Droit constitutionnel et administratif
Selon l’art. 4 al. 1 LAVI, les prestations d’aide aux victimes d’infractions ne sont accordées définitivement que lorsque l’auteur de l’infraction ou un autre débiteur ne verse aucune prestation ou ne verse que des prestations insuffisantes. Ce principe de subsidiarité ne s’applique pas à l’assistance judiciaire gratuite. Par conséquent, une victime qui ne fait pas valoir son droit à cette assistance dans la procédure pénale peut toujours demander ultérieurement au centre d’aide aux victimes la prise en charge de ses frais d’avocat.
(1C_344/2022 et 1C_656/2022 du 2.6.2023)
Un délinquant irresponsable pénalement en raison de ses troubles psychiques a dû attendre 17 mois à compter de la décision d’exécution anticipée de la mesure prononcée avant de pouvoir commencer son exécution dans un établissement approprié. Compte tenu du manque structurel de places de thérapie dans le canton de Berne, il a passé la majorité de ces 17 mois dans des prisons régionales et au pénitencier de Thorberg, sans bénéficier d’un traitement spécifique. Selon le TF, cette période d’attente et de détention était contraire à l’art. 5 par. 1 lit. e CEDH, et l’homme a droit à une indemnisation.
(2C_523/2021 du 25.4.2023)
L’obligation de suivre une offre d’encouragement linguistique, introduite dans le canton de Thurgovie par la (clarificiation: introduite dans le canton de Thurgovie par la loi cantonale) loi cantonale sur l’encouragement linguistique préscolaire, relève du droit constitutionnel à un enseignement de base gratuit (art. 19 Cst.). Les personnes investies de l’autorité parentale sur les enfants tenus de suivre une offre d’encouragement linguistique préscolaire ne doivent par conséquent pas participer aux frais.
(2C_402/2022 du 31.7.2023)
Droit civil
Selon l’art. 84 al. 2 CPC, l’action tendant au paiement d’une somme d’argent doit être chiffrée. L’art. 85 al. 1 prévoit que si le demandeur est dans l’impossibilité d’articuler d’entrée de cause le montant de sa prétention, il peut intenter une action non chiffrée, en indiquant une valeur minimale comme valeur litigieuse provisoire.
L’al. 2 précise que la créance doit toutefois être chiffrée dès que le demandeur est en mesure de le faire après la clôture de la procédure probatoire ou après la communication de renseignements par le défendeur. Dans le cas d’espèce, où seule la conclusion de la procédure probatoire permettait de chiffrer la demande, le TF considère que l’exigence de l’art. 85 al. 2 CPC est satisfaite par une détermination chiffrée dans les plaidoiries finales.
(4A_145/2023 du 3.7.2023)
Droit pénal
En 2019, un homme a été contrôlé à la gare de St. Margrethen (SG) en possession de 2,7 grammes de marijuana et de 0,6 gramme de haschich. C’est à tort que le tribunal de district a ordonné, après avoir prononcé son acquittement, la confiscation et la destruction de la marchandise séquestrée. Le juge ne peut pas prononcer la confiscation, en vue de sa destruction, d’une quantité minime de cannabis (jusqu’à 10 grammes) destinée à la consommation personnelle.
L’exigence légale de la commission préalable d’une infraction de base n’est pas réalisée, puisque l’acquisition et la possession d’une quantité minime de cannabis destinée à la consommation personnelle sont légales. Le fait que les infractions aient été probablement commises par des tiers en amont ne suffit pas à établir l’existence d’une infraction de base.
(6B_911/2021 du 19.6.2023)
Une peine avec sursis peut être assortie d’une amende (art. 42 al. 4 CP). Cette amende additionnelle entre en ligne de compte lorsque, malgré l’octroi du sursis, il convient d’imposer une sanction tangible à l’auteur, dans le but d’augmenter l’effet préventif de la sanction assortie du sursis. Son prononcé ne doit toutefois pas aboutir à une aggravation de la peine globale ou permettre une peine supplémentaire. L’amende additionnelle peut s’élever au maximum à 20% de la sanction proportionnée à la culpabilité, composée de la peine principale prononcée avec sursis et de l’amende additionnelle.
