Tribunal fédéral
Frais trop élevés pour une copie de jugement
Une personne a demandé à l’Obergericht zougois de lui envoyer, sous forme anonymisée, un jugement rendu en 2020 dans une affaire pénale. Le tribunal l’a averti que les frais, liés à l’anonymisation du jugement de 48 pages, se chiffreraient à 240 francs. Selon le TF, ces frais de cinq francs par page sont inadmissibles. Certes, l’anonymisation est une tâche chronophage nécessitant le recours à un greffier, mais il faut aussi tenir compte du fait que les émoluments perçus par les tribunaux ne couvrent de loin pas les frais correspondants. Faute d’un ancrage suffisant dans une loi au sens formel, l’émolument prélevé s’avère être contraire au droit fédéral.
(1C_411/2020 du 29.9.2021)
Interdiction d’utiliser les preuves pour défaut d’information
Dans le cadre d’une enquête pénale contre un couple pour faux dans les titres, l’épouse a été interrogée en tant que prévenue. Le Ministère public a attiré son attention sur son droit de ne pas s’auto-incriminer et sur son droit général de refuser de témoigner. Elle n’a toutefois pas été informée de son droit spécifique de refuser de témoigner contre son conjoint, co-accusé. Le TF constate qu’il existe un droit à être informé, avant l’interrogatoire sur le comportement du conjoint co-accusé, de ce droit spéciffique (art. 158 al. 1 lit. b en relation avec les art. 168 al. 1 lit. a et 177 al. 3 lit. 1 CPP). Une violation de ce devoir d’information entraîne une interdiction partielle d’utiliser les preuves.
(1B_56/2021 du 5.10.2021)
Mandat de perquisition superflu
Afin de pouvoir effectuer un contrôle, la police est entrée dans le box de garage d’un conducteur présumé ivre. L’homme a par la suite été condamné à une peine pécuniaire avec sursis de 6 000 francs et à une amende de 1 500 francs pour conduite en état d’incapacité en raison d’une alcoolémie qualifiée. Le TF rappelle qu’en cas de péril en la demeure, comme en l’espèce, une intervention au domicile d’un prévenu peut se dérouler, même sans mandat de perquisition (art. 213 al. 2 CPP).
(6B_913/2021 du 25.10.2021)
Modification inadmissible de la composition du tribunal
Durant une procédure, un tribunal ne peut modifier sa composition qu’en présence de motifs objactifs. L’absence (de courte durée) pour cause de vacances ne constitue pas une raison objective pour modifier ultérieurement la composition communiquée aux parties. Il incombe à l’autorité de s’organiser de manière à mener et à conclure les procédures sans retard, dans le respect des règles de procédure. Dans le cas d’espèce, le TF ne voit pas pourquoi une procédure pendante depuis neuf mois, qui était de surcroît menée par écrit et ne nécessitait pas de respecter des dates déterminées, n’aurait pas pu être terminée en bonne et due forme avant ou, le cas échéant, après l’absence du président de la chambre pour cause de vacances.
(6B_434/2020 du 14.9.2021)
Litige concernant un juge laïc
Selon les art. 30 Cst. et 6 CEDH, toute personne a droit à ce que sa cause soit portée devant un tribunal établi par la loi, compétent, indépendant et impartial. On ne peut déduire de ces dispositions l’existence d’un droit constitutionnel à être jugé par un juge ayant suivi une formation juridique. Le droit à un juge indépendant ou à un procès équitable peut être affecté lorsque des juges laïcs inexpérimentés doivent exercer leur fonction, sans possibilité de faire appel à un expert indépendant. En l’espèce, le TF a rejeté la demande de récusation présentée contre un juge cantonal laïc âgé de 70 ans, dans le cadre d’une procédure de récusation du Ministère public. L’homme dispose d’une expérience de plusieurs années et était assisté d’un greffier au bénéfice d’une formation juridique.
