Droit constitutionnel et administratif
L’art. 10 de la nouvelle ordonnance sur les comprimés d’iode, entrée en vigueur à la suite de la catastrophe de Fukushima, prévoit que les exploitants d’installations nucléaires doivent participer aux coûts pour l’approvisionnement de la population en comprimés d’iode. Selon le Tribunal fédéral, il n’existe pas de base légale suffisante pour cette obligation. La répercussion des coûts sur les exploitants d’installations nucléaires constitue une taxe, qui exige en principe un fondement dans une loi au sens formel.
(2C_888/2016 du 15.10.2018)
Le Tribunal fédéral rejette les recours déposés par le Parti Pirate en lien avec la votation relative à la loi sur les jeux d’argent. L’argument du recourant selon lequel diverses interventions des autorités, commises avant la votation, auraient porté atteinte à la liberté de vote inscrite dans la Constitution fédérale est infondé. En outre, le résultat de la votation est tellement net (elle a été acceptée par 72,9% des votants) qu’une autre issue n’entre pas sérieusement en considération, même si certaines interventions avaient été jugées problématiques et si la votation avait eu lieu sans les vices correspondants.
(1C_163/2018 et 1C_239/2018 du 29.10.2018)
Le Grand Conseil du canton du Tessin doit compléter la législation d’application relative à l’interdiction de se dissimuler le visage en prévoyant des exceptions supplémentaires, en particulier s’agissant des manifestations politiques et des événements commerciaux ou publicitaires. Le TF admet partiellement deux recours. A défaut de grief correspondant, il n’examine pas la compatibilité de la nouvelle réglementation avec la liberté religieuse.
(1C_211/2016 et 1C_212/2016 du 20.9.2018)
Droit civil
Selon l’art. 117 let. a CPC, une personne a droit à l’assistance judiciaire si elle ne dispose pas des ressources suffisantes. Dans l’examen de l’indigence au sens de cette disposition, la prévoyance retirée sous forme de capital doit être prise en compte en tant que fortune. En l’espèce, le recourant avait demandé l’assistance judiciaire ainsi que la nomination d’office d’un conseil juridique alors qu’il disposait d’une prestation de sortie de 180’000 fr., qui lui avait été versée sous forme de capital.
(4A_362/2018 du 5.10.2018)
Selon l’art. 270 al. 1 CO, le locataire peut contester le loyer initial et en demander la diminution lorsqu’il estime que son montant est abusif au sens des art. 269 et 269a CO. Pour les immeubles anciens, relativement au contrôle du loyer, le critère des loyers usuels de la localité ou du quartier a la priorité sur le critère du rendement net. Selon le TF, un immeuble est ancien lorsque sa construction ou sa dernière acquisition date d’au moins 30 ans au moment du début du bail.
(4A_400/2017 du 13.9.2018)
Le TF refuse d’accorder une indemnité à une auto-école dont le véhicule avait été endommagé lors d’un examen de conduite. Malgré le freinage désespéré de l’expert, l’élève conducteur avait heurté un panneau de circulation, causant environ 1’800 fr. de dégâts sur la voiture. L’école estimait qu’une négligence de l’expert, devant être assumée par l’Etat, avait contribué à l’accident. Ce point de vue était corroboré par le témoignage d’un maître d’auto-école en formation assis à l’arrière du véhicule. En accordant davantage de poids aux dires de l’expert et en ne retenant aucune négligence de sa part, la justice argovienne n’a pas fait preuve d’arbitraire. En outre, l’Etat ne peut être considéré comme détenteur du véhicule fourni par une auto-école pour la durée d’une course d’examen.
(2C_94/2018 du 15.6.2018)
Droit pénal
Le droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial, au sens de l’art. 6 CEDH, n’est pas violé quand le Ministère public ne se présente pas aux débats de première et de deuxième instance dans les cas de peu de gravité, tels, par exemple, les cas de diffamation. Le CPP n’impose la présence du Ministère public que lorsqu’il requiert une peine privative de liberté de plus d’un an ou une mesure entraînant une privation de liberté, ou lorsque le tribunal estime sa présence nécessaire (art. 337 al. 3 et 4 CPP). La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, qui a admis une obligation de présence plus étendue dans deux affaires russes, ne peut être suivie en Suisse, les systèmes suisse et russe se différenciant fortement.
(6B_1442/2017 du 24.10.2018)
Sur le fondement du principe «ne bis in idem», la justice lucernoise doit acquitter un homme qui avait demandé à l’employé d’une société de faire en sorte qu’un membre de la direction le rappelle avant 17h, faute de quoi il tuerait l’un des membres de la direction. Le Ministère public lucernois l’avait condamné pour contrainte et avait, dans la même ordonnance pénale, clos la procédure pour menace. Selon le TF, cette décision de clôture de la procédure, entrée en force, empêche, en vertu du principe «ne bis in idem», que l’homme soit condamné pour contrainte.
(6B_1346/2017 du 20.9.2018)
Droit des assurances sociales
Quelques mois avant son décès, un assuré avait informé sa caisse de pension qu’il souhaitait que son capital-décès soit versé à son amie, avec laquelle il vivait depuis trois ans, et non à son épouse, dont il n’avait pas encore divorcé. La caisse, dont le règlement permettait d’avantager sa partenaire après trois ans de vie commune, donna suite à sa requête. C’est à raison que l’épouse légitime a recouru contre cette décision. Le règlement de la caisse de pension contrevient à l’art. 20a al. 1 let. a LPP, qui requiert une communauté de vie ininterrompue d’au moins cinq ans immédiatement avant le décès. Cette disposition est impérative.
(9C_118/2018 du 9.10.2018)
L’art. 28 Cst. définit les conditions dans lesquelles les grèves sont autorisées et stipule que la loi peut interdire le recours à la grève à certaines catégories de personnes. Selon le TF, l’interdiction générale de recours à la grève imposée au personnel de soins par le canton de Fribourg restreint de manière disproportionnée le droit de grève, dès lors qu’elle ne se limite pas au personnel de soins dont la présence serait indispensable à la préservation de la vie et de la santé des patients. Elle est d’autant plus disproportionnée que la législation cantonale offre des garanties suffisantes pour ne pas mettre en péril les prestations indispensables à la population dans le domaine de la santé.
(8C_80/2018 du 9.10.2018)
Dans la mesure où les coûts des soins ne sont pas couverts par les participations légalement limitées de l’assurance obligatoire des soins et des assurés, les cantons (ou leurs communes) doivent prendre intégralement en charge les coûts résiduels, même si le droit cantonal prévoit des montants maximaux à cet égard. Le TF confirme un jugement du Tribunal des assurances du canton de St-Gall, et rejette le recours de la caisse de compensation cantonale.
(9C_446/2017 du 20.7.2018)