Droit constitutionnel et administratif
Le TF admet partiellement un recours dirigé contre les modifications de la loi cantonale sur la police, adoptées en octobre 2022 par le Grand Conseil lucernois. Il annule trois des cinq nouvelles dispositions adoptées, portant sur la recherche automatisée de véhicules et sur la surveillance du trafic, ainsi que sur le réseau de systèmes d’information de police de la Confédération et des cantons.
(1C_63/2023 du 17.10.2024)
La «pilule du lendemain» ne peut être délivrée qu’en pharmacie et après un entretien de conseil avec la pharmacienne ou le pharmacien. Le TF rejette les recours de la titulaire de l’autorisation de mise sur le marché, qui demandait que ses deux préparations soient classées dans une catégorie de médicaments qui permettrait une remise en droguerie après la délivrance d’un conseil spécialisé.
(2C_69/2023, 2C_72/2023 du 15.10.2024)
Droit civil
Le débiteur peut demander qu’une poursuite pour une dette réglée entre le dépôt de la réquisition de poursuite et la notification du commandement de payer ne soit pas portée à la connaissance de tiers. Cela n’est toutefois plus possible si le paiement est opéré après la notification du commandement de payer (ATF 147 III 486).
(5A_245/2024 du 29.8.2024)
Droit pénal
Contrairement à ce que pourrait laisser supposer la formulation isolée et inadéquate relative à la «durée relativement courte» d’un viol utilisée dans un précédent arrêt, la durée d’un viol ne peut en aucun cas être favorable à l’auteur dans le cadre de la fixation de la peine. En revanche, rien n’empêche de prendre en compte la durée de l’activité criminelle comme facteur aggravant propre à alourdir la peine. Le TF rejette le recours d’un homme qui avait été condamné à une peine privative de liberté de trois ans et demi ferme pour avoir violé une femme qui venait de quitter un bar et rentrait à son domicile, dans le canton du Valais. Après quelques minutes, la victime avait réussi à appeler à l’aide et l’auteur avait pris la fuite.
(6B_612/2024 du 18.9.2024)
L’art. 342 CPP prévoit que les débats peuvent être scindés en deux parties. Dans de tels cas, les débats doivent être répétés dans leur intégralité lorsque la composition du tribunal change dans l’intervalle, à moins que les parties y renoncent (art. 335 al. 2 CPP). En l’espèce, un prévenu avait été déclaré coupable de viol à l’issue d’une première audience devant le Tribunal cantonal thurgovien. Une année plus tard, après la seconde audience, la peine avait été fixée malgré l’absence d’un des juges qui avait siégé lors de la première audience. Le TF admet le recours du condamné et renvoie la cause au Tribunal cantonal.
(6B_460/2024, 6B_508/2024 du 13.9.2024)
Le TF se prononce sur la nouvelle disposition concernant la peine infligée aux délinquants primaires en cas de délits de chauffard, leur permettant d’éviter, à certaines conditions, qu’une peine privative de liberté leur soit infligée. Il confirme la peine pécuniaire avec sursis de 180 jours-amende prononcée par la Cour d’appel tessinoise à l’encontre d’un automobiliste qui a dépassé sur l’autoroute de 88 km/h la vitesse maximale de 100 km/h signalée. Contrairement à l’opinion du ministère public, l’application de la nouvelle disposition ne suppose pas de surcroît l’existence de circonstances particulièrement favorables.
(6B_1379/2023 du 11.9.2024)
Selon l’art. 263 al. 2 CPP, le séquestre est ordonné par voie d’ordonnance écrite. Il peut être ordonné oralement en cas d’urgence, mais l’ordre doit dans ce cas être confirmé par la suite par écrit. Cette exigence de confirmation écrite ultérieure constituait, dans le cas d’espèce portant sur la saisie de 175 plants de chanvre, une condition de validité du séquestre au sens de l’art. 141 al. 2 CPP. Les preuves obtenues à la suite de ce séquestre sont donc inexploitables (art. 141 al. 4 CPP).
(7B_455/2023 du 3.10.2024)
Dans une affaire zurichoise, un homme a été condamné à une amende pour infraction à l’ordonnance COVID-19 transport international de voyageurs. Représenté par son avocat, il a formé opposition contre l’ordonnance rendue. À la suite de l’annonce de la clôture de l’instruction, il a demandé une indemnité de 298 francs pour ses frais de défense. L’enquête pénale a été classée et les frais ont été pris en charge par l’État, mais aucune indemnité n’a été accordée. La Cour suprême a déclaré le recours formé contre cette décision irrecevable, faute de qualité pour recourir, au motif que l’homme avait déposé le recours en son nom.
Se fondant sur le nouvel art. 429 al. 3 CPP, les juges ont considéré que seul son avocat aurait eu qualité pour recourir. Selon le TF, l’instance inférieure a mal interprété cette disposition. L’art. 429 al. 3 CPP doit être interprété comme conférant une compétence supplémentaire au défenseur privé pour contester la décision relative à son indemnisation selon l’art. 429 al. 1 CPP, qui n’exclut pas la possibilité d’action du prévenu.
(7B_654/2024 du 1.10.2024)
Selon l’art. 19 al. 2 let. b CPP, la Confédération et les cantons peuvent prévoir qu’un juge unique statue en première instance sur les crimes et délits, à l’exception, notamment, de ceux pour lesquels le ministère public requiert une peine privative de liberté supérieure à deux ans. Le TF précise que les peines pécuniaires ne doivent pas être prises en compte dans cette limite. Il rejette le recours d’un délinquant condamné dans une affaire de stupéfiants bernoise à une peine de 23 mois d’emprisonnement avec sursis, assortie de 100 jours-amende et de six ans d’expulsion du territoire suisse.
(6B_1377/2023 du 4.9.2024)
Droit des assurances sociales
Le TF rejette le recours d’une conseillère nationale en lien avec l’extinction de son droit à l’allocation de maternité. Il rappelle que cette allocation ne peut pas continuer d’être perçue en cas de reprise du travail par la mère pendant la période de 14 semaines de droit à l’allocation que s’il s’agit d’une activité accessoire marginale avec un salaire maximal annuel de 2300 francs. Cette limite de 2300 francs ne constitue pas une «franchise» pour toute activité lucrative exercée durant la perception de l’allocation. Dans le cas d’espèce, il est établi qu’un mandat de conseillère nationale n’est pas une activité accessoire marginale compte tenu du revenu annuel ainsi obtenu.
(9C_290/2024 du 3.10.2024)
Les caisses-maladie ont le droit d’instaurer un premier point de contact (gatekeeper) dans le cadre de l’assurance obligatoire des soins lorsque la personne assurée a recours à des prestations médicales non coordonnées qui, sur la base d’évaluations faites par des experts, se révèlent dans l’ensemble comme étant un traitement inefficace, inapproprié et par conséquent non économique. Instaurer un gatekeeper est dans ce cas compatible avec le principe du libre choix du médecin et le système des prestations obligatoires.
(9C_340/2024 du 4.10.2024)