Tribunal fédéral
Disproportionnalité et Covid
Le TF admet le recours concernant la limitation du nombre de participants à des manifestations à quinze personnes dans le canton de Berne. La réglementation, désormais abrogée, s’avère être disproportionnée. Il n’est pas possible de prendre librement des mesures particulièrement strictes en vue d’empêcher toute transmission de la maladie. Il convient bien plus de s’interroger sur le risque acceptable et de procéder à une pesée des intérêts en présence. La réglementation en cause traitait l’ensemble des manifestations et des rassemblements de la même manière, indépendamment du fait qu’ils aient lieu à l’intérieur ou à l’extérieur, qu’il s’agisse de réunions privées entre amis ou de manifestations politiques. Elle ne tenait pas compte de l’intérêt public à pouvoir manifester, et ne prenait pas en considération le fait que, contrairement aux réunions privées, les manifestations politiques ou civiles perdaient leur importance en cas de limitation du nombre de participants. Dans ce contexte, l’exercice de la liberté de réunion perd de fait sa portée.
(2C_290/2021 et 2C_308/2021 du 3.9.2021)
Avocat valaisan amendé
C’est à juste titre que la Chambre de surveillance des avocats valaisans a condamné un avocat à une amende de 3000 francs pour violation de l’art. 12 let. a LLCA. L’homme avait perdu son sang-froid lors d’une audience, en traitant deux policiers de «cow-boys» et en affirmant qu’ils «ne touchaient pas le puck en matière judiciaire». En outre, il a traité l’avocat de la partie adverse de «pantin», de «guignol» et de «fils à papa». Le TF considère qu’un tel comportement est inacceptable, et relève que la sanction n’est pas arbitraire, ni dans son principe, ni dans sa quotité.
(2C_354/2021 du 24.8.2021)
Pas de motif de récusation
Le simple fait que le Ministère public, dans la direction de la procédure, dépose une dénonciation à caractère disciplinaire, objectivement défendable, contre l’avocat de la défense auprès de l’Autorité de surveillance des avocats ne constitue pas un motif de récusation. Sinon, la défense aurait la possibilité de provoquer la récusation des procureurs en violant les règles professionnelles de l’ordre des avocats. Le Ministère public serait de facto empêché de remplir son obligation légale de signaler d’office à l’Autorité de surveillance les infractions disciplinaires importantes commises par des avocats. En l’espèce, un avocat aurait entre autres, en tant que défenseur, rencontré deux témoins potentiels avant l’interrogatoire du procureur afin de pouvoir évaluer leur valeur en tant que témoins dans la procédure.
(1B_118/2021 du 13.7.2021)
Destruction d’une route bétonnée
La commune d’Oensingen (SO) doit détruire une route bétonnée de 660 mètres de long, construite sans permis et en violation des prescriptions en matière d’aménagement du territoire. Le TF estime que le démantèlement n’est pas disproportionné, malgré les coûts de construction de 250 000 francs et de démolition de 160 000 francs, car l’ouvrage a été construit en contradiction avec les règles de la bonne foi. Le bétonnage de la route ne constitue pas une dérogation insignifiante aux dispositions légales en matière d’aménagement du territoire. En sus, il n’existe pas d’intérêt public ou privé des usagers de la route outrepassant l’intérêt public au rétablissement d’une situation conforme au droit.
(1C_154/2020 du 13.7.2021)
Droit à l’information du profane
L’autorité d’instruction qui saisit des enregistrements et des objets à titre provisoire doit informer leur détenteur, lors de la perquisition, de son droit à demander leur mise sous scellés. Cette information doit être suffisante, et fournie au plus tard à la fin de la perquisition. Une simple référence à l’art. 248 CPP dans le mandat de perquisition et dans le procès-verbal de perquisition n’est pas suffisante, en tout cas à l’égard d’un non juriste. Une demande de mise sous scellés, présentée par la défense deux jours après la perquisition, n’est donc pas tardive.