(6B_337/2022 du 12.7.2023)
La Cour suprême de Zurich a condamné un jeune délinquant étranger à une peine d’emprisonnement de 25 mois pour avoir commis divers délits avant sa majorité, puis des lésions corporelles simples qualifiées après sa majorité. Elle a renoncé à ordonner une expulsion. Le Ministère public de la jeunesse du canton de Zurich a recouru au TF, en arguant que les dispositions du droit pénal des adultes relatives à l’expulsion s’appliquent également aux délinquants qui ont commis des infractions avant et après leur majorité, à raison selon le TF.
(6B_1445/2021 du 14.6.2023)
Un ressortissant algérien de 32 ans, condamné à une peine de 3 mois d’emprisonnement pour rupture de ban (art. 291 CP), s’est vu allouer une indemnité de 935 francs en raison de 27 jours de détention excessive, après avoir passé 117 jours en détention provisoire. L’homme a recouru au TF, en demandant que l’indemnité soit portée de 35 à 200 francs par jour. Dans l’ATF 146 IV 231, le TF a considéré qu’en cas de détention injustifiée de courte durée, un montant de 200 francs est approprié en l’absence de circonstance particulière, tout en précisant qu’il doit être relativisé lorsque la détention n’est pas injustifiée dans son principe, mais que sa durée est excessive.
En l’espèce, le TF considère que le montant de 35 francs est adéquat. Il confirme qu’il est admissible, lorsqu’un prévenu qui séjourne illégalement en Suisse et n’a aucune perspective d’avenir dans notre pays fait l’objet d’une expulsion pénale, de tenir compte du coût de la vie du pays vers lequel l’intéressé doit être expulsé en raison de sa nationalité. En outre, l’incarcération n’a eu aucune répercussion durable sur sa vie sociale et professionnelle, et il n’est pas démontré qu’il ait particulièrement mal vécu sa détention ou qu’elle lui ait causé des souffrances particulières.
(6B_1160/2022 du 1.5.2023)
Droit des assurances sociales
En 2021, l’Office d’aide sociale et d’insertion du canton du Tessin a refusé de faire bénéficier ultérieurement un homme de l’aide sociale, au motif qu’il avait refusé à plusieurs reprises de se soumettre à une expertise psychiatrique visant à établir son droit à une rente AI, à tort selon le TF. Selon l’art. 12 Cst., quiconque est dans une situation de détresse et n’est pas en mesure de subvenir à son entretien a le droit de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine. En l’espèce, l’homme ne pouvait pas disposer d’une autre source de revenus à temps et dans une mesure suffisante.
(8C_717/2022 du 7.6.2023)
En mangeant une salade, une femme a mordu un caillou et s’est fracturé une partie de son obturation occlusale sur une dent. Elle s’est rendue chez le dentiste, qui a d’abord comblé l’obturation avec un composite, puis a par la suite dû extraire la dent, en raison d’une suspicion de fracture longitudinale. L’assurance-accidents a nié son obligation de prestation, en considérant qu’il n’existait pas de lien de causalité naturelle entre la morsure et la lésion dentaire.
Dans son arrêt, le TF rappelle que même une dent traitée peut en règle générale être tout à fait fonctionnelle pour l’acte normal de mastication. Il en résulte que si une telle dent ne résiste pas à une charge soudaine, non intentionnelle et exceptionnelle, l’hypothèse d’un accident ne peut pas être exclue au motif qu’une dent parfaitement intacte aurait résisté à la charge. Le cas est renvoyé à l’assurance pour un examen plus approfondi.
(8C_125/2023 du 8.8.2023)