, l’arrêt est parfaitement compatible avec le choix exprimé lors de l’adoption de l’initiative.
Dans le cas d’espèce, le TF n’a pas examiné la compatibilité de l’internement à vie avec le droit international19 en raison de l’admission d’un autre grief20. Cela étant, s’il l’avait fait et constaté une incompatibilité21, l’internement à vie aurait été annulé. La décision se serait ainsi inscrite dans le prolongement de la volonté populaire originelle (soit celle fondant la Constitution fédérale) qui prime la volonté d’y inscrire l’internement à vie (soit celle exprimée lors de l’initiative). Pour cette raison, la décision aurait aussi respecté le vœux du souverain.
Dans ces conditions, il est faux d’affirmer que le TF ne respecte pas la volonté populaire: c’est le rejet du recours qui aurait été une violation.
2 «Fournir une prédiction à vie, la psychiatrie peut le faire»
Comme on l’a vu plus haut, la Constitution fédérale pose comme condition à l’internement à vie la concordance de deux expertises indépendantes.
Il s’agit ici d’expertises psychiatriques22. La question est de savoir si, sur le plan psychique, l’auteur est inamendable. L’auteur doit en effet être qualifié de durablement non amendable, dans la mesure où la thérapie semble, à longue échéance, vouée à l’échec23. Le TF a eu l’opportunité de rappeler que par «durablement non amendable» («dauerhaft nicht therapierbar»), il faut entendre un état lié à la personne de l’auteur, qui n’est pas susceptible de se modifier au cours de sa vie. Il a ainsi écarté l’opinion selon laquelle une impossibilité de traitement sur une période de vingt ans pouvait donner lieu à un internement à vie. Une telle limite temporelle ne trouve son fondement ni dans le texte de la loi, ni dans son sens et son but, ni dans les travaux préparatoires. Ainsi, seul celui qui est véritablement inaccessible à un traitement sa vie durant peut être interné à vie24.
Dans son arrêt du 26 février 2018, le TF a cassé l’internement à vie au motif qu’un des deux experts n’avait pas formulé de prédiction à vie25.
Le second expert n’a pas conclu que le condamné serait, pour des raisons structurelles étroitement et durablement liées à sa personnalité, véritablement inaccessible à un traitement sa vie durant. Il a certes relevé qu’il ne pouvait pas imaginer qu’à l’avenir le pronostic légal du condamné soit favorable, même s’il était possible de développer dans le futur des concepts de traitement adaptés au trouble de l’expertisé auxquels ce dernier répondrait, amenant une amélioration des traits de la personnalité. L’expert a toutefois précisé qu’en psychiatrie forensique, on ne pouvait pas poser de pronostics «à vie» relatifs à l’accessibilité au traitement, et qu’on ne pouvait pas le faire non plus en psychiatrie générale et, pour autant qu’il le savait, pas davantage dans les autres domaines de la médecine somatique. De plus, selon le même expert, l’état psychique et somatique de l’expertisé dans par exemple 20 ans n’est pas prévisible avec certitude, pas plus que les possibilités de traitement qui seraient à disposition en théorie et en pratique ou que les exigences juridiques relatives à une mesure de traitement, respectivement d’internement. En fin de compte, le législateur demandait à la psychiatrie forensique quelque chose à laquelle cette science n’était pas en mesure de répondre.
Il ne s’agit pas uniquement de considérations générales fondées sur la littérature mais bel et bien de l’avis du psychiatre mandaté dans le cas d’espèce, qui n’indique pas précisément l’échéance de son pronostic s’agissant du condamné. Dans ces conditions, l’expert n’a nullement émis un pronostic à vie concernant le condamné. La cour cantonale a par conséquent interprété l’expertise de manière extensive et lui a donné une portée qu’elle n’a pas, sauf à tomber dans l’arbitraire.
Faute d’avis convergents, il ne saurait être retenu comme établi une impossibilité de traitement à vie, de sorte que c’est en violation du droit fédéral qu’un internement à vie a été ordonné26.
Cela étant, l’honnêteté intellectuelle commande de reconnaître que la condition d’une prédiction à vie est susceptible d’être réalisée dans des conditions bien particulières. Une telle prédiction paraît d’autant plus concevable que l’espérance de vie est courte27. En présence d’un auteur à qui il ne reste qu’un nombre d’années très limité à vivre, il serait, sur le plan psychiatrique, possible d’exclure une accessibilité au traitement.
En définitive, il est faux d’affirmer que la psychiatrie peut fournir une prédiction à vie: il n’existe ainsi pas de perpétuité sur ordonnance.
