Droit constitutionnel et administratif
Seuls les véritables délinquants primaires en matière de circulation routière peuvent bénéficier de la règle selon laquelle la durée du retrait du permis de conduire prononcée à l’étranger ne peut être dépassée par les autorités suisses. Le TF confirme le retrait de permis de trois mois prononcé en Suisse à l’encontre d’une automobiliste argovienne pour un excès de vitesse de plus de 50 km/h, commis en Autriche. Les autorités autrichiennes avaient prononcé une interdiction de conduire de deux semaines. L’automobiliste figure dans le «système d’information relatif à l’admission à la circulation» pour un retrait de permis d’un mois datant de 2009.
(1C_653/2021 du 24.8.2022)
Dans le cadre des ententes illégales en matière de concurrence, la Commission de la concurrence a pris plusieurs mesures contre l’entreprise de construction Implenia Suisse SA. Elle lui a notamment imposé une interdiction concrète de négocier. Le TF rejette le recours d’Implenia. L’art. 30 al. 1 de la loi sur les cartels autorise également des mesures qui sont prononcées à titre préventif et pour l’avenir, du moins tant qu’elles visent à empêcher la répétition de la restriction à la concurrence constatée. Selon le TF, il existe en l’espèce un risque suffisant de récidive, et les mesures s’avèrent proportionnées du point de vue matériel, géographique, personnel et temporel.
(2C_782/2021 du 14.9.2022)
La détention administrative servant à assurer l’exécution de la procédure de renvoi, le régime d’exécution est allégé par rapport à celui de la détention provisoire ou de l’exécution des peines privatives de liberté. Des restrictions aux droits fondamentaux doivent être conformes au but de la détention et proportionnées. Les détenus doivent pouvoir entretenir des contacts sociaux tant à l’intérieur de l’établissement qu’avec le monde extérieur. Le régime de détention administrative appliqué à Moutier est trop sévère. Un enfermement de 18 heures par jour en cellule ou le refus de manière générale d’accès à internet constituent des mesures injustifiées. Il est par contre admissible de restreindre l’utilisation des téléphones portables privés.
(2C_765/2022 du 13.10.2022)
Droit civil
Le lapin en chocolat de Lindt & Sprüngli enveloppé dans une feuille d’aluminium (dorée ou d’une autre couleur) bénéficie de la protection des marques face au produit concurrent de Lidl. Lindt & Sprüngli a enregistré deux marques de forme tridimensionnelles pour son lapin. Sur la base des résultats très clairs des sondages d’opinion déposés par Lindt & Sprüngli, il a été établi que le lapin Lindt a acquis une notoriété générale auprès du public et que les marques de forme déposées se sont donc imposées sur le marché. Selon la jurisprudence du TF, un sondage qu’une partie à la procédure a mandaté elle-même est propre à servir de preuve, pour autant qu’il ait été scientifiquement conçu et réalisé selon une méthode appropriée. Lidl ne peut plus vendre son propre lapin en raison du risque de confusion et doit détruire les exemplaires encore en stock.
(4A_587/2021 du 30.8.2022)
La notion de «protection contre les congés» de l’art. 243 al. 2 let. c CPC vise tous les cas dans lesquels le tribunal doit se prononcer sur la fin du bail, que ce soit en raison d’un congé ordinaire ou extraordinaire, de l’expiration d’un contrat de bail de durée déterminée ou de l’exercice d’un droit d’option. Les litiges relatifs à l’annotation d’un bail au registre foncier relèvent de cette notion. Ils sont donc soumis à la procédure simplifiée, quelle que soit la valeur litigieuse, et ne peuvent être portés devant un tribunal de commerce.
(4A_199/2022 du 20.9.2022)
Droit pénal
Selon l’art. 337 al. 3 CPP, le ministère public est tenu de soutenir en personne l’accusation devant le tribunal (également en procédure d’appel) lorsqu’il requiert une peine privative de liberté de plus d’un an. À cet égard, c’est en principe la réquisition du ministère public faite dans la procédure de première instance qui est déterminante, et non le jugement rendu en première instance. Toutefois, si le prévenu ne risque pas de se voir infliger une peine privative de liberté de plus d’un an en appel parce que l’autorité de première instance n’a pas suivi la réquisition du ministère public et que seul le prévenu a fait appel, la dispense du ministère public de participer à l’audience d’appel doit être considérée comme conforme au procès équitable.
(6B_1188/2021 du 14.9.2022)
En cas de tentative d’instigation à un crime (art. 24 al. 2 CP), le lieu de commission de l’infraction se détermine selon l’art. 8 al. 2 CP. Le lieu de l’acte est celui où l’instigateur a agi, et le lieu de résultat est celui où la volonté de l’instingué devait être éveillée. Dans le cas d’espèce, des messages rédigés en Allemagne et adressés à une personne se trouvant en Suisse suffisaient donc à fonder la compétence territoriale du juge suisse.
(6B_1029/2021 du 24.8.2022)
En 2021, une femme avait pénétré sur le site d’une entreprise située sur la colline du Mormont (VD), qu’elle avait occupé avec d’autres militants. Elle a refusé de donner suite aux injonctions du tribunal et de la police de quitter les lieux. Lors de son arrestation, elle a refusé de décliner son identité. Le Ministère public vaudois a par la suite rendu une ordonnance pénale à son encontre, dans laquelle elle était désignée comme «Inconnue n° XXX» avec un alias, accompagné d’une description personnelle, ainsi que du numéro de son profil signalétique. Elle a été reconnue coupable de violation de domicile, d’empêchement d’accomplir un acte officiel et d’insoumission à une décision de l’autorité et a été condamnée à une peine privative de liberté de 60 jours, à une peine pécuniaire et à une amende. Le TF confirme la validité de l’ordonnance, dont les indications permettent d’individualiser l’intéressée sans ambiguïté.
(6B_1325/2021 et 6B_1348/2021 du 27.9.2022)
Droit des assurances sociales
Les valeurs standards appliquées dans le domaine «éducation et garde des enfants» pour déterminer la contribution d’assistance ne sont pas adéquates. Le TF admet partiellement le recours contre la décision du Tribunal des assurances sociales zurichois d’une femme élevant seule ses deux enfants, devenue paraplégique suite à un accident, qui avait demandé une telle contribution. Pour une personne qui requiert une assistance complète de tiers, le besoin maximal d’aide dans le domaine «éducation et garde des enfants» s’élève à bien davantage qu’aux 14 heures par semaine évaluées à l’aide de l’instrument d’enquête standardisé FAKT2.
(9C_538/2021 du 14.11.2022)
L’Hôpital universitaire de Bâle dispose de sa propre structure d’accueil extrafamilial. Les employés de l’hôpital qui recourent à cette offre de garde ou à celle d’une autre structure affiliée ont la possibilité de bénéficier d’une aide financière de l’hôpital pour les frais de garde, versée directement à la structure d’accueil. Selon le TF, ces contributions sont soumises à la cotisation AVS, faute de base légale spécifique permettant de les exempter. Les subventions d’accueil extrafamilial ne peuvent pas être considérées comme des allocations familiales exemptées de l’obligation de cotiser à l’AVS.
(9C_466/2021 du 17.10.2022)