Seulement de manière limitée. Le droit national étatique peut renvoyer à appliquer une version spécifique de normes privées (par ce qu’on nomme un renvoi statique), lorsque ces normes privées sont accessibles de façcon appropriée. Si le législateur souhaite renvoyer à la dernière version en vigueur de normes privées (par ce qu’on nomme un renvoi dynamique), les normes privées ne doivent être que l’image de la pratique administrative, et donc ne fonder aucuns droit et devoir véritables. Un renvoi dynamique représente une délégation législative.
Le rapport entre les normes privées et le droit étatique n’a, longtemps, eu qu’un rôle insignifiant dans la jurisprudence du TF. Dans l’ATF 136 I 316 ss, la Haute Cour a apporté d’importantes clarifications. L’affaire concernait la construction de deux nouvelles villas à Zermatt. La commune factura au propriétaire les coûts du raccordement d’eau et des canalisations. Ce faisant, elle se basait sur le règlement relatif aux taxes de la commune de domicile. Celle-ci constata que les taxes correspondantes se calculaient d’après le contenu en mètres cubes du volume construit d’après la Société suisse des ingénieurs et architectes (SIA).
Cette société a remplacé le code de bonnes pratiques constitué par la norme 116 en 2003 par celui de la norme 416. Dans cette nouvelle recommandation, le contenu en mètres cubes était en moyenne de 10% plus faible que selon l’ancienne norme SIA. Cela avait un effet direct sur les taxes perçues par la commune de Zermatt, qui – selon qu’on appliquait l’une ou l’autre norme – variaient également de 10%. Les parties se disputaient pour savoir si c’était l’ancienne ou la nouvelle norme SIA qui devait s’appliquer.
Le Tribunal fédéral part de l’idée qu’il s’agit d’un renvoi dynamique, lequel n’est valable, selon lui, que dans les conditions suivantes: «Comme il revient au législateur, selon le principe de la légalité et la séparation des pouvoirs, d’adopter lui-même les normes importantes, seules des dispositions de moindre importance peuvent être déléguées à des privés. Toutefois, il est nécessaire de disposer, à cet effet, d’une délégation législative conforme au droit constitutionnel, qui décrive entre autres les privés comme sujets de la législation et l’acte de transfert légal nécessaire (loi formelle). Si les normes sont insignifiantes au point qu’elles puissent être l’objet d’une ordonnance d’exécution (comme, par exemple, des normes purement techniques), il s’agit sur le plan fonctionnel d’administration: dans ce cas, ce sont des tâches administratives qui sont transférées à des privés (pour la Confédération, se référer à l’art. 178 III Cst.).»
Ainsi, un renvoi à des normes privées ne sera possible que pour des normes d’exécution, car une véritable délégation législative à des privés sera normalement exclue par la Constitution. Le Tribunal fédéral a fait une réflexion analogue s’agissant du règlement de cotation d’une Bourse, et il l’a déclaré non contraignant pour des tiers (ATF 137 III 37 ss).
Le cas des renvois statiques à des normes privées est moins délicat. Du point de vue de la technique législative, cet acte comporte l’inconvénient que la norme étatique doit toujours être mise à jour, lorsqu’il est nécessaire de déclarer applicable une nouvelle (meilleure) norme privée. Ces normes privées doivent aussi être disponibles sous une forme appropriée. Car le renvoi ne doit pas être l’occasion de contourner l’obligation de publier le droit étatique.