Droit constitutionnel et administratif
Selon l’art. 29 al. 1 Cst., «toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable». En l’espèce, le Tribunal fédéral, officiant en tant qu’autorité de surveillance du Tribunal administratif fédéral, considère que ce dernier a trop tardé dans une procédure en matière d’asile qui a duré plus de deux ans et demi. Il invite le TAF à examiner si des mécanismes doivent être instaurés pour permettre des traitements plus rapides.
(12T_4/2017 du 26.6.2018)
La limitation constitutionnelle de la construction de nouvelles résidences secondaires, acceptée en votation populaire le 11 mars 2012, ne constitue pas une restriction de la propriété ouvrant aux propriétaires fonciers des communes concernées le droit à une indemnisation pour expropriation matérielle. La propriété n’est pas garantie de façon illimitée, mais seulement dans les limites tracées par l’ordre juridique dans l’intérêt public. Les propriétaires concernés ne peuvent prétendre à une indemnité que si le passage au nouvel ordre juridique introduit des inégalités crasses, déployant des conséquences trop rigoureuses pour certains propriétaires particuliers, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
(1C_216/2017 du 6.8.2018)
Droit civil
Le TF concrétise sa pratique relative à l’examen d’un droit de séjour d’une personne étrangère fondé exclusivement sur le droit à la vie privée prévu par l’article 8 CEDH. Il reconnaît le droit à la prolongation de l’autorisation de séjour d’un ressortissant argentin vivant en Suisse depuis environ dix ans et étant parfaitement intégré, en considérant notamment qu’il manque en l’espèce une raison pertinente pour lui retirer son droit de séjour.
(2C_105/2017 du 8.5.2018)
Celui qui, dans le seul but d’interrompre le cours de la prescription de sa créance, remplit une réquisition de poursuite qu’il retire avant l’émission du commandement de payer [procédé connu en Suisse allemande sous le nom de «poursuite silencieuse» (stille Betreibung)] ne doit payer qu’un émolument de 5 fr., quel que soit le montant de la poursuite (art. 16 al. 4 OELP). Le TF rejette le recours d’un office des poursuites lucernois qui entendait, en se fondant sur l’art. 4 al. 2 OELP, facturer un montant de 40 fr.
(5A_8/2018 du 21.6.2018)
Le TF établit des lignes directrices déterminant, au regard de l’obligation d’entretien de l’autre parent, le moment à compter duquel le parent qui prend en charge les enfants la plupart du temps doit exercer une activité lucrative, de même que l’étendue de celle-ci. En cas de divorce ou de séparation, après une phase transitoire ou à défaut d’accord des parents sur le mode de prise en charge des enfants, c’est le modèle des degrés de scolarité qui s’applique. Le parent qui prend en charge les enfants la plupart du temps doit ainsi exercer une activité lucrative à un taux de 50% dès la scolarisation obligatoire du plus jeune enfant, de 80% dès son entrée au niveau secondaire et de 100% dès la fin de sa seizième année. On peut s’écarter de cette ligne directrice au cas par cas et pour des motifs suffisants.
(5A_384/2018 du 21.9.2018)
En avril 2015, le TF a jugé que les redevances de réception radio et télévision ne sont pas soumises à la TVA (ATF 141 II 182). En l’espèce, il admet que l’Ofcom est en principe obligé de restituer la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) perçue auprès d’un particulier sur des redevances. Dans le cas particulier, toutefois, le droit à la restitution est prescrit pour la TVA acquittée avant le 1er janvier 2010.
(2C_240/2017 du 18.9.2018)
Droit pénal
La notion d’«autorité», au sens de l’art. 104 al. 2 CPP, doit être comprise dans un sens étroit. Pour qu’elle puisse être qualifiée d’autorité, il est décisif qu’une organisation exécute une mission de droit public qui lui a été déléguée par la collectivité, qu’il lui appartienne à ce titre des prérogatives de puissance publique, que sa gestion et la tenue de ses comptes soient soumis à une surveillance étatique et que son activité de droit public soit subventionnée par l’Etat. L’Association faîtière des organisations bernoises de protection des animaux ne remplit pas ces critères.
(6B_982/2017 du 14.6.2018)
En matière de circulation routière, il n’est pas contraire au principe de la présomption d’innocence d’infliger les amendes d’ordre au détenteur mentionné dans le permis de circulation du véhicule, lorsque le conducteur est inconnu. Toutefois, la réglementation en la matière, prévue à l’art. 6 LAO, ne peut pas s’appliquer lorsque la détentrice du véhicule est une entreprise. Le Code pénal exclut en effet la responsabilité pénale de l’entreprise lorsque l’infraction constitue une simple contravention. Dès lors que l’art. 6 LAO ne se réfère pas expressément à la responsabilité de l’entreprise en qualité de détentrice du véhicule, cette disposition ne peut pas s’appliquer aux sociétés, à défaut d’une base légale suffisamment précise.
(6B_252/2017 du 20.6.2018)
En 2007, la Cour suprême du canton de Zurich a condamné un homme pour plusieurs tentatives d’assassinat et d’autres infractions à douze ans de peine privative de liberté. L’homme avait notamment tiré en 2005 avec un fusil d’assaut depuis sa chambre sur un immeuble situé en vis-à-vis. En 2017, le Ministère public a demandé son internement sur la base d’une nouvelle expertise. En juin dernier, la Cour suprême a admis l’ouverture d’une procédure de révision, annulé le jugement de 2007 et renvoyé la cause au tribunal de première instance. Le TF admet le recours de l’intéressé. Un internement ultérieur ne peut être ordonné que de manière très restrictive. Il doit exister des faits et des moyens de preuves qui existaient déjà à l’époque du jugement initial, sans que le tribunal ait pu en avoir connaissance (art. 65 al. 2 CP). Une nouvelle expertise, qui représente uniquement un autre avis et conclut à un diagnostic et à un pronostic différents, ne constitue pas un motif de révision.
(6B_714/2018 du 14.8.2018)
C’est à juste titre que le Tribunal cantonal valaisan a condamné un gérant de fortune à une peine privative de liberté de quatre ans et demi pour gestion déloyale. L’homme n’avait pas informé ses clients des rétrocessions et autres rémunérations reçues d’une banque dépositaire, se chiffrant à environ 400 000 fr. Le gérant de fortune doit, de par la loi, en qualité de mandataire, rendre compte de sa gestion au client et lui restituer tout ce qu’il a reçu dans ce cadre. Cela concerne aussi les avantages indirects, tels que les ristournes et les rétrocessions.
(6B_689/2016 du 14.8.2018)
Droit des assurances sociales
Celui qui s’occupe d’un proche nécessitant des soins et vivant dans un home n’a pas le droit à une indemnité pour assistance dans le calcul de sa rente AVS/AI, parce qu’il ne fournit en principe pas des soins qui justifieraient une réduction d’activité professionnelle. En l’espèce, le fait que la personne concernée ait assumé diverses tâches (telles que, notamment, les visites chez le médecin et le dentiste) n’est pas déterminant, les soins ayant pour l’essentiel été assumés par le personnel du home.
(9C_377/2017 du 11.6.2018)