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Plaidoyer 6/12
20.11.2012
Dernière mise à jour:
06.10.2013
Sylvie Fischer
On ne peut être qu'admiratif devant le travail qu'ont réussi à accomplir, contre vents et (surtout) marées, les Cours des comptes genevoise et vaudoise. Cette institution, venue de France et inconnue des paisibles cantons alémaniques, est une juridiction financière chargée de contrôler la régularité des comptes publics ainsi que des institutions bénéficiant de subventions étatiques.
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On ne peut être qu'admiratif devant le travail qu'ont réussi à accomplir, contre vents et (surtout) marées, les Cours des comptes genevoise et vaudoise. Cette institution, venue de France et inconnue des paisibles cantons alémaniques, est une juridiction financière chargée de contrôler la régularité des comptes publics ainsi que des institutions bénéficiant de subventions étatiques.
Jalousement autonome vis-à-vis de l'administration cantonale ainsi que des organismes qu'elle est censée surveiller, la Cour des comptes genevoise «organise librement son travail», dit son site internet. Un peu trop librement d'ailleurs, puisque le règlement de fonctionnement de la Cour des comptes du 25 mars 2010 (RS/GE CDC 20100 325) nous apprend, à son article 6 I, que «les magistrats titulaires sont chargés du bon fonctionnement administratif de la Cour et de sa surveillance interne». Une sorte d'auto-gestion confiée au bon vouloir des magistrats eux-mêmes, en quelque sorte. On ne s'étonnera pas qu'avec de pareilles dispositions disciplinaires les conflits entre magistrats ne soient pas près d'être arbitrés, le président étant «en outre chargé de l'ordre du jour et responsable de l'établissement fidèle du procès-verbal». Pour la police de l'audience, on repassera.
Il a donc suffi d'un juge PDC un peu shérif sur les bords et de son collègue suspectant de possibles scandales (Ensemble à gauche) pour que la Cour des comptes genevoise se transforme en aquatique pantalonnade. Pourtant, les rapports portent sur des questions intéressant le citoyen, telles que la gestion des Rentes genevoises, la passation des marchés publics de services et fournitures de l'Université ou des Transports publics genevois ou encore le dispositif genevois pour l'accueil de la petite enfance, au sujet duquel des remarques pleines de bon sens sont faites. Avant que le bureau du Grand Conseil n'ait livré un projet de loi permettant de concrétiser la compétence de surveillance de la Cour, on peut douter que son simple renouvellement ne règle le problème de fond.
Tout autre ambiance dans le canton de Vaud, où, se félicite Pascal Broulis, la question des sanctions disciplinaires des membres de la Cour des comptes qui porteraient atteinte à la dignité de leur charge est bien réglée par l'art. 14 de la loi sur la Cour des comptes (RS/VD 614.05) et par l'art. 4 I du Règlement de la Cour des comptes du 14 octobre 2009, précisant que chaque magistrat «doit respecter le devoir de diligence dans l'exercice de sa charge» et établissant des sanctions allant du blâme à la destitution. Un «Code de déontologie» (septembre 2009) précise en outre, à son art. 6, que «les membres de la Cour (...) évitent tout comportement et toute attitude de nature à discréditer leurs collègues, leur fonction ou la Cour des comptes du canton de Vaud». Ouf!
Mais quel type de contrôle la Cour des comptes vaudoise exerce-t-elle réellement? Le choix de ses membres, parmi d'anciens politiques non réélus ou en attente d'un dernier poste avant la retraite, n'est pas pour lui insuffler le dynamisme nécessaire à questionner le fonctionnement d'institutions subventionnées dont certains étaient proches ni de dépenses publiques bénéficiant à des sociétés où d'autres ont siégé. Le travail de cette Cour, soucieuse avant tout de la «bonne ambiance» dans laquelle se déroulent ses audits, est discuté. Passons sur le choix des sujets (la gestion des risques dans huit musées; celle du parc de véhicules ou de la restauration collective à l'Etat). La précision attendue n'y est pas toujours - droit de superficie accordé à l'UEFA signalé à Gland dans le communiqué de presse et à Nyon dans le rapport. «La majorité des rapports rendus par la Cour des comptes peinent à trouver une utilité politique immédiate», déplore Cesla Amarelle, députée réclamant une réforme par voie de motion. Moins de magistrats vaudois, mieux épaulés par des collaborateurs formés et susceptibles d'assumer plusieurs mandats consécutifs serait la voie à suivre.