Tribunal fédéral
Démolitions admises quelle que soit la date de construction
Les autorités peuvent ordonner la démolition des bâtiments et des installations érigés illégalement en dehors de la zone à bâtir, quelle que soit leur date de construction.La jurisprudence fédérale prévoyant que l’obligation de rétablir un état conforme au droit s’éteint après trente ans en présence de constructions illicites sises en zones à bâtir ne s’applique pas aux constructions illicites situées en dehors de ces zones.
(1C_469/2019 et 1C_483/2019 du 28.4.2021)
Jugement annulé pour vice de procédure
Le TF annule la condamnation à 13 ans de prison infligée par la justice vaudoise à un trafiquant de drogue nigérian. L’homme avait été chargé par une complice, entendue par le Tribunal cantonal comme «personne appelée à donner des renseignements» et non comme témoin. Cette dernière a décidé de garder le silence, empêchant ainsi le condamné de l’interroger sur des déclarations l’incriminant lors de l’enquête. Par ce procédé, le recourant a été privé de son droit de poser des questions à un témoin à charge et d’obtenir des réponses. Or, un jugement pénal ne peut se fonder sur les déclarations de témoins sans qu’une occasion appropriée et suffisante soit au moins une fois offerte au prévenu de mettre ces témoignages en doute et de les interroger, à quelque stade de la procédure que ce soit. La condamnation du trafiquant a porté atteinte à son droit d’être entendu et à la garantie d’un procès équitable.
(6B_1028/2020 du 1er avril 2020)
Intervenir à temps
En juin 2019, le Ministère public a condamné un conducteur qui avait notamment effectué plusieurs dépassements par la droite et n’avait pas respecté les distances nécessaires à une peine pécuniaire de 18 000 francs avec sursis et à une amende de 3000 francs, sur la base d’un enregistrement privé effectué par dashcam. Trois mois plus tard, l’autorité administrative lui retire son permis pour cinq mois. Le TF rejette le recours du conducteur contre cette dernière décision, qui faisait valoir que les enregistrements vidéo privés ne peuvent être utilisés comme preuves. En fait, la question aurait déjà dû être soulevée dans le cadre de la procédure pénale, l’utilisation de preuves issues de la vidéosurveillance privée ayant déjà fait l’objet de fortes controverses à l’époque.
(1C_415/2020 du 17.2.2021)
Un bref exposé des motifs de seize pages
Dans le cadre d’une procédure pénale, un Tribunal argovien a condamné un homme à une peine pécuniaire de 22 200 francs suisses avec sursis. Le jugement lui a été notifié quelque temps plus tard, avec un bref exposé des motifs. L’homme a fait appel 20 jours plus tard auprès du Tribunal cantonal argovien. Ce dernier a refusé d’entrer en matière, estimant que le jugement devait être traité comme un simple dispositif, avec un délai d’appel de 10 jours. A tort selon le TF: le CPP ne prévoit pas l’institution du «bref exposé des motifs». Un «bref exposé des motifs» de seize pages ne diffère guère d’un exposé des motifs usuel en ce qui concerne l’utilisation du langage et l’étendue de la motivation. Du point de vue du profane, le dispositif et le bref exposé des motifs étaient susceptibles de donner l’impression qu’il s’agissait, en l’espèce, d’un exposé usuel des motifs, pour lequel le délai de recours est de 20 jours.
(6B_425/2020 du 10.3.2021)
Quand un acte est-il «incompréhensible»?
Selon l’art. 132 CPC, le tribunal fixe un délai pour la rectification des vices de forme. A défaut, l’acte n’est pas pris en considération. Il en va de même, selon l’al. 2, des actes illisibles, inconvenants, incompréhensibles ou prolixes. Un mémoire est incompréhensible si ses conclusions ou leur motivation ne sont pas claires, c’est-à-dire lorsqu’elles sont ambiguës ou contradictoires, ou si aucun motif raisonnable ne peut être discerné. Une présentation peu claire ou non structurée peut aussi être considérée comme incompréhensible. Le tribunal doit interpréter l’acte selon le principe de la bonne foi. L’acte n’est pas incompréhensible lorsqu’il est insuffisamment motivé. L’arrêt traite également de la question de la prolixité d’un mémoire.
(4A_55/2021 du 2.3.2021)
Justificatif de sécurité supplémentaire pour Beznau
Le TF rejette pour l’essentiel un recours concernant le justificatif de sécurité pour la Centrale nucléaire de Beznau, demandé par l’Inspection fédérale de la sécurité nucléaire (IFSN) après l’accident survenu à Fukushima en 2011. Le recours est partiellement admis, dans la mesure où l’IFSN doit exiger de l’exploitante de la Centrale de Beznau un justificatif de sécurité supplémentaire, à moins que cela ne soit devenu entre-temps sans objet en raison d’autres contrôles de l’IFSN.
(2C_206/2019 du 25.3.2021)
Tribunal administratif fédéral
Risque de dommage pour la Suisse
Selon le TAF, c’est à raison que l’Assurance suisse contre les risques à l’exportation (SERV) a refusé l’accès à des documents officiels à une journaliste de la Télévision suisse alémanique en s’appuyant sur le régime des exceptions de la Loi sur la transparence. La SERV a exposé de manière pertinente le risque d’atteinte aux relations internationales de la Suisse si l’accès était accordé.
(A-4494/2020 du 20.4.2021)
Le TPF tenu de payer des frais d’avocats
Une juge du Tribunal pénal fédéral (TPF) doit être indemnisée des honoraires d’avocat qu’elle a dû débourser à la suite de la publication d’un rapport de surveillance du TF et de déclarations du président de ce dernier, à la suite des incidents survenus au TPF. Selon le TAF, le devoir d’assistance de l’employeur vaut également à l’égard des juges. Comme tous les employeurs, le TPF est tenu de protéger l’honneur personnel et professionnel ainsi que la position et la réputation de ses employés au sein de l’institution.
(A-3584/2020 du 12.4.2021)
Abus de position dominante de Naxoo SA
Le TAF confirme, sur le principe, la sanction pour abus de position dominante prononcée contre Naxoo SA par la Commission de la concurrence. Il constate que Naxoo occupait une position dominante en Ville de Genève sur le marché du raccordement au téléréseau, et juge que la société a abusé de cette position au détriment des propriétaires d’immeubles, des fournisseurs de systèmes tiers et des consommateurs finaux. Le TAF réduit toutefois le montant de l’amende à environ 3,25 millions de francs pour tenir compte du chiffre d’affaires effectif de Naxoo.
(B-2798/2018 du 16.2.2021)
Tribunal pénal fédéral
L’«icône de la finance» obtient un sursis partiel
Le TPF condamne un financier allemand, surnommé «l’icône de la finance» à 36 mois de prison, dont 18 mois ferme, pour gestion déloyale aggravée et faux dans les titres répétés. Le TPF s’est déclaré incompétent pour une partie des faits qui ont été commis aux Etats-Unis, et d’autres ont été considérés comme prescrits. Agissant comme le héros du film «Le loup de Wall Street», l’homme a mis en œuvre un mécanisme visant à faire grimper artificiellement et de manière trompeuse les cours de titres américains à très faible valeur, échangés sur un marché de gré à gré non régulé. Il recourait à une société de gestion de fonds qu’il avait lui-même créée pour opérer des ventes croisées entre les différents fonds gérés par la société afin d’augmenter les cours et les volumes de transactions. L’homme s’est enrichi de 140 millions de dollars.
(SK.2019.12 du 23.4.2021)