(1B_277/2021 du 17.8.2021)
LP: pas d’émoluments cantonaux
Les frais de poursuite sont réglés de manière exhaustive dans l’ordonnance sur les émoluments (OELP) du Conseil fédéral. D’autres émoluments et indemnités ne peuvent être perçus pour les procédures régies par la LP. Les règles cantonales ne peuvent rien y changer. Il est donc inadmissible de facturer plus qu’un forfait de 17 francs pour la fourniture d’un extrait écrit du Registre des poursuites, quel que soit le nombre de pages, et plus de 18 francs pour une remise par courrier, par fax ou par voie électronique. Il n’existe pas de base légale pour percevoir un émolument distinct, en l’espèce 8 francs suisses, pour la fourniture d’une information écrite sur la poursuite, comme l’a fait l’Office des poursuites de Thalheim (AG).
(5A_1014/2020 du 17.6.2021)
Valorisation de terrain
Dans le cadre de l’élargissement d’une route très fréquentée, les autorités zurichoises ont exproprié une surface de 22 m2 appartenant à un propriétaire privé. La qualification de la bande de terrain était contestée. Le Tribunal cantonal avait estimé qu’il s’agissait d’un «terrain de qualité médiocre», indemnisé 590 francs le m2. Le requérant exigeait une requalification du terrain et, par truchement une augmentation de l’indemnité d’expropriation. Le propriétaire foncier a fait valoir sans succès devant le TF qu’il a acquis le terrain au prix de 830 francs par m2. La décision n’est pas arbitraire, l’indemnisation n’étant pas basée sur le prix payé lors de l’acquisition du terrain, mais sur sa valeur.
(1C_681/2019 du 19.5.2021)
Tribunal administratif fédéral
Abus de position dominante
Le TAF confirme la condamnation de Swisscom pour abus de position dominante, mais réduit le montant de la sanction à 7,4 millions de francs. En 2008, La Poste a lancé un appel d’offre public pour la création et l’exploitation d’un réseau étendu (WAN) entre ses sites postaux. Swisscom a obtenu le marché. Sunrise a fait valoir qu’elle dépendait des prestations préalables de Swisscom pour la mise en réseau des sites postaux. Selon le TAF, Swisscom a imposé des prix inéquitables aussi bien à La Poste qu’à Sunrise. Pour les sites postaux pour lesquels Sunrise ne peut assurer la couverture ni avec des produits réglementés, ni avec ses propres produits, l’entreprise dépend des produits commerciaux intermédiaires excessivement chers de Swisscom. Vu l’impossibilité pour Sunrise de réaliser une marge, Swisscom a abusé de sa position dominante sur le marché sous la forme dite du «ciseau tarifaire».
(B-8386/2015 du 24.6.2021)
Bulat Chagaev: interdiction d’entrée
Le TAF fixe l’échéance de l’interdiction d’entrée en Suisse, au Liechtenstein et dans l’Espace Schengen de Bulat Chagaev au 26 août 2026. Il juge qu’une interdiction d’entrée de neuf ans, prononcée en juillet 2018 par le Secrétariat d’Etat aux migrations, est proportionnée en raison des infractions commises par l’intéressé en Suisse. Le TAF réduit toutefois cette interdiction d’entrée d’une année à titre exceptionnel. L’arrêt est définitif et n’est pas susceptible de recours au Tribunal fédéral.
(F-1367/2019 du 29.7.2021)
Informations au public
En 2015, le Bureau suisse de prévention des accidents (bpa) a contrôlé la conformité aux règles de sécurité des tables à langer pour bébés. Se fondant sur la loi sur la transparence, une journaliste a demandé sur quelles tables à langer ont été constatés des défauts. Le TAF lui accorde l’accès aux documents. Un reportage efficace sur le contrôle du bpa n’est possible que si les indications identifiant les modèles défectueux sont divulguées. En tant que professionnelle des médias, la journaliste exerce une fonction de veille. En outre, l’intérêt public ne saurait être contesté dans la présente affaire.
(A-2734/2020 du 2.8.2021)