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Plaidoyer 06/2018
29.11.2018
Dernière mise à jour:
04.12.2018
Suzanne Pasquier
Le thème de la grève à l’hôpital a tenu le devant de la scène à plusieurs reprises, ces derniers temps, quoique dans des contextes très différents. Au mois d’octobre, le Tribunal fédéral a annulé une disposition de la loi sur le personnel du canton de Fribourg (LPers-Fr), car elle soumettait l’ensemble du personnel de soins à une interdiction de faire la grève (TF 8C_80/2018). Au nom du...
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AbonnementLe thème de la grève à l’hôpital a tenu le devant de la scène à plusieurs reprises, ces derniers temps, quoique dans des contextes très différents. Au mois d’octobre, le Tribunal fédéral a annulé une disposition de la loi sur le personnel du canton de Fribourg (LPers-Fr), car elle soumettait l’ensemble du personnel de soins à une interdiction de faire la grève (TF 8C_80/2018). Au nom du principe de proportionnalité, il aurait fallu prévoir une exception pour les employés dont la présence n’est pas absolument nécessaire à la préservation de la santé des patients. Mais ce n’est pas pour revendiquer ce droit de grève qu’une partie du personnel de l’Hôpital fribourgeois avait débrayé, quelques mois plus tôt. Les employés en blouse blanche s’étaient opposés à un projet du Conseil d’Etat, qui visait à leur retirer leur statut de fonctionnaire. Le projet, qui touche également la LPers-Fr, est, pour l’heure, en suspend. Une chose est sûre: l’occasion a été donnée aux soignants de démontrer qu’ils pouvaient faire grève sans compromettre la santé des patients hospitalisés…
Le Tribunal fédéral aura de nouveau à traiter d’un cas de grève à l’hôpital, en l’occurrence celle qui avait touché l’établissement de La Providence, à Neuchâtel, peu avant sa reprise par le groupe Genolier Swiss Medical Network. Quatre syndicalistes condamnés par le tribunal cantonal neuchâtelois ont fait recours. Contrairement à l’affaire fribourgeoise, l’analyse portera sur un cas particulier, et non pas sur la conformité d’une loi cantonale à la Constitution fédérale. Mais le principe de proportionnalité sera de nouveau central. On s’en aperçoit à la lecture de la décision cantonale neuchâteloise attaquée (CPEN.2016.66). Là où le tribunal de première instance n’avait pas retenu la violation de domicile en raison des buts poursuivis par la grève, la seconde instance a accordé un poids prépondérant aux débordements occasionnés par les manifestants. Et pour l’autre chef d’accusation, la diffamation, les premiers juges ont admis les preuves libératoires pour la majeure partie des propos musclés des tracts, tandis que les seconds se sont montrés plus stricts dans leur appréciation.
Dans l’affaire neuchâteloise, ce n’est certes pas une loi cantonale qui est en cause, mais tout de même la convention collective de travail prévalant dans le secteur de la santé au niveau cantonal, la CCT santé 21. L’annonce de la résiliation de cette CCT par La Providence a été un élément déclencheur de la grève. Le tribunal de première instance en tient largement compte, tandis que la Cour cantonale n’y accorde que peu de poids, mettant en avant que la résiliation a été faite dans le respect des règles légales. Les aspects relevant de la logique contractuelle sont assurément plus faciles à appréhender que les contours du droit de grève.