3«Sans internement à vie, la sécurité publique n’est pas assurée»
A titre liminaire, il faut relever que l’argumentation en faveur de l’internement à vie n’a jamais fait appel à l’effet dissuasif de la mesure. A juste titre. Il faudrait en effet considérer l’individu si atteint qu’il soit définitivement inaccessible à tout traitement, mais qu’il soit quand même capable de contrôler son comportement pourtant structurellement influencé en profondeur par le trouble. La contradiction paraît sans conteste priver l’argument de toute portée.
Le droit des sanctions suisse est dualiste. Il comprend des peines et des mesures. Là où la peine sanctionne la culpabilité, les mesures préviennent un danger de récidive.
L’infraction d’assassinat prévoit la peine de prison à vie28. En règle générale, l’autorité compétente libère conditionnellement le détenu qui a subi les deux tiers de sa peine, mais au moins trois mois de détention, si son comportement durant l’exécution de la peine ne s’y oppose pas et s’il n’y a pas lieu de craindre qu’il ne commette de nouveaux crimes ou de nouveaux délits29. En cas de condamnation à vie, la libération conditionnelle peut intervenir au plus tôt après quinze ans et après dix ans dans des cas exceptionnels30. Si elle a refusé la libération conditionnelle, l’autorité compétente doit réexaminer sa décision au moins une fois par an31.
Le droit des mesures comprend notamment une mesure thérapeutique institutionnelle et l’internement ordinaire dont il convient de rappeler successivement le régime.
Lorsque l’auteur souffre d’un grave trouble mental, le juge peut ordonner un traitement institutionnel si l’auteur a commis un crime ou un délit en relation avec ce trouble et qu’il est à prévoir que cette mesure le détournera de nouvelles infractions en lien avec ce dernier32. Le traitement s’effectue dans un établissement fermé tant qu’il y a lieu de craindre que l’auteur ne s’enfuie ou ne commette de nouvelles infractions. Il peut aussi être effectué dans un établissement pénitentiaire dans la mesure où le traitement thérapeutique nécessaire est assuré par du personnel qualifié33. La privation de liberté entraînée par le traitement institutionnel ne peut en règle générale excéder cinq ans. Si les conditions d’une libération conditionnelle ne sont pas réunies après cinq ans et qu’il est à prévoir que le maintien de la mesure détournera l’auteur de nouveaux crimes ou de nouveaux délits en relation avec son trouble mental, le juge peut, à la requête de l’autorité d’exécution, ordonner la prolongation de la mesure de cinq ans au plus à chaque fois34.
Le juge ordonne l’internement si l’auteur a commis un assassinat, un meurtre, une lésion corporelle grave, un viol, un brigandage, une prise d’otage, un incendie, une mise en danger de la vie d’autrui ou une autre infraction passible d’une peine privative de liberté maximale de cinq ans au moins, par laquelle il a porté ou voulu porter gravement atteinte à l’intégrité physique, psychique ou sexuelle d’autrui. Il faut en outre que, en raison des caractéristiques de la personnalité de l’auteur, des circonstances dans lesquelles il a commis l’infraction et de son vécu, il est sérieusement à craindre qu’il ne commette d’autres infractions du même genre, ou si, en raison d’un grave trouble mental chronique ou récurrent en relation avec l’infraction, il est sérieusement à craindre que l’auteur ne commette d’autres infractions du même genre et que la mesure prévue à l’art. 59 CP semble vouée à l’échec35. L’auteur est libéré conditionnellement de l’internement dès qu’il est à prévoir qu’il se conduira correctement en liberté36, l’examen de la libération étant périodique37.
Un premier constat est que la Suisse connaît une véritable perpétuité. Le condamné peut être détenu jusqu’à la fin de ses jours. La seule exigence est qu’à partir d’une certaine durée, il soit procédé à un contrôle périodique.
Un second constat est que le condamné peut au besoin être retenu, jusqu’à ce qu’il ne présente plus de risque de récidive marqué, par le biais d’une mesure. La perpétuité n’est pas le seul mode de rétention à durée indéterminée. Que ce soit une mesure thérapeutique institutionnelle ou un internement ordinaire, la rétention peut être prolongée. L’exigence minimale est uniquement d’apprécier à nouveau le risque de récidive à intervalle régulier.
Dans ces conditions, il est faux d’affirmer que l’internement à vie est utile. Le droit des sanctions contient déjà des moyens de rétention suffisants pour garantir la sécurité. Et un réexamen de ceux-ci ne signifie pas qu’il y aura libération.
