Droit constitutionnel et administratif
Au vu de l’importance du bien de l’enfant, l’ordre de mise en détention administrative Dublin prononcé à l’égard de parents dont les enfants en bas âge ont simultanément fait l’objet d’un placement extrafamilial n’est admissible qu’en tant qu’ultima ratio et après examen approfondi de la possibilité de prendre des mesures moins incisives. Le TF admet le recours formé par un couple afghan, qui était entré illégalement en Suisse depuis la Norvège via l’Allemagne, en mai 2016, avec ses trois jeunes enfants. L’épouse était enceinte au moment d’entrer en Suisse. La requête d’asile de la famille a été suivie d’une décision de non-entrée en matière. Dans l’attente de leur renvoi en Norvège, les membres de la famille ont été placés en détention dans différents endroits, et il leur a été interdit d’entretenir des contacts téléphoniques au début de la détention.
(2C_1052/2016 et 2C_1053/2016 du 26.4.2017)
Des soumissionnaires étatiques peuvent être exclus de procédures d’adjudication de marchés publics lorsque leur offre viole le principe de la neutralité concurrentielle. C’est le cas lorsque l’offre du soumissionnaire étatique repose sur un subventionnement croisé prohibé permettant de couvrir de manière inadmissible un déficit au moyen d’impôts ou de revenus provenant d’un monopole. Le TF confirme la décision du Tribunal administratif fédéral selon laquelle l’Office fédéral de la communication doit examiner le respect de la neutralité concurrentielle d’une offre de l’Université de Zurich.
(2C_582/2016 du 22.5.2017)
La Finma doit supprimer de la Watchlist «garantie d’une activité irréprochable» une fiche relative à un ancien manager de UBS. Le fait d’être inscrit dans la Watchlist compromet les chances de l’employé de retrouver un emploi dans le domaine financier, alors même qu’il n’a pas fait l’objet d’une procédure administrative, avec les droits de partie qui en découlent. L’atteinte aux droits de l’employé doit être considérée comme grave et doit reposer sur une base légale au sens formel. L’art. 23 LFinma ne permet pas à la Finma de conserver des données sur la base de simples soupçons. Les informations doivent, au contraire, provenir de données récoltées dans le cadre d’une procédure dans laquelle la personne a les droits de partie ou d’autres sources sûres comme les audits internes ou externes ou des évaluations de personnel.
(1C_214/2016 du 22.3.2017)
Plusieurs habitants de la commune de Cazis, dans les Grisons, ont formé opposition contre la mesure communale de fermer la déchetterie pour ordures ménagères de la localité de Portein. La commune n’en a pas tenu compte, considérant que la mesure constitue un simple acte matériel, et non une décision sujette à opposition. N’entrent dans la notion de «cause», au sens de l’art. 29a Cst., que les décisions administratives qui portent atteinte à des intérêts juridiques dignes de protection. En l’espèce, l’art. 31b al. 3 LPE, en lien avec l’art. 12 de la loi communale de Cazis sur les déchets, impose aux détenteurs d’ordures ménagères de s’en débarrasser dans les déchetteries prévues à cet effet par la commune. La fermeture affecterait ce devoir, puisqu’elle imposerait aux habitants de se débarrasser de leurs ordures auprès d’autres déchetteries de la commune, nettement plus éloignées. Portant atteinte à leur situation juridique, elle constitue une décision attaquable.
(1C_517/2016 du 12.4.2017)
Droit civil
Si le débirentier diminue son revenu de manière malveillante, une réduction de la contribution d’entretien à son (ex-)conjoint est exclue, même si la perte de gain est irrémédiable. Le TF admet le recours d’une femme dont le conjoint avait quitté sa place de travail pour lui nuire. La jurisprudence selon laquelle on ne peut imputer un revenu hypothétique à un époux qui a réduit son revenu dans un dessein de nuire que si celui-ci peut remédier à la diminution de sa capacité financière, ne peut être maintenue.
(5A_297/2016 du 2.5.2017)
Les règles sur l’assistance judiciaire gratuite visent les personnes physiques. Les personnes morales ne peuvent, en principe, prétendre ni à l’assistance judiciaire gratuite ni à l’assistance gratuite d’un défenseur. Elles ne peuvent être «indigentes» ou «nécessiteuses», mais uniquement solvables ou surendettées, avec les conséquences de droit des sociétés et des faillites qui en découlent. Une personne morale ne peut avoir de prétention à l’assistance que si son unique actif est en cause et que les personnes impliquées économiquement sont sans ressources. L’assistance judiciaire gratuite doit toutefois lui être refusée, même lorsqu’elle remplit ces conditions, quand son existence ne repose pas sur la procédure en cause.
(4A_75/2017 du 22.5.2017)
La décision de faire admettre une personne sans son consentement dans une clinique pour traiter ses troubles psychiques avec prescription de soins médicaux d’une durée indéterminée et administration de médicaments sans son consentement (432 CC) constitue une mesure de contrainte qui revêt toutes les caractéristiques d’une décision. Une décision de la justice zurichoise de ne pas entrer en matière sur une demande d’annulation d’un tel traitement viole par conséquent le droit fédéral.
(5A_255/2017 du 18.5.2017)
Droit pénal
Un médecin-conseil à qui un employeur a fait appel est soumis au secret professionnel protégé par le droit pénal s’agissant de l’information sur le résultat de l’enquête concernant un travailleur. Sans autre autorisation du travailleur, le médecin-conseil peut s’exprimer uniquement sur l’existence, la durée et le degré de l’incapacité de travail, comme sur la question de savoir s’il s’agit d’une maladie ou d’un accident. Le TF confirme la condamnation à une peine pécuniaire avec sursis d’un médecin qui a également annoncé à l’employeur son diagnostic et d’autres détails sur le travailleur concerné.
(6B_1199/2016 du 4.5.2017)
Une cour d’appel est tenue de veiller à l’obtention licite des preuves, non seulement sur demande d’une partie mais aussi d’office. Il s’agira, dans ce cadre, d’examiner si le prévenu, aux conditions des art. 389 al. 2 et 343 al. 3, en lien avec l’art. 405 CPC, doit être à nouveau entendu d’office. Le fait qu’un prévenu ait déjà été interrogé en première instance sur les faits de la cause et sur sa situation personnelle ne rend pas superflue son audition dans le cadre d’une procédure orale de recours. L’art. 341 al. 3 CO garantit, au titre du droit d’être entendu, le droit de participation, indissociable de la personnalité, et évite que le prévenu soit traité comme un simple objet par l’Etat.
(6B_803/2015 du 26.4.2017)
Droit des assurances sociales
Les enfants ayant leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse qui sont nés invalides à l’étranger et dont la mère y a séjourné au maximum deux mois immédiatement avant l’accouchement ont droit à des prestations de l’assurance invalidité. En l’espèce, une Libanaise était domiciliée en Suisse depuis 2013, mais avait quitté la Suisse le 5 mars 2015, était arrivée au Liban le lendemain et y avait accouché le 7 mai 2015. L’enfant, revenu par la suite avec sa mère en Suisse, n’a pas droit aux prestations, sa mère étant restée un jour de trop à l’étranger. En outre, pour le calcul du délai, seule est déterminante la date effective de la naissance de l’enfant, et non la date d’accouchement prévue.
(9C_56/2017 du 23.5.2017)