(1B_331/2021 du 7.10.2021)
Pas de coactivité de viol
C’est à tort que la justice du canton de Bâle-Campagne a condamné un homme pour coactivité de viol. Avec un ami, il avait fait la connaissance d’une femme et tous trois s’étaient rendus, après une nuit de beuverie, dans un foyer pour demandeurs d’asile où il résidait. Par la suite, il a eu des relations sexuelles consenties avec la femme. Celle-ci a toutefois refusé d’avoir également des relations sexuelles avec l’autre homme. Après le rapport, le condamné a quitté la chambre en sachant que son ami pourrait violer la femme, ce qui s’est produit. Pour le TF, le fait qu’il soit resté à l’écart de la chambre alors qu’il était au courant de la possibilité d’un viol ou d’une agression sexuelle reste sans conséquence du point de vue pénal, car il n’a pas participé activement à l’agression et il n’a pas non plus une position de garant qui l’aurait obligé à intervenir.
(6B_1437/2020 du 22.9.2021)
Il se croit Suisse à tort durant 22 ans
Selon l’ancienne loi sur la nationalité, un étranger qui a vécu au moins cinq ans en croyant être citoyen suisse et qui a été effectivement traité comme tel par les autorités pendant cette période peut bénéficier d’une naturalisation facilitée, à condition qu’il bénéficie d’une bonne réputation financière et qu’il n’ait pas subi de poursuites. C’est ce qui a été fatal à un homme né en 1993 à Winterthour d’un Libanais et d’une double nationale franco-suisse, qui avait elle-même obtenu la nationalité suisse par un précédent mariage. Lorsque l’homme a voulu faire renouveler son passeport en 2015, les autorités ont constaté qu’il n’avait pas été saisi dans le registre d’état civil électronique et qu’il avait par conséquent été traité à tort comme citoyen suisse pendant 22 ans. En raison de poursuites et d’actes de défaut de biens d’un montant d’environ 20 000 francs, le Tribunal fédéral n’a pas admis qu’il puisse bénéficier d’une naturalisation facilitée.
(1C_683/2020 du 1.10.2021)
Tribunal administratif fédéral
Pas d’attribution de «Public Clouds» à Google
Le 7 décembre 2020, l’Office fédéral des constructions et de la logistique (OFCL) a lancé un appel d’offres pour un marché de services, visant à choisir cinq fournisseurs de services pour son projet «Public Clouds». Les adjudications ont été rendues publiques le 24 juin 2021. N’ayant pas obtenu d’adjudication, la société Google Commerce Ltd a déposé un recours devant le TAF. Par décision incidente, le TAF rejette d’accorder un effet suspensif à son recours, en concluant, à l’issue d’un examen sommaire, que le recours s’avère manifestement infondé. La décision est susceptible de rcecours au TF.
(B-3238/2021 du 18.10.2021)
Swisscom doit respecter les standards
Le TAF confirme les mesures provisionnelles ordonnées par la Commission de la concurrence à l’encontre de Swisscom, obligée de respecter les standards actuels dans la construction du réseau de fibres optiques. En février 2020, Swisscom a rendu publique sa nouvelle stratégie pour la construction du réseau, consistant à appliquer une nouvelle technologie basée sur un modèle à une fibre avec structure en arborescence. Pour le TAF, elle n’a pas réussi à rendre vraisemblable l’existence de motifs technologiques ou économiques suffisants pour déroger au standard en vigueur dans le domaine de la fibre optique. En outre, les aspects de politique d’approvisionnement et de politique régionale pour un approvisionnement des régions périphériques avec des réseaux à très large bande ne sont pas de nature à justifier une restriction de la concurrence. En l’état, il s’agit bien au contraire de considérer la nouvelle stratégie de construction par Swisscom à des pratiques abusives d’une entreprise bénéficiant une position dominante au sens de l’art. 7 de la loi sur les cartels. Le fournisseur de services de télécommunications a, de la sorte, limité le développement technique de ces concurrents.
(B-161/2021 du 30.9.2021)