1. Point de situation
A compter du 13 septembre 2021, les employeurs peuvent exiger un certificat Covid-19 de leurs employés, sous certaines conditions, dans le cadre du plan de protection de l’entreprise1. Pour l’heure, cette option reste ouverte jusqu’au 24 janvier 2022. Le certificat Covid sert de preuve infalsifiable pour les personnes de plus de 16 ans et démontre alternativement trois faits: la vaccination contre le coronavirus2, la confirmation d’avoir contracté la maladie (prouvée par un test PCR) ou l’obtention d’un test PCR ou antigénique rapide négatif 4, 5.
Cette possibilité ne saurait être confondue avec l’obligation du certificat Covid récemment introduite par la Conseil fédéral. En effet, l’obligation de présentation d’un certificat Covid dans tous les espaces intérieurs ouverts au public, tels que les salles intérieures des restaurants, les centres de fitness, les musées, les zoos, les bars et les manifestations6 ne vise que les client•e•s. Le personnel travaillant sur lesdits lieux n’est pas soumis au même régime: les règles particulières applicables sont exposées ci-dessous.
2. Introduction conditionnée d’un pass
Le Conseil fédéral a explicitement renoncé à introduire une obligation générale de présentation d’un certificat Covid sur les lieux de travail.
La présentation d’un certificat Covid par les employés ne peut être exigée que si l’entreprise définit des mesures de protection de la santé en la forme écrite conformes au principe STOP (S=substitution, c.-à-d. maintien des distances, T=mesures de protection techniques, O=mesures de protection organisationnelles, P=mesure de protection personelle c.-à.-d. équipement personel de protection comme masques, désinfectant, etc.) et met en œuvre des concepts de tests7. En outre, les informations sur le statut immunitaire ou le résultat du test ne peuvent pas être utilisés à d’autres fins8.
3. Obligation de consultation et de forme écrite
L’obligation de présentation d’un certificat et les mesures de protection doivent être documentées par écrit dans un plan de protection9. Avant d’introduire définitivement un certificat Covid-19 et les mesures y relatives sur le lieu de travail, l’employeur doit également informer les employés et les consulter10. Les droits de participation (information et consultation) sont exercés directement par les travailleurs, si aucune commission du personnel ne les représente dans la société11.
Les employeurs ont le devoir d’examiner avec sérieux toutes les propositions alternatives et les préoccupations adressées par le personnel. Par conséquent, l’entreprise devra justifier et expliquer le bien-fondé d’une fin de non-entrée en matière ou de prise en compte partielle des propositions ou des objections des travailleurs. Toutefois, la décision concernant les mesures à mettre en œuvre reste exclusivement du ressort de l’employeur. Bien évidemment, ce pouvoir décisionnel va de pair avec la responsabilité quant aux conséquences juridiques en résultant.
Enfin, l’employeur devra prévoir les mesures en la forme écrite. Il en va ainsi de l’introduction du contrôle du certificat Covid-19 et des mesures STOP13. Cette documentation sera rendue accessible pour d’éventuels contrôles de l’Inspection du travail14.
Nota bene: Malgré l’introduction des certificats et des mesures d’accompagnement STOP, les mesures d’hygiène édictées par l’OFSP devront être maintenues15. Il en va ainsi de l’interdiction du serrage de mains, de la garantie de la distanciation de 1,5 mètre, de l’aération régulière et systématique des locaux et du port du masque dans les locaux accessibles au public.
Dans certaines situations à risque, le port du masque reste obligatoire sur le lieu de travail. Tel est le cas, par exemple, lors de:
- Contacts étroits;
- Contacts de longue durée;
- Présence de plusieurs personnes dans une pièce;
- Pièces mal ventilées.
Selon les résultats obtenus par le simulateur de scénarios d’intérieur16, une séance de travail pourrait être réalisée dans des conditions proches de la réalité (taille de la salle de réunion: 100 m2, durée de séjour des participants: 2 heures, bonne aération des locaux: taux de renouvellement de l’air, 3x/heure, distance minimale entre les personnes de 0,6 m) en pré-sence d’un superpropagateur du coronavirus et en évitant la contamination des autres per-sonnes par le port systématique du masque17.