4«Exclure les victimes du débat judiciaire sur l’internement à vie, c’est injuste»
Le 20 novembre 1945 s’est ouvert le procès de Nuremberg. Robert H. Jackson, juge à la Cour Suprême des Etats-Unis, a été nommé procureur général, par le président américain Harry Truman, pour mettre sur pied un tribunal international. Dans son allocution initiale, le procureur général indique: «That four great nations, flushed with victory and stung with injury stay the hand of vengeance [mise en évidence par l’auteur] and voluntarily submit their captive enemies to the judgment of the law is one of the most significant tributes that Power has ever paid to Reason [mise en évidence par l’auteur]». Il appartenait donc de retenir la main de la vengeance pour livrer les accusés à une sanction digne de la Raison.
L’intervention symbolise parfaitement l’évolution qu’a connu le droit pénal38. D’une répression coïncidant avec la vengeance, c’est-à-dire une sanction de l’auteur d’une infraction imposée souverainement par la victime ou ses proches, le droit pénal était appelé à fonctionner selon un autre paradigme. Le droit de sanctionner a d’une part fait l’objet d’une monopolisation par l’Etat. D’autre part, il n’a plus été question de fixer la sanction proportionnellement à la souffrance de la victime. Comme on l’a vu plus haut, la peine est fonction de la faute: plus la faute est lourde, plus la peine est sévère. Quant à la mesure, elle dépend de la dangerosité imputée à l’auteur: tant que l’auteur présente un risque de récidive marqué, la sanction est maintenue. Soit le risque de récidive est susceptible d’être atténué à moyen terme et c’est une mesure thérapeutique qui doit être choisie. Soit un tel pronostic est exclu et c’est un internement ordinaire qui doit être ordonné. En d’autres termes, la souffrance engendrée n’est plus un étalon en matière de sanction.
C’est le début d’une longue tradition humaniste. Une sanction prononcée de manière définitive est illicite parce qu’excessivement attentatoire au noyau des droits de l’homme. Il en résulte un véritable droit fondamental à un contrôle périodique de la détention39 qu’on ne peut prétendre respecter en prévoyant un vague examen conditionnel, comme c’est le cas pour l’internement à vie. En effet, l’autorité compétente examine, d’office ou sur demande, si de nouvelles connaissances scientifiques pourraient permettre de traiter l’auteur de manière qu’il ne représente plus de danger pour la collectivité40. Un tel système n’assure pas, sinon en droit du moins en fait, qu’un contrôle interviendra. Il y a dès lors lieu d’oublier définitivement tout ce qui ressemble à des oubliettes.
L’exclusion de la vengeance au moment de sanctionner est en outre maintenue par le principe d’impartialité. Toute personne exerçant une fonction au sein d’une autorité pénale est en effet tenue de se récuser lorsqu’elle a un intérêt personnel dans l’affaire41. Le droit s’attache donc à priver de pouvoir tout individu susceptible de vouloir une équivalence entre la souffrance ressentie par la victime et celle infligée à l’auteur.
Dans une jurisprudence constante, le TF affirme qu’il n’appartient pas à la partie plaignante d’assouvir une «soif de vengeance»42. Dans cette optique, le législateur a privé la partie plaignante de pouvoir interjeter recours sur la question de la peine ou de la mesure prononcée43. Que la discussion de la sanction soit réservée au prévenu et au Ministère public est donc un parti pris par le législateur.
Dans ces conditions, il est faux d’affirmer que l’absence de la victime lors de la discussion de l’internement à vie est injuste. C’est au contraire le propre d’une justice ayant suivi l’évolution de la civilisation.
Conclusion
Les idées reçues proviennent parfois de sentiments d’une puissance telle que, bien que légitimes, ils égarent plus qu’ils ne rassemblent. Que l’on soit clair: il arrive que certaines personnes commettent des actes terribles engendrant une souffrance incommensurable. Et il s’impose d’y répondre au point de devoir, à certains moments, porter fortement atteinte aux droits fondamentaux de celles-ci. Ceci n’est pas remis en question.
Cela étant, souhaiter que la souffrance imposée par la sanction soit à la mesure de la souffrance produite par l’infraction revient à réinstaurer un processus de vengeance. Le droit pénal suisse est équipé de mécanismes supposés freiner cette tentation. Les périodes de crise mettent particulièrement ces mécanismes à rude épreuve. Il faut qu’ils tiennent bon, sauf à revenir à des âges sombres. Dans l’affaire dernièrement tranchée par le Tribunal fédéral, le dispositif des voies de recours fait partie des mécanismes en place.
La protection de la sécurité publique est un objectif cardinal en société. La vie de chacun mérite d’être garantie. Le législateur ne l’a pas oublié, puisqu’il a mis en place un droit des sanctions permettant un juste équilibre entre la sécurité des uns et les droits fondamentaux des autres, ce qui rend absolument inutile l’internement à vie. L’arrêt du Tribunal fédéral est une invitation à le constater.
