Le Service d’exécution a décidé que dès le 1er juillet 2014, les détenus ne pourraient en règle générale, plus appeler leur avocat par téléphone. D’éventuelles exceptions devront être autorisées par la direction. L’autorité d’exécution se serait vue contrainte à des économies et ne pourrait plus offrir le «service» antérieur.
En fait, le taux d’occupation de la prison a notablement augmenté depuis l’introduction du CPP. Cela est dû à l’institution du TMC. Alors que, auparavant, les procureurs ordonnaient la détention directement et devaient ensuite assumer également la «responsabilité morale» pendant la détention, ils se bornent aujourd’hui à la demander au TMC qui décide. Cela est toutefois encore très loin d’une pratique affermie et stricte devant obéir à l’Etat de droit et aux principes qui en découlent (en particulier de la proportionnalité). Les demandes de mise en détention émanant du Ministère public sont régulièrement admises (parfois même à sa propre surprise). La «responsabilité morale» de la détention est ainsi transférée à une autre instance. L’apparente amélioration du droit constitutionnel a conduit à une atténuation des responsabilités, et c’est le principal motif de l’augmentation des effectifs dans la prison.
Maintenant, la direction de la prison dit vouloir faire des économies, et, ainsi limiter les entretiens téléphoniques avec le défenseur. Il est à tout le moins douteux que la Constitution et la CEDH en lien avec le CPP suisse autorisent une telle interprétation du règlement intérieur de la prison et que la mesure atteigne le but déclaré.
Pour les avocats, le nouveau règlement entraîne dand tous les cas plus de travail. A l’avenir, le détenu qui veut communiquer avec son mandataire doit lui écrire une lettre. Le ou la mandataire peut alors téléphoner et demander que le détenu rappelle ou peut convenir d’un rendez-vous. Bien des détenus ne maîtrisent cependant pas l’allemand et ne peuvent pas du tout écrire à leur mandataire ou ne comprennent déjà pas le message. C’est pourquoi le défenseur devra désormais faire régulièrement lui-même la démarche.
La nouvelle règle ne réduira pas le temps de travail du personnel de la prison de manière significative. Mais il est certain qu’il y aura d’autres charges supplémentaires, avant tout sur le plan de la défense. La prise régulière de nouvelles et le temps passablement accru pour une visite en prison se répercuteront dans des factures d’avocat plus élevées qui, doit-on préciser, devront pour une large proportion être réglées par l’Etat dans le cadre de la défense nécessaire ou d’office.
Surtout au début, l’avocat est, la plupart du temps, le seul interlocuteur. Il n’est pas rare que les personnes en détention provisoire soient dépressives, voire suicidaires, et il est utile à maints égards qu’elles puissent parler avec leur mandataire, s’entretenir sur la suite de l’instruction, etc., et atténuer leurs craintes. Cette «composante psychologique» de l’entretien téléphonique avec l’avocat est ainsi également profitable à l’ambiance de la prison.
Il faut s’attendre aussi à d’assez longues entrevues avant les auditions (avec des temps d’attente pour tous), car la possibilité d’une discussion par téléphone est supprimée. Et, si une telle entrevue préalable n’est pas possible, l’inculpé se taira avec raison.
La nouvelle réglementation des téléphones a donc pour conséquence davantage de temps de travail pour la défense, davantage de stress pour l’inculpé et du retard pour l’instruction.
Même si c’est contrebalancé par une décharge minime au niveau du personnel de la prison de Grosshof, cette idée inhumaine d’épargner est un non-sens économique reposant sur une base juridique douteuse. Au lieu de se livrer à de petits calculs mesquins, le Service d’exécution et la direction de la prison feraient mieux de débattre de la longueur de la détention et de ses causes.
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