Tribunal fédéral
Droit des cartels: Swisscom obtient gain de cause
Le TF admet le recours de Swisscom contestant la décision de la Commission de la concurrence (COMCO) de 2015. Cette dernière avait sanctionné Swisscom à hauteur de plus de 7 millions de francs pour violation du droit des cartels lors d’un appel d’offres de La Poste Suisse en 2008. Selon le TF, Swisscom, qui occupait certes une position dominante sur le marché déterminant, n’a pas imposé des prix inéquitables à Sunrise et à La Poste. Le TF annule l’arrêt du Tribunal administratif fédéral qui confirmait en grande partie la décision de la COMCO.
(2C_698/2021 du 5.3.2024)
Procédure Blatter/Platini: récusation de tous les membres de la Cour d’appel
Dans la procédure en appel ouverte contre Joseph S. Blatter et Michel Platini, tous les juges de la Cour d’appel ordinaire du Tribunal pénal fédéral sont récusés. Le TF admet le recours de Michel Platini, le président de la Cour d’appel ayant également été entendu en tant que témoin lors du procès en première instance. En 2022, la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral a acquitté Joseph S. Blatter et Michel Platini. Le Ministère public de la Confédération a fait appel contre cette décision.
(7B_173/2023 du 15.3.2024)
Projet de parc éolien dans le canton de Vaud en suspens
Le TF admet un recours dirigé contre le plan partiel d’affectation intercommunal adopté pour le projet de parc éolien «Bel Coster» dans le canton de Vaud. Des investigations complémentaires concernant l’impact du projet sur plusieurs espèces d’oiseaux et sur la protection des eaux doivent être effectuées au stade du plan d’affectation déjà. Une étude d’impact lors de la procédure de permis de construire n’est pas suffisante.
(1C_458/2022 du 12.2.2024)
Le gardien sous-chef est bel et bien coupable
Les gardiens d’une prison genevoise ont été informés au début de l’année 2020 de l’uniformisation future de leurs horaires. L’annonce a beaucoup perturbé le gardien sous-chef de l’établissement, car le nouvel horaire compromettait grandement l’exercice de la garde alternée de sa fille. Après en avoir parlé sans succès au directeur, l’homme, droitier, a déposé dans la boîte aux lettres de la direction une lettre anonyme adressée au directeur, écrite de la main gauche. Les images de la caméra de surveillance ont permis de l’identifier.
En janvier 2023, la Cour de justice l’a reconnu coupable de tentative de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires (art. 285 CP), mais a renoncé à lui infliger une peine (art. 53 CP). Le TF rejette le recours du gardien: la menace, pour l’ancien directeur, d’une perte de son emploi cumulée avec la menace, dans les circonstances particulières du milieu carcéral, d’une possible opposition de plusieurs gardiens au projet, potentiellement malveillante, tombe bien sous le coup de l’art. 285 ch. 1 CP.
(6B_386/2023 du 28.3.2024)
Les limites du droit de critique de l’avocat
La demande de récusation d’un magistrat implique nécessairement une critique personnelle de ce dernier, en soi admissible même lorsque la récusation n’est pas fondée. L’usage des termes «partial» (voreingenommen), «malveillant» (bösartig), «hostile» (feindselig) et «moqueur» (höhnisch) était encore admissible dans le cas d’espèce, compte tenu de leur utilité dans la demande de récusation. Même le fait d’accuser le président du Tribunal de district de Zurich de «transformer le procès en farce» aurait encore, pris isolément, pu être admissible.
Toutefois, le fait que l’avocat ait utilisé tous ces mots ensemble, de manière creuse et sans qu’ils ne soient liés à des actes précis reprochés au président, dont il demandait la récusation, excédait les limites de ce qui était admissible et justifiait une sanction disciplinaire, d’autant plus qu’ils ont été utilisés par écrit, laissant à l’avocat plus de temps pour réfléchir aux termes utilisés. Le TF confirme l’amende de 5000 francs prononcée à son encontre.
(2C_83/2023 du 26.3.2024)
Honoraires trop fortement réduits
Dans une affaire zurichoise, la Cour suprême a alloué à une avocate ayant officié dans le cadre d’une assistance judiciaire des honoraires de 13'767 francs, alors qu’elle réclamait 42'141 francs pour 174,3 heures de travail effectuées dans la procédure d’appel. Selon le TF, l’indemnisation est trop faible par rapport au temps consacré au traitement de l’affaire. Le cas est renvoyé à la Cour suprême pour nouvel examen. En outre, le TF condamne le canton de Zurich à verser à l’avocate une indemnité de 3000 francs.
(5A_576/2023 du 8.3.2024)
Le psychiatre doit être entendu avant l’internement
Dans une affaire fribourgeoise, le Tribunal pénal de la Sarine a condamné en 2022 un délinquant sexuel à une peine privative de liberté de six ans ferme, et l’a astreint à se soumettre à un traitement ambulatoire. Le tribunal cantonal a réduit la peine à 42 mois et prononcé une mesure thérapeutique institutionnelle. Selon le TF, le remplacement de la mesure est en soi admissible, mais le tribunal cantonal aurait dû au moins entendre l’expert et permettre au recourant de lui poser des questions à ce sujet.
(6B_1309/2023 du 2.4.2024)
Tribunal administratif fédéral
Harcèlement sexuel non établi
Au cours d’une enquête interne, il est apparu qu’un employé fédéral aurait harcelé sexuellement une collègue. L’employeur a donc résilié le contrat de travail avec effet immédiat pour faute grave. Selon le TAF, il ne suffit pas de prouver la vraisemblance de l’allégation, mais il faut également qu’aucun doute sérieux ne subsiste quant à la véracité des faits allégués. Compte tenu des incohérences, des témoignages vagues et de la chronologie douteuse, le seuil de preuve requis n’était pas atteint selon les juges saint-gallois. Le licenciement immédiat n’était donc pas justifié, et le salaire doit être versé jusqu’à la fin du délai ordinaire de résiliation avec une indemnité supplémentaire d’un montant de trois mois de salaire. L’arrêt est susceptible de recours au Tribunal fédéral.
(A-4782/2023 du 22.4.2024)
Refus d’octroi d’un visa humanitaire à une veuve afghane
Pour obtenir un visa humanitaire, la personne concernée doit être menacée directement, sérieusement et concrètement dans sa vie ou son intégrité physique. La menace doit la toucher à titre individuel et dans une plus forte mesure que le reste de la population de son pays d’origine ou de provenance. Dans le cas d’espèce, une veuve afghane a déposé une demande de visa humanitaire auprès de l’ambassade de Suisse au Pakistan pour elle-même et pour ses enfants. Selon le TAF, la seule absence d’un chef de famille masculin ne justifie pas l’octroi d’un visa humanitaire. La dégradation de la situation des femmes et des jeunes filles en Afghanistan depuis la prise de pouvoir des talibans les concerne toutes indistinctement. L’arrêt est susceptible de recours au Tribunal fédéral.
(F-1451/2022 du 27.3.2024)
Tribunal pénal fédéral
Peines alourdies contre deux jeunes Bâlois
La Cour d’appel du TPF confirme la condamnation prononcée fin novembre 2023 par la Cour des affaires pénales à l’encontre des deux prévenus de 25 et 28 ans qui avaient fait exploser en mars 2022 une bombe près d’une villa à Bâle, causant des dommages s’élevant à 170'000 francs. Personne n’avait heureusement été blessé. Les peines privatives de liberté prononcées en première instance sont portées respectivement de 60 à 64 mois et de 74 à 84 mois.
(CA.2023.32 du 4.4.2024)