Droit constitutionnel et administratif
Si un blocage de compte est initialement ordonné en tant que mesure d’enquête secrète, par exemple en lien avec une obligation pour la banque de garder le silence, il doit être ultérieurement notifié par écrit aux titulaires de comptes concernés. Le délai de recours doit être calculé à partir du moment de cette notification écrite. Un entretien téléphonique informel avec le Ministère public ne constitue pas une notification d’une ordonnance de blocage, et ne déclenche pas le délai de recours.
(1B_537/2019 du 25.11.2020)
Le TF admet le recours de deux organisations de protection de la nature dans le cadre du projet de rehaussement des murs du barrage de la Centrale hydroélectrique du Grimsel. La cause est retournée au Conseil d’Etat bernois. Le projet doit être intégré au plan directeur cantonal, de façon à ce que les différents intérêts liés à la protection et à l’exploitation du site soient pondérés. Dans ce contexte, il y a également lieu d’assurer une coordination avec le projet de la Centrale électrique de Trift.
(1C_356/2019 du 4.11.2020)
Un avocat fribourgeois a fondé une SA dont il était l’actionnaire unique. La Commission du Barreau de l’Etat de Fribourg a demandé une modification des statuts pour garantir l’indépendance de la profession d’avocat, avec le texte « si la société n’offre pas à l’acquéreur de reprendre ses actions à leur valeur réelle, l’acquéreur, dans la mesure où (…) il n’est pas lui-même un avocat inscrit dans un Registre d’avocat d’un canton suisse aura l’obligation, dans un délai d’un an, de transférer ses actions à un tiers » remplissant cette exigence. Le TF admet le recours de l’avocat, la mesure enfreignant le droit fédéral, en particulier les art. 685b al. 4 et 7 et 685c al. 2 CO, ainsi que la LLCA.
(2C_372/2020 du 26.11.2020)
Le Tribunal fédéral admet un recours de l’association « Société Numérique » et de plusieurs personnes privées, parmi lesquelles un avocat et des journalistes. Le Tribunal administratif fédéral doit examiner si le traitement présumé de leurs données dans le système actuel d’exploitation radio et du réseau câblé du Service de renseignement de la Confédération (SRC) viole leurs droits fondamentaux.
(1C_377/2019 du 1.12.2020)
Droit civil
Important arrêt de principe sur l’entretien de l’enfant, tenant compte de la révision législative du 1er janvier 2017. Le montant de la contribution d’entretien repose sur plusieurs critères. Il ne s’agit pas seulement de prendre en compte ce dont un enfant a besoin pour couvrir ses besoins physiques (dont la nourriture, les vêtements, le logement et les soins médicaux) et pour assurer les soins personnels nécessaires. La situation des parents dans la vie et leur capacité de paiement doivent également être prises en compte pour déterminer la pension alimentaire due à l’enfant. Ce dernier doit pouvoir bénéficier d’une capacité de paiement supérieure à la moyenne et d’une position plus élevée dans la vie de ses parents. Dans son arrêt, le TF explique en détail la méthodologie de calcul de la pension alimentaire.
(5A_311/2019 du 11.11.2020)
Jugement complet sur la question de la partialité des juges à temps partiel qui sont également actifs comme avocats. Dans les activités typiques d’un avocat (sauvegarde des intérêts des clients dans le cadre de conseils juridiques, rédaction de conclusions juridiques et représentation des clients devant une autorité ou un tribunal), une position stricte à l’égard de l’indépendance judiciaire est justifiée. Même les activités purement administratives d’un avocat officiant comme juge à temps partiel ou de son cabinet d’avocats pour une partie à la procédure ne sont pas inattaquables. Toutefois, toute relation de nature économique, professionnelle ou personnelle ne fonde pas en elle-même, prima facie, une apparence de partialité. Cas d’un juge à temps partiel au Tribunal fédéral des brevets qui travaille dans un cabinet d’avocats, inscrit au Registre des brevets en tant que représentant (administratif) des parties suisses des brevets européens.
(4A_243/2020 du 5.11.2020)
Droit pénal
En raison de conditions de détention illicites, un juge de paix a ordonné au canton de Vaud de verser une indemnité de 1350 francs (art. 431 CPP) à une personne qui avait passé 27 jours en détention préventive. Le juge a également considéré que le canton de Vaud n’était pas en droit de déduire ce montant des frais de justice à payer. Le TF confirme cette décision. Une indemnité versée en raison de conditions de détention illicites remplit les conditions particulières de l’art. 125 ch. 2 CO, et ne peut donc être éteinte par compensation avec la créance de l’Etat portant sur les frais de procédure.
(6B_117/2020 du 13.11.2020)
Selon l’intention du législateur, les procédures d’appel écrites constituent l’exception en matière pénale. L’art. 406 CPP précise les cas dans lesquels elles peuvent être ordonnées. Selon l’al. 2, la direction de la procédure peut, avec l’accord des parties, ordonner la procédure écrite lorsque (lit. a) la présence du prévenu aux débats d’appel n’est pas indispensable, et lorsque (lit. b) l’appel est dirigé contre des jugements rendus par le juge unique. Dans la doctrine et la jurisprudence, la question de savoir si les lettres a et b de cette disposition posent des critères cumulatifs ou alternatifs est controversée. Le TF penche en faveur de la première approche.
(6B_973/2019 du 28.10.2020)
Celui qui partage sur Facebook un contenu déjà publié et attentatoire à l’honneur émanant d’un tiers ne peut pas se prévaloir du « privilège des médias » de l’art. 28 CP, aux termes duquel l’auteur est seul punissable. Le TF rejette sur ce point le recours d’un utilisateur de Facebook, qui a partagé en 2015 un contenu émanant d’un tiers, qui s’en prenait à un défenseur des animaux. Comme l’article avait déjà été publié, l’application du régime de responsabilité privilégié du droit pénal des médias ne pouvait entrer en ligne de compte.
(6B_440/2019 du 18.11.2020)
Droit des assurances sociales
Pour l’interprétation de l’art. 72bis RAI (expertises médicales pluridisciplinaires) et pour déterminer dans quelle mesure le principe du hasard est appliqué, il faut examiner si des mesures correctives structurelles sont nécessaires du point de vue de l’état de droit afin de garantir l’indépendance et l’impartialité des experts. L’attribution des mandats selon le principe aléatoire neutralise les craintes générales de dépendance et de biais découlant des conditions cadres du système d’évaluation. Le fait qu’un expert ait déjà examiné une personne ne peut objectivement donner lieu à une apparence de partialité. Rien ne s’oppose à la rédaction d’un rapport de suivi dans les trois ans suivant la rédaction d’un rapport initial d’expertise par le même expert. Le fait que le recourant n’ait pas été d’accord avec les résultats du premier rapport d’expertise n’y change rien. Le principe du hasard ne vise pas à améliorer les chances matérielles objectives de succès dans le cas particulier.
(9C_174/2020 du 2.11.2020)