Droit constitutionnel et administratif
La limite de la peine privative de liberté de 6 mois qui peut être ordonnée par le Ministère public par le biais d’une ordonnance pénale ne comprend pas l’amende, qui peut ainsi être infligée en sus conformément à l’art. 352 al. 3 CPP. Lorsqu’une peine pécuniaire ou une peine privative de liberté prononcée par ordonnance pénale est assortie du sursis, le Ministère public peut prononcer une amende additionnelle en application des art. 352 al. 3, 2ème phrase CPP et 42 al. 4 CP, indépendamment de la commission d’une contravention. En l’espèce, le Ministère public du canton de Schwytz avait condamné un automobiliste à une peine pécuniaire de 180 jours-amende avec sursis ainsi qu’à une amende pour infraction grave aux règles de circulation routière. Le Tribunal cantonal avait prononcé à tort la nullité de l’ordonnance pénale, en considérant que la peine infligée excédait les limites fixées par l’art. 352 CPP.
(1B_103/2019 du 10.1.2020)
Une fouille corporelle avec déshabillage complet et obligation de s’accroupir pour que la région anale soit visible pour les agents de police n’est autorisée que s’il existe des indices concrets de dangerosité. Si tel n’est pas le cas, elle est contraire au principe de proportionnalité et, ainsi, illicite. Plusieurs facteurs doivent être pris en compte, dont le comportement de la personne concernée et l’infraction qu’elle est accusée d’avoir commise.
(1B_115/2019 du 18.12.2019)
Lors de l’examen de l’intégration des candidats à la naturalisation, les autorités compétentes peuvent certes accorder un certain poids propre à chacun des critères à prendre en compte, mais il est inadmissible de se concentrer sur un seul critère, lorsque celui-ci n’est pas assez important pour être en lui-même déterminant. Le TF enjoint à l’autorité de naturalisation d’Arth (SZ) d’octroyer le droit de cité communal à un entrepreneur italien qui vit en Suisse depuis 30 ans. Ses lacunes mineures supposées en matière de connaissances géographiques et culturelles sont compensées par les autres critères, qu’il remplit tous.
(1D_1/2019 du 18.12.2019)
Droit civil
Dans le cadre d’une procédure de conciliation devant le juge de paix, l’avocat du défendeur a annoncé que ni lui ni son client n’assisteraient à l’audience. Par conséquent, l’avocat du demandeur a requis, avec succès, que son client et lui soient dispensés de participer à la procédure de conciliation et que soit délivrée, sans audience, l’autorisation de procéder. Par la suite, la justice argovienne a refusé d’entrer en matière sur l’action du demandeur. A juste titre selon le TF: si le défendeur déclare à l’avance qu’il ne participera pas à l’audience de conciliation, l’autorité de conciliation doit s’en tenir aux délais fixés et informer les parties de l’obligation de comparaître. Une dispense du plaignant n’est pas admissible. Ce dernier doit assister à l’audience, ne serait-ce que pour obtenir l’autorisation de procéder.
(4A_416/2019 du 5.2.2020)
Droit pénal
La propagation de propos diffamatoires, au sens de l’art. 173 ch. 1 al. 2 CP, constitue un délit à part entière. L’activation dans Facebook des boutons «j’aime» et/ou «partager» peut améliorer la visibilité et, partant, contribuer à la diffusion au sein du réseau social du contenu concerné. La réalité d’une telle propagation doit toutefois être appréciée au cas par cas, le délit n’étant consommé qu’une fois que le reproche propagé est devenu visible et a été perçu par un tiers. En l’espèce, c’est à raison que le Tribunal cantonal zurichois a condamné un internaute dont les contenus qu’il avait « likés » et partagés avaient atteint des personnes ne faisant pas partie du cercle des abonnés de l’auteur initial. Le TF renvoie toutefois la cause au Tribunal cantonal, pour qu’il réexamine si les propos propagés sont bien diffamatoires.
(6B_1114/2018 du 29.1.2020)
Le but de l’art. 179ter CP, qui vise l’enregistrement non autorisé de conversations, est de permettre à un individu de s’exprimer verbalement en toute liberté, sans craindre que ses propos ne soient enregistrés contre sa volonté et que des paroles prononcées sans arrière-pensée se trouvent ainsi abusivement perpétuées. Il importe donc peu de savoir si les propos tenus se rapportent au domaine secret ou privé et en quelle qualité les interlocuteurs s’expriment. Le TF confirme une condamnation pénale prononcée par la Cour de justice genevoise suite à l’enregistrement non autorisé de conversations téléphoniques menées avec un fonctionnaire de police, qui doivent être qualifiées de «non publiques».
(6B_943/2019 du 7.2.2020)
Si l’auteur d’une infraction avait moins de 25 ans au moment de sa commission et qu’il souffre de graves troubles du développement de la personnalité, le juge peut, à certaines conditions, ordonner son placement dans un établissement pour jeunes adultes (art. 61 CP). La privation de liberté entraînée par l’exécution de la mesure ne peut excéder quatre ans (art. 61 al. 4 CP). Dans un arrêt de principe, le TF précise qu’en cas d’exécution anticipée de la mesure, la durée doit être calculée à partir du début de son exécution.
(6B_95/2020 du 20.2.2020)
Droit des assurances sociales
Selon l’art. 24 de la Convention de Genève sur les réfugiés, que la Suisse a ratifiée en 1955, les Etats contractants accordent aux réfugiés résidant légalement sur leur territoire le même traitement qu’aux nationaux en ce qui concerne la sécurité sociale. Pour les citoyennes et citoyens suisses, le versement de rentes pour enfant n’est pas subordonné à l’existence d’un domicile ou d’une résidence habituelle en Suisse des enfants. Le TF admet ainsi le recours d’un ressortissant tchadien au bénéfice d’une rente AI, qui avait requis le versement de rentes pour ses deux filles, domiciliées à l’étranger.
(9C_460/2018 du 21.1.2020)
Le refus d’engager une femme en raison d’un accouchement imminent constitue une discrimination à l’emploi qui tombe sous la protection de l’art. 3 al. 1 et 2 de la loi sur l’égalité (LEg). C’est à tort que le Service de l’industrie, du commerce et du travail de Sion (SICT) a refusé à une jeune assurée enceinte, qui devait accoucher 7 semaines et demi plus tard, le droit aux allocations de chômage. En niant son aptitude au placement, au motif que ses chances de trouver un emploi fixe dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration étaient faibles vu qu’elle accoucherait peu avant le début de la haute saison, le SICT a présumé à tort que des employeurs potentiels adopteraient cette attitude discriminatoire.
(8C_435/2019 du 11.2.2020)
La Cour de justice genevoise a violé le droit à des conditions minimales d’existence garanti par l’art. 12 Cst. féd. en refusant des prestations d’aide sociale transitoires à une requérante, au motif qu’elle disposait, en tant que membre d’une communauté héréditaire détenant un immeuble, d’une fortune excluant le droit à des prestations d’aide sociale. Un immeuble détenu en communauté héréditaire qui fait l’objet d’une action en partage ne constitue pas une ressource immédiatement disponible ou disponible à court terme, et ne peut donc pas être pris en compte pour apprécier si une personne est dans le besoin.
(8C_444/2019 du 6.2.2020)