Tant le droit que la psychiatrie connaissent des limites. Et quand le premier les ignore, il appartient à la seconde de proclamer les siennes. Sauf circonstances exceptionnelles, faire croire à la faisabilité d’une prédiction à vie relève d’une prétention dénuée de fondement. Cette position de principe trouve désormais sa place dans la jurisprudence du Tribunal fédéral.
Enfin, il s’impose, plus que jamais, de rappeler les fondements de la démocratie helvétique. La démocratie directe a de la valeur. Son aboutissement trouve cependant ses limites dans l’architecture globale de l’ordre juridique. Le droit international prime le droit national et même la Constitution fédérale. Ce principe ne découle pas de la victoire des élites sur le peuple, comme tentent de le faire croire les populistes44. Il tire son origine dans la nécessité d’avoir une Suisse forte, dans le souhait de voir les Suisses protégés, à l’étranger comme sur leur territoire, dans le désir commun de promouvoir la liberté, la démocratie et la paix. Avec l’espoir de vivre ensemble, ici avec ceux qui sont là et demain avec ceux qui viendront. Que le Tribunal fédéral puisse l’affirmer en cas de besoin constitue dès lors un dispositif qui protège moins l’intérêt d’un seul que celui de tous. y
*Dr en droit, chargé de cours aux Universités de Lausanne et de Fribourg, défenseur du recourant dans le cadre de l’arrêt du TF 6B_35/2017 du 26.2.2018.
1ATF 141 IV 423; ATF 140 IV 1; TF 6B_13/2014 du 3.6.2014.
2TF 6B_35/2017.
3Art. 5 al. 1 Cst.
4Art. 5 al. 4 Cst.
5ATF 125 II 425, 119 V 178 c. 4b, et les références; A. Auer, G. Malinverni, M. Hottelier, Droit constitutionnel suisse, vol. I, p. 653; A. Haefliger, F. Schürmann, Die Europäische Menschenrechtskonvention und die Schweiz, 2e éd., p. 41.
6Brochure disponible sur le site de la SSDI (http://www.svir-ssdi.ch, ci-après, Brochure).
7L’expression est comprise comme faisant référence au droit international public.
8Brochure, p. 3.
9Brochure, p. 3.
10Brochure, p. 4.
11Brochure, p. 6.
12Brochure, p. 7.
13FF 2000 3124.
14FF 2004 2045.
15Art. 123a al. 1 Cst.
16Art. 123a al. 2 Cst.
17Art. 123a al. 3 Cst.
18TF 6B_35/2017 c. 8.5.
19La compatibilité avec la dignité humaine (art. 3 CEDH), consacrée également à l’art. 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (Pacte ONU II), respectivement celle avec l’art. 5 § 1 et 4 CEDH.
20TF 6B_35/2017 c. 8.6.
21Cela aurait certainement été le cas au vu des rapports de 2012 et de 2016 du Comité européen pour la prévention de la torture et des traitements ou peines inhumains ou dégradants (CPT) faisant état de l’incompatibilité de l’internement à vie avec la CEDH, le CPT étant, comme la CrEDH, un organe du Conseil de l’Europe.
22ATF 140 IV 49, JT 2014 IV 281.
23Art. 64 al. 1bis CP.
24ATF 140 IV 1 c. 3.
25TF 6B_35/2017 c. 8.5.
26A noter que l’inexistence de deux expertises concordantes ressortait déjà lors des débats de première instance (L. Parein, Le premier jour d’un condamné, L’Hèbe, 2016, pp. 103 ss).
27M. Killias, A. Kuhn, N. Dongois, Précis de droit pénal général, 4e éd., N1530a;
Y. Jeanneret, A. Kuhn, L’internement à vie devant le Tribunal fédéral: l’indépendance et le courage de la Haute Cour à l’honneur, in: Jusletter du 16.12.2013, N21.
28Art. 112 CP.
29Art. 86 al. 1 CP.
30Art. 86 al. 5 CP.
31Art. 86 al. 3 CP.
32Art. 59 al. 1 CP.
33Art. 59 al. 3 CP.
34Art. 59 al. 4 CP.
35Art. 64 al. 1 CP.
36Art. 64a al. 1 CP.
37Art. 64b CP.
38L. Parein, Victimes et procès pénal: je t’aime, moi non plus? L’Hèbe, 2008.
39Par exemple CrEDH, «Vinter et autres c. Royaume-Uni» du 8.7.2013.
40Art. 64c al. 1 CP.
41Art. 56 let. a CPP.
42ATF 141 IV 1 c.1.1.
43Art. 382 al. 2 CPP.
44L. Parein, Dans les rouages du populisme pénal, plaidoyer 01/17.