Dans les conditions susvisées (masse d’air, etc.) et en présence d’une personne infectée qui n’est pas un superpropagateur mais un émetteur normal, les autres personnes assistant à la séance ne seraient pas exposées, même en l’absence de port du masque. Pour autant que les distances minimales soient respectées. La nécessité du port du masque d’hygiène pour éviter toute exposition dans les lieux clos et, par conséquent, sur le lieu de travail, dépend fortement de nombreux paramètres. Actuellement, lesdits paramètres varient fortement à cause de l’augmentation du nombre de personnes vaccinées et guéries. Dans tous les cas, la levée du port du masque oblige l’employeur à respecter son obligation de diligence concernant le respect des distances minimales18.
4. Certificat sans données de santé
Selon l’option choisie par le demandeur, le certificat Covid est établi en format électronique ou papier19. Pour les utilisateurs de l’application officielle pour smartphones «Covid Cert», développée par l’Office fédéral de l’informatique et de la télécommunication, la sécurisation de la transmission et de la conservation du certificat est assurée20. L’application permet également aux employés d’activer un «certificat light»21. Ce certificat contient moins de données personnelles, et aucune donnée de santé, en particulier. Seules les indications utiles à l’identification du détenteur, la caractérisation comme certificat Covid-19 suisse ne contenant qu’un minimum de données ainsi que la date de fin de la validité sont mentionnés22.
En vertu des principes de proportionnalité et de finalité, l’employeur devrait, autant que possible, se limiter à requérir la version allégée du certificat23. Le principe de proportionnalité est concrétisé par l’article 4 alinéa 2 de la loi fédérale sur la protection des données et prévoit que, seules, les données pertinentes et strictement nécessaires au regard de la finalité du fichier doivent être traitées. Un équilibre raisonnable doit ainsi être maintenu entre la finalité du traitement et l’atteinte à la personnalité24. En d’autres termes, les données personnelles doivent être traitées autant que nécessaire et aussi peu que possible25. Par conséquent, les employeurs ne seront pas en droit d’obtenir ou de collecter des informations supplémentaires quant au statut immunitaire ou l’infection des employés (guérison, vaccination, test), si cette différenciation n’est pas utile à l’application des mesures26. En outre, les employeurs ne peuvent traiter que les données utiles à l’exécution du contrat de travail27. La délivrance d’informations sur le statut immunitaire à l’employeur ne saurait être admise que dans des secteurs particulièrement exposés, à l’instar du domaine de la santé, où une obligation vaccinale pourrait être justifiée.
Les certificats Covid-19, y compris ceux comportant des données minimisées, pourront ensuite être scannés et vérifiés au moyen de l’application officielle «Covid Check»28.
5. Coût des tests
L’entreprise qui exige, sur la base de motifs objectifs, une obligation de présentation de certificat Covid-19, devra également mettre en place une procédure de tests réguliers (en série) pour les personnes n’étant pas au bénéfice d’un statut d’immunité, soit les employés ni vaccinés ni guéris29. A relever que les coûts de tests répétés ne sont plus pris en charge par la Confédération depuis le 1er octobre 2021. Ces tests individuels sont donc à la charge de l’employeur. La Confédération peut toutefois, sur demande et en accord avec les autorités cantonales compétentes, continuer à prendre en charge les frais d’introduction d’un système de contrôle récurrent sur le lieu de travail. Si les mesures de protection permettent aux travailleurs sans certificat Covid-19 de continuer à fournir leurs prestations de travail et que la présentation a pour objectif unique d’alléger les mesures, comme la levée de l’obligation de port du masque ou la participation aux séances, aucune obligation de mise à disposition de test, i.e. de prise en charge par l’employeur30.
6. Interdiction de la discrimination
Dans le cadre de l’application des mesures STOP, l’employeur peut traiter différemment les employés au bénéfice d’un certificat Covid ou pas, si tous les employés ne sont pas soumis à l’obligation de présentation d’un certificat Covid ou si certains disposent d’une option de retrait (renonciation au certificat). Cette différenciation ne doit toutefois pas être discriminatoire. Elle doit ainsi se fonder sur des motifs objectifs, représenter la mesure la moins incisive et ne pas porter atteinte à la personnalité du collaborateur. Dans tous les cas, de telles mesures doivent être appréciées en prenant en compte les circonstances du cas d’espèce et en mettant en balance les intérêts de chacun. En cas de doute, un expert devra être consulté (spécialistes MSST, médecine du travail, etc.). y
1 Communiqué de presse du SECO du 8 septembre 2021, Coronavirus: le Conseil fédéral étend l’obligation de présenter un certificat et lance une consultation sur de nouvelles règles pour entrer en Suisse.
2 Ci-après: certificat de vaccination Covid-19.
3 Ci-après: certificat de guérison Covid-19.
4 Ci-après: certificat de test Covid-19. Les tests antigéniques rapides doivent être réalisés par ou sous la supervision de profession-nels spécialisés et formés dans des centres de tests, des établissements médicaux ou des pharmacies, autorisés par les cantons à délivrer des certificats Covid.
5 Cf. art. 1 de l’ordonnance du 4 juin 2021 sur les certificats attestant la vaccination contre le Covid-19, la guérison du Covid-19 ou la réalisation d’un test de dépistage (RS 818.102.2; ordonnance COVID-19 certificats).
6 Cf. art. 12 ss. de l’ordonnance sur les mesures destinées à lutter contre l’épidémie de Covid-19 en situation particulière du 23 juin 2021 (RS 818.101.26; ordonnance COVID-19 situation particulière).
7 Art. 25 al. 2 de l’ordonnance COVID-19 situation particulière et SECO, Aide-mémoire pour les employeurs-Protection de la santé au travail-CORONAVIRUS (COVID-19), version du 10 septembre 2021, (ci-après: aide-mémoire du SECO pour les employeurs), p. 2.
8 Chiffre 2, let. ater de l’annexe 1 de l’ordonnance COVID-19 situation particulière.
9 Art. 25 al. 2ter de l’ordonnance COVID-19 situation particulière.
10 Aide-mémoire du SECO pour les employeurs, p. 2.
11 Art. 25 al. 2 de l’ordonnance COVID-19 situation particulière.
12 Ibidem.
13 A savoir, la possibilité de travailler à distance, la distanciation physique, la séparation des équipes, l’aération régulière des locaux ou le port de masques d’hygiène (cf. art. 25 al. 2 de l’ordonnance COVID-19 situation particulière).
14 Ibidem.
15 Art. 25 al. 1 de l’ordonnance COVID-19 situation particulière.
16 Simulateur de scénarios d’intérieur pour le COVID-19 (Outil de calcul de la charge virale en milieu fermé du SECO), Version 1.5 de Michael Riedeker (fr), SCOEH, (scoeh.ch), 10 novembre 2020, revue par Christian Monn, Secréatariat d’Etat à l’économie (SECO). Traduit en français
par Michael Riedeker et Deyan Poffet (Unisanté).
17 Cf. étude de base: Riediker, M. and Monn, C. (2020). Simulation of SARS-CoV2 Aerosols Emissions in the Infected Population and Resulating Airborne Exposures in Different Indoor Scenarios. Aerosol, in: Aerosol and Air Quality Research Volume 21, Issue 2, February 2021.
18 Cf. Informations pour les professionnels du SECO, Protection contre le risque de transmission d’agents pathogènes par voie aérienne, version du 20.08.2021; accessible à l’adresse suivante: seco.admin.ch/seco/fr/home/Publikationen_Dienstleistungen/Publikationen_und_Formulare/Arbeit/Arbeitsbedingungen/Merkblatter_und_Checklisten/merkblatt_luftuebertragung_krankheitserregern.html
19 Art. 9 al. 1 de l’ordonnance COVID-19 certificats.
20 Cf. art. 28 al. 1 de l‘ordonnance COVID-19 certificats.
21 Art. 28a al. 1 de l’ordonnance COVID-19 certificats.
22 Art. 28a al. 3 de l’ordonnance COVID-19 certificats.
23 Département fédéral de l’intérieur (DFI), Rapport explicatif concernant l’ordonnance du 23 juillet 2021 (RS 818.101.26) sur les mesures destinées à lutter contre l’épidémie de COVID-19 en situation particulière; Modification du 8 septembre 2021 (extension de l’obligation de présenter un certificat), ci-après: Rapport explicatif de l’ordonnance COVID-19 situation particulière, p. 6.
24 Les données de santé sont des données particulièrement sensibles au sens de l’art. 3 let. c ch. 2 LPD.
25 edoeb.admin.ch/edoeb/de/home/datenschutz/ueberblick/datenschutz.html.
26 Cf. aussi art. 25 al. 2bis de l’ordonnance COVID-19 situation particulière.
27 Art. 328b CO en relation avec l’art. 13 al. 2 let. a LPD.
28 Cf. Art. 29 de l’ordonnance COVID-19 certificats.
29 Rapport explicatif de l’ordonnance COVID-19 situation particulière, p. 6.
30 Ibidem.