Le Tribunal fédéral devait se prononcer sur la mise en liberté d'un jeune homme de 22 ans, maintenu dans un établissement fermé pour avoir violé et tué une femme lorsqu'il avait 17 ans. Les sanctions du droit pénal des mineurs ne s'appliquent en effet pas aux plus de 22 ans. Mais la Haute Cour en a décidé autrement dans son arrêt 5A_607/ 2012 du 5 septembre 2012, acceptant que le jeune homme soit emmené dans le secteur de sécurité d'un établissement pénitentiaire.
C'était l'un des nombreux jugements proposés par les lecteurs de plaidoyer pour le concours de l'arrêt le plus désolant de l'année 2012. Parmi des décisions rendues dans différents domaines, il a été désigné comme le plus choquant par un jury composé de trois professeurs d'université: Roland Fankhauser, professeur de droit civil et de procédure civile à Bâle, Bernhard Rütsche, professeur de droit public et de philosophie du droit à Lucerne, et Christof Riedo, professeur de droit pénal et de procédure pénale à Fribourg.
A l'unanimité, le jury a considéré que, dans cette affaire, l'argumentation du TF était «clairement fausse d'un point de vue juridique». Allant à l'encontre de l'historique et de la lettre de l'art. 397a al. 2 CC, il a fait du risque de mise en danger d'autrui un motif de privation de liberté à des fins d'assistance (Plafa), en déclarant dans son jugement: «Celui qui menace la sécurité d'autrui a lui-même besoin de protection.»
La Plafa se trouve ainsi promu comme succédané de l'internement. Nos trois professeurs peuvent certes comprendre que, au vu des antécédents du jeune homme, le TF ait eu de la peine à lui rendre la liberté. Mais, d'un point de vue juridique, ils émettent une mise en garde: «Il ne faudrait pas généraliser cette argumentation et l'appliquer à d'autres cas de mise en danger de la vie d'autrui.» Roland Fankhauser suppose que c'est bien ainsi que l'entend le TF, vu que ce dernier écrit: «Cette interprétation doit être en tout cas admise dans le cas d'espèce, car le recourant représente encore un grand danger pour la vie et l'intégrité corporelle des tiers.»
Une deuxième raison de donner «la palme» à cet arrêt réside dans le choix de l'établissement d'exécution des peines. L'homme n'a pas été assigné dans un établissement, mais dans le secteur de sécurité d'une prison, où les possibilités de thérapie font parfois défaut. Le jury craint pourtant un risque limité de généralisation.
En 2e et 3e places
Pas de remboursement pour les économes
(Arrêt 4A-609/2011 du 13 février 2012)
Dans certaines caisses, un assuré au bénéfice d'une assurance complémentaire d'hospitalisation en demi-privé qui va volontairement dans une division commune reçoit une somme de 100 fr. pour chaque jour passé à l'hôpital. Le Tribunal fédéral fait maintenant une distinction pointilleuse que le jury ne peut accepter: cette somme n'est pas accordée à un assuré se rendant dans une clinique qui ne dispose que d'une division commune. Dans ce cas, l'homme n'avait pas le choix de sa section, motive le TF. De son côté, le jury pense que les juges n'ont pas été clairvoyants et n'ont pas examiné le but du versement, à savoir le fait de récompenser les assurés contribuant à réduire les coûts.
Temps de parole réduit pour l'avocate
(Arrêt 6B_726/2011 du 15 mars 2012)
Le Tribunal cantonal bernois a limité le temps de parole d'une avocate à 20 minutes. Le TF n'y a pas vu de violation du droit d'être entendu, car rien ne permettait de savoir ce qu'elle aurait avancé de plus avec un temps de parole supplémentaire. Roland Fankhauser estime que cette appréciation est juridiquement défendable, même si son application varie selon les cantons. Mais les défenseurs agissant surtout dans le cadre de l'assistance judiciaire ne doivent pas être mis encore davantage sous pression. Bernhard Rütsche critique ainsi le bref temps de parole: «Voilà un petit arrêt!» Et Christof Riedo de résumer ainsi l'impression du jury: «Le jugement exprime du mépris vis-à-vis du travail du défenseur.»