Leur master en poche, certains poursuivent le cursus et s’engagent à rédiger une thèse de doctorat. Ce processus dure entre trois et six ans, en fonction du domaine d’étude, de la motivation et des activités du chercheur. «L’une des particularités de la thèse de droit est que, dans la plupart des cas, elle portera sur un sujet pour lequel il existe une pratique. La réflexion doctorale sera donc le fruit de sa prise en compte», commente Robert Danon, vice-doyen de la Faculté de droit de l’Université de Lausanne (UNIL).
L’UNIL estime qu’il est nécessaire de trouver au moins 1900 fr. par mois pour couvrir les besoins d’un doctorant vivant en Suisse. Logement, matériel de recherche, salaire, déplacements, formations complémentaires, etc. Pour faire face aux dépenses, les étudiants ont généralement trois possibilités: chercher un soutien financier, partager leur temps entre un travail rémunéré et la recherche académique ou participer au projet de recherche d’un professeur.
«L’assistanat et la rédaction de thèse en cours d’emploi sont les solutions les plus fréquemment privilégiées par les doctorants», estime Robert Danon. Selon lui, la première option est «très propice» au travail de recherche, puisque l’étudiant assiste son professeur superviseur et reste, par conséquent, dans son domaine d’étude. Soumise à un nombre limité de places et à la sélection de l’enseignant, cette voie n’est certes pas accessible à tous. A noter qu’il existe des plateformes qui recensent les opportunités disponibles au sein des universités suisses. Il s’agit par exemple de eth-gethired.ch ou http://myScience.ch. Seconde possibilité, trouver un travail annexe, dans une étude d’avocats, par exemple. «Cette option est plus stressante, mais elle a l’avantage d’enrichir les recherches doctorales par une expérience pratique», complète-t-il.
Foule d’institutions
Plus de 17 000 fondations, suisses et européennes, soutiennent la recherche. Bourses, formations ou encore couverture des frais. A chacune ses conditions et ses objectifs. Mais alors comment s’y retrouver dans cette jungle? Toutes les Universités romandes proposent des conseils, des adresses utiles et des collaborateurs pour répondre aux questions. Ensuite, il existe plusieurs bases de données numériques, comme www.stiftungschweiz.ch. Celle-ci en répertorie plus de 13 000. Ainsi, l’étudiant peut cibler ses requêtes de bourse à celles qui correspondent à son projet.
En Suisse, avec quelque
6700 demandes en 2015, la fondation la plus connue est le Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS). Son programme Doc.CH (SHS) soutient des thèses réalisées en Suisse, dans le domaine des sciences humaines et sociales, tel que le droit. Il permet de fournir un salaire aux chercheurs et payer les frais liés à la recherche (voir tableau). Des suppléments peuvent être alloués, notamment pour des publications numériques en libre accès. Mais également pour des séjours à l’étranger de six à douze mois, jusqu’à concurrence de 20 000 fr. Depuis son lancement en 2013, seuls huit étudiants en droit ont pu bénéficier de ces subsides. Pour y arriver, ils ont dû fournir un dossier d’admission contenant des dizaines de documents, tels qu’un plan de recherche et de carrière, un CV, deux lettres de soutien des superviseurs ainsi que leur propre dossier de candidature, etc. Et patienter jusqu’à cinq mois avant d’avoir une réponse.
Ceux qui désirent faire un séjour dans des institutions de recherche à l’étranger peuvent concourir au Doc.Mobility. Ce don prend en charge, sous forme de forfait, les frais directs liés au voyage. Le montant varie en fonction de l’état civil du boursier, de ses obligations familiales et du coût de la vie dans le pays hôte (voir tableau). Pour prétendre à ces fonds, les doctorants doivent avoir lancé leur projet depuis un an au moins. Il s’agit donc d’un financement partiel de la thèse. Les documents à soumettre sont donc moins nombreux et le temps d’attente abaissé à quatre mois environ.
Les doctorantes qui, pour des raisons familiales, ont dû interrompre ou diminuer leur temps de travail académique, pouvaient postuler à la bourse Marie Heim-Vögtlin. Elle attribue un salaire aux chercheuses et supporte également les frais de garde d’enfants et autres dépenses directement liées à la recherche. Mais, dès 2017, elle sera remplacée par un autre instrument nommé «PRIMA», dont les détails ne sont pas encore connus.
Projets scientifiques
Dernière possibilité pour les doctorants: travailler sur le projet d’un professeur. Selon le FNS, la plupart des doctorats sont financés par ce biais. Dans ce scénario, l’étudiant n’a que peu de choses, voire rien, à faire concernant la chasse aux mécènes, puisque c’est le superviseur en charge du dossier qui fait toutes les démarches. A ce titre, le FNS propose plusieurs programmes, mais le plus sollicité est l’encouragement de projet. Si celui de l’enseignant est accepté par le FNS, un capital lui sera attribué. Ensuite, c’est au superviseur de gérer son budget, et donc de choisir d’engager des doctorants.
La loi des sélections
Malgré la variété des moyens de financement à disposition des doctorants, cela ne signifie pas qu’ils sont facilement accordés.
En moyenne, l’UNIL a compté 37 demandes de bourses Doc.Mobility par an et un taux de réussite proche de 50%, toutes facultés confondues (y compris le CHUV). En revanche, le Doc.CH n’aboutit qu’à hauteur de 25%. «Cela est notamment dû à une croissance générale des demandes de bourses Doc.CH», explique Lorraine Davis, adjointe à la direction de l’UNIL. Sa collègue, Marie-Anne Berazategui, responsable du secrétariat de la Commission de recherche du FNS à l’Université de Genève, ajoute qu’une quarantaine seulement de subsides sont mis au concours par année. «Il s’agit d’un instrument d’excellence. Le profil des doctorants, leur notes et leur travail de master doivent donc être excellents», précise Yvonne Germann, collaboratrice administrative au FNS.
Selon Claire Arnold, collaboratrice au bureau de direction des subsides de l’UNIL, la meilleure solution est d’être engagé par l’Université: «L’autofinancement (bourse ou travail accessoire), n’est pas la meilleure option, car les dons attribués sont souvent faibles, de l’ordre de 5 000 à 25 000 fr.» Ce qui aurait pour effet, selon elle, de ralentir l’avancement de la thèse, puisque le doctorant doit l’interrompre pour rechercher des fonds: le risque d’abandon s’en trouve